La communauté internationale, réunie à Paris lundi pour marquer son soutien à l'Irak, a promis de soutenir «par tous les moyens nécessaires», y compris militaires, la lutte de Bagdad contre les jihadistes de l'Etat islamique (EI), sans pour autant annoncer de mesures concrètes pour le moment. A l'issue d'une réunion de trois heures lundi matin au ministère français des Affaires étrangères à Paris, les participants (27 pays arabes et occidentaux, trois organisations internationales) ont répété que Daesh (acronyme arabe de l'EI) était «une menace non seulement pour l'Irak mais aussi pour toute la communauté internationale». Ils se sont «engagés à soutenir le nouveau gouvernement irakien dans sa lutte contre Daesh par tous les moyens nécessaires, y compris une aide militaire appropriée», selon le texte final de la réunion, qui avait solennellement été ouverte par les présidents français François Hollande et irakien Fouad Massoum. «Il n'y a pas de temps à perdre», a exhorté M. Hollande, tandis que M. Massoum appelait à une intervention aérienne «rapide». Les Etats-Unis interviennent déjà militairement en Irak depuis le 8 août, au moyen de frappes aériennes contre les jihadistes dans le nord. La France, qui arme les combattants kurdes irakiens face à l'EI et a déjà annoncé être prête à participer à des frappes, a procédé lundi à de premiers vols de reconnaissance au-dessus de l'Irak. Mais les participants à la coalition n'ont pas fourni les détails de leur riposte face à l'EI. «Il s'agit de bien plus que juste des frappes. Un grand nombre de pays ont offert leur participation, et cela va de pays européens à des pays hors Europe, des pays de la région (moyen-orientale) ou extérieurs à la région», a précisé le secrétaire d'Etat américain John Kerry. «Une conférence, c'est comme une grand-messe, un moment nécessaire de rassemblement et d'écoute, le but était de se mettre d'accord sur un message politique fort à destination du nouveau gouvernement irakien, de se mettre en ordre de combat», a commenté une source diplomatique française, pour qui le prochain rendez-vous important sera une réunion, consacrée à l'Irak, du Conseil de sécurité au niveau ministériel vendredi à New York. «Tous concernés» «Nous sommes tous concernés», a lancé le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, sur fond de multiplication des atrocités par l'EI, avec notamment la décapitation samedi d'un otage britannique, David Haines, un humanitaire de 44 ans. Ce dernier est le troisième otage occidental des jihadistes à avoir été assassiné en moins d'un mois, après les journalistes américains James Foley et Steven Sotloff. L'EI, qui a déclenché une offensive fulgurante mi-juin dans le nord de l'Irak, contrôle quelque 40% du territoire de ce pays, mais aussi un quart du territoire de la Syrie. Les participants à la réunion de Paris se sont toutefois abstenus dans la déclaration finale de la moindre référence à la Syrie, le projet des Etats-Unis d'y étendre leurs frappes aériennes contre les jihadistes étant contesté tant par ceux qui craignent de renforcer le président syrien Bachar al-Assad que par ceux qui soutiennent son régime, comme les Russes et les Iraniens. «Les Russes sont avec nous quant il s'agit de combattre le terrorisme, et si l'on ne parle que de l'Irak c'est relativement simple», a estimé une source diplomatique. En revanche, l'Iran, acteur régional majeur, n'était pas représenté, jugeant illégitime une coalition internationale dont l'objectif réel reste selon lui de renverser le régime syrien. L'Irak a «regretté l'absence de l'Iran» a confié le ministre irakien des Affaires étrangères, Ibrahim al-Jaafari. «Nous avons insisté pour que l'Iran soit présent, cependant ce n'est pas nous qui prenions la décision. L'Iran est un pays voisin qui nous a apporté son appui à plusieurs reprises», a-t-il souligné. Les portes ne sont cependant pas hermétiquement fermées. «Nous ne nous coordonnerons pas avec l'Iran mais nous sommes ouverts à une discussion» à propos de la manière d'éradiquer les jihadistes, a souligné M. Kerry, précisant «nous en avons discuté (avec l'Iran) en marge du P5+1», du nom du groupe de grandes puissances qui négocient avec Téhéran sur son programme nucléaire. Le ministre britannique Philip Hammond a lui déclaré s'attendre à ce que l'Iran se montre ccopératif sur ce dossier. Les frappes en Syrie, où l'EI a établi sa base arrière, restent à l'heure actuelle «hypothétiques», a jugé une source diplomatique française, la stratégie officielle de Paris étant de renforcer l'opposition «modérée», combattant à la fois les jihadistes et le régime de Bachar al-Assad. M. Hammond a rappelé que «l'ampleur des difficultés» à surmonter en Syrie serait tout «autre, (...) pour toutes sortes de raisons, militaires, légales, et techniques». «Mais nous ne l'excluons pas», a-t-il ajouté.