Les OGM sont des organismes vivants dont le patrimoine génétique a été modifié par l'homme pour leur conférer de nouvelles propriétés. Les techniques utilisées permettent de s'affranchir de la «barrière des espèces» et de construire des organismes qui n'auraient jamais existé dans la nature. Ils peuvent être utilisés dans de nombreux secteurs, notamment médicaux, industriels, agricoles et agro-alimentaires. Les applications agricoles et agro-alimentaires sont, sans commune mesure avec les améliorations des races animales et des variétés végétales pratiquées jusqu'à présent par les agronomes, contraints par les lois de la reproduction. Elles posent à la fois des problèmes éthiques (avons-nous le droit d'interférer avec les mécanismes de la vie ?) mais également et surtout des questions socio-économiques et environnementales. Les OGM ne confortent-ils pas l'agriculture dans une voie industrielle commandée par quelques grandes multinationales ? Leur dissémination de l'environnement ne présente-t-elle pas de risques pour la biodiversité et la santé ? Le citoyen, le consommateur que nous sommes, est donc concerné au premier chef par le développement de ces nouveaux produits. Les OGM sont des êtres artificiels dont le patrimoine génétique a été manipulé pour réduire ou accentuer certaines de leurs caractéristiques ou leur en conférer de nouvelles (telle la tolérance à un herbicide ou la résistance à un organisme ravageur pour les OGM végétaux comme le maïs ou le soja). Un OGM est donc un acronyme qui désigne un Organisme Génétiquement Manipulé ou Modifié. Déjà les termes nécessitent une discussion car quand on dit que l'OGM est un organisme manipulé, on rappelle qu'il résulte d'une manipulation, ce qui, implicitement, souligne le caractère de fabrication humaine. En fait, l'usage est plutôt de dire que c'est un Organisme Génétiquement Modifié après que des agences de communication aient déconseillé la référence à une manip. Selon sa définition officielle telle que consignée par la directive européenne 2001/18, un OGM est «un organisme, à l'exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle». Donc la définition légale montre déjà bien que les OGM ne résultent pas d'un procédé naturel... Quelques bases simples de biologie L'information génétique est codée par des molécules d'ADN (Acide Désoxyribo Nucléique). Celles-ci utilisent les mêmes éléments, que l'organisme soit une bactérie, une plante ou un animal (donc l'homme). Cette information est essentiellement portée par des gènes situés sur les chromosomes qui sont transmis par moitié à la descendance (dans la reproduction sexuée) : une issu du père, l'autre de la mère. Un gène permet de synthétiser une protéine, laquelle a une fonction biologique. Par exemple, l'hémoglobine est une protéine. Elle permet le transport d'oxygène pour les humains notamment et est synthétisée par un gène. Comme il existe aussi de nombreuses modifications aléatoires lors de la reproduction, le génome (l'ensemble des informations génétiques) d'un enfant n'est pas une moitié du génome de sa mère et une moitié de celui de son père accolés. On prendra garde au fait que l'individu ne se réduit pas à son génome. Ainsi, deux jumeaux homozygotes (dits vrais jumeaux) ont le même génome. Ils ne sont pourtant pas identiques : ils ne sont pas une "photocopie" l'un de l'autre, même s'ils se ressemblent. De plus, un animal (y compris l'homme) a aussi une dimension d'éducation, de socialisation qu'une vision mécaniste oublierait. En approfondissant, on verrait que ce qui précède, volontairement simplificateur, n'est pas complet. Mais la volonté est de faire comprendre des rudiments de biologie tout en soulignant les limites de la vision mécaniste qu'on présente. Comment fait-on un OGM ? Un premier type d'OGM: Depuis plus de 70 ans, les agriculteurs biologiques utilisent une bactérie (Bacillus thuringensis ou Bt) qui, lorsqu'on l'épand écrasée sur des champs, elle a un effet insecticide : elle tue certains insectes. On s'est donc dit que si l'on identifiait le gène qui fait émettre la protéine à cette bactérie, on pourrait insérer ce gène dans le maïs. Du coup, le maïs émettrait cet insecticide pour tuer les insectes (pas forcément seulement ceux nuisibles). Un tel maïs-insecticide est le premier exemple, concret et réel, d'un OGM. Bref, si l'on veut vendre cet OGM, on peut essayer de le vendre comme écolo, voire bio ... et c'est bien le discours, en occident, de la majorité des scientifiques du secteur privé, mais aussi du secteur public, sans parler des multinationales. On a même dit que ce maïs n'aurait plus besoin qu'on mette d'insecticide et donc qu'il polluerait moins ... ce qui est un mensonge grossier. En effet, même si cet OGM "marchait", le paysan n'aurait plus besoin de mettre d'insecticide, mais c'est parce que la plante le ferait ... Or, la seule question serait de savoir quelle quantité elle en émet. Le secteur privé (et même le secteur public !!) ne s'en est pas préoccupé, mais il semblerait que ce soit entre 10 000 et 100 000 fois plus que l'agriculteur bio (sachant que la protéine n'est en fait pas la même). Ce maïs OGM pollue donc plus, n'en déplaise aux scientifiques et aux multinationales. De plus, les insectes étant confrontés à cet insecticide toute l'année, par toutes les parties de la plante, on crée une forte pression de sélection pour encourager les mutations pour fabriquer des super insectes résistants à cet insecticide ... Est-ce bien raisonnable ? A qui cela profite-t-il en dernier recours ? Dans leur volonté de travailler à l'acceptabilité (en clair à nous les faire gober), les grandes instances qualifient cet OGM de «tolérant à l'insecte» alors qyu'il tue l'insecte. Donc dans le monde politiquement correct des biotechnologies (promues par le secteur public !), quand on tue un insecte, on lui est tolérant ! Un deuxième type d'OGM: Il existe des plantes qui résistent à des herbicides. C'est toujorus du à une protéine qui dégrade l'herbicide et le fait stocker par la plante sans qu'elle meure. Les biotechnologues ont ainsi eu l'idée d'extraire le gène de résistance à un herbicide pour l'insérer dans d'autres plantes (maïs, soja, coton, ...). Cela donne des OGM «résistants à un herbicide». Certains organismes disent que, grâce à cet OGM, on utilise moins d'herbicide. Outre que la consommation n'a pas diminué, on peut dire que si une plante résiste à un herbicide, elle peut, par croisement, transmettre ce gène à d'autres plantes. Cela peut arriver vers des "mauvaises herbes" plus ou moins proches comme pour le colza qui a plusieurs espèces sauvages proches (ravenelle, ...). Bien sûr, dans le cas où il n'y a pas d'espèce sauvage génétiquement proche, la dissémination vers les espèces sauvages est très nettement moins probable, mais pas impossible. En Europe, il n'y a pas d'espèce sauvage de plante avec laquelle le maïs puisse se croiser. De toute façon, la contamination est très forte avec les espèces conventionelles (c'est à dire non OGM). Le risque principal est donc sur le maïs conventionnel. Au Mexique, d'où le maïs est originaire, il y a de nombreuses "mauvaises herbes" avec lesquelles le maïs OGM pourrait se croiser. Or, on a déjà constaté des contaminations probablement dues à des sacs vendus en contrebande par des biotechs. Les contaminations sapent la crédibilité de la filière bio et de la filière classique qui ne peuvent garantir être sans OGM. Donc elles profitent aux biotechs. Peut-on être sûrs que ces contaminations ne sont pas intentionnelles ? En fait, il est déjà arrivé au Canada des disséminations de gènes de résistance à trois herbicides différents pour un même fermier en seulement trois ans ! On a donc créé des mauvaises herbes super-résistantes. Le Progrès si facilement invoqué (c'est la cas de le dire) pour justifier toujours plus de techniques fait donc que nous aurons peut-être à arracher les mauvaises herbes à la main pour manger ! Les enjeux agricoles L'utilisation des OGM en agriculture (surtout sous forme de plantes aujourd'hui, d'animaux peut-être demain), dans l'agro-alimentaire et dans la foresterie, se développe en occident depuis 1993, et avec elle, la controverse. Ces OGM, que certains présentent comme un progrès majeur dans l'histoire agricole, ne répondent en fait à aucune demande, ni du consommateur, ni de l'agriculteur. Leur exploitation commerciale et expérimentale est réalisée, alors que de nombreuses questions d'éthique, d'équilibre socio-économique et de sécurité sanitaire et environnementale demeurent (transfert des transgénes vers des plantes non OGM identiques ou apparentées et vers les organismes du sol, toxicité imprévue sur les insectes, libération de niches écologiques favorables à d'autres prédateurs, aggravation de la pollution par des pesticides, etc.). Le recours aux OGM confine aujourd'hui l'agriculture européenne dans une logique intensive et accroît sa dépendance vis-à-vis des industries semencière et chimique. Plutôt que s'engager dans une telle fuite en avant technologique, l'agriculture a tout intérêt à développer des modes d'exploitation durable et de qualité, basés sur la diversité et la spécificité de ses terroirs et s'appuyant des méthodes agronomiques efficaces (diversité des productions, rotations, etc.). L'usage d'OGM contraint à utiliser une technique que l'agriculteur ne maîtrise pas car il n'est pas biologiste moléculaire. De plus, le semencier ne veut pas que le paysan qui a acheté des semences OGM utilise ses grains ainsi produits pour les resemer car il ne racheterait alors pas de semence. Il est alors logique (même si ce n'est pas normal) que le semencier exige que le paysan lui revende l'intégralité de sa production. Il peut même le faire en promettant un prix de rachat qui attire un paysan voulant diminuer son risque. C'est ce qu'on appelle la stérilisation par contrat ou conventionelle, qui peut s'ajouter à une stérilisation par brevet, voire biologique (Terminator). Ce changement met le semencier en amont de la chaîne alimentaire, ce qui n'est pas neutre tant politiquement (surtout au Sud) que d'un point de vue agronomique ou économique. Quelle sera la place des paysans s'ils deviennent dépendants des semenciers qui sont nettement plus puissants que tous les agriculteurs ? Sont-ils condamnés à n'être que les prolétaires des semenciers ? Une telle dépendance est déjà odieuse au Nord, mais on doit la combattre quand elle menace de s'abattre sur les paysans du Sud, alors qu'on prétend les nourrir et qu'on les asservit en fait. Un syndicat de producteurs de maïs américain (National Corn Grower Association) a bien résumé un argument d'opposition aux OGM. Quand on leur dit que les OGM vont augmenter la production, ils répondent que cela fait vingt ans qu'on leur promet que la production augmente. Et elle augmente. Mais justement parce qu'elle augmente, la production augmente et donc les prix baissent. Et donc leurs revenus baissent. L'argument d'augmentation de la production ne leur semble pas si désirable ! L'agriculture telle que l'imaginaire collectif la garde en mémoire est importante non seulement à maintenir (pas sous cloche !) mais même à développer. En effet, elle matérialise un certain rapport à la nature qui n'est pas de lutte contre, mais de coexistence pacifique. C'est aussi à l'aune de notre travail de la nature que nous pouvons mesurer le travail sur lui-même de l'homme qui lui a fait améliorer sa condition depuis le néolithique. La nature comme altérité est un peu ce qui nous permet de savoir ce que peut être notre humanité. L'agriculture du Nord produit plus que ce qui est consommé dans le Nord. Quel en est la conséquence ? Que les prix baissent et que la pression que peuvent exercer les intermédiaires sur les producteurs est plus grande. Afin de redonner son statut au paysan, plutôt que de le subventionner pour son travail, ne serait-il pas mieux de le payer de son travail ? Ici, un lien avec les problèmes du Sud clarifie les différents acteurs. Une association a consigné le prix d'achat par la Commission européenne d'un kilo de viande de boeuf. Comme c'étaient des milliers de francs CFA qui ne signifient pas grand chose pour les européens, disons que c'était 17 unités. Le même kilo de viande de boeuf doit être exporté pour ne pas faire chuter le cours en Europe. La Communauté européenne l'exporte donc vers des villes comme Dakar, où le prix de revente était consigné : 10 unités. Enfin, il faut savoir que le coût de production au Sénégal est de 12 unités. Résumons : la Commission paie le sur-coût de 17-10 = 7 unités. Grâce à cette subvention, les producteurs africains ne peuvent pas être compétitifs et donc disparaissent. Par ailleurs, cela aide à habituer les sénégalais à manger de la viande comme les européens. Tout le monde y perd : - le contribuable européen qui finance ce trafic ; - le citoyen européen qui se retrouve à financer l'agriculture exportatrice qui pollue au lieu d'une agricuture qui polluerait moins ; - le producteur africain qui ne peut être compétitif. Les seuls qui profitent de ce système sont ceux qui distribuent les subventions (côté Europe comme côté national : les chambres d'agriculture contrôlées par certains syndicats agricoles qui justement défendent les OGM). Pour ce qui concerne le Sud, et sans doubler l'argumentation sur la faim dans le monde, on doit dire : pour produire il faut de la terre, des semences, de l'eau et du soleil. - Au Brésil, les paysans ne peuvent pas avoir accès à la terre, alors même que la loi les autoriserait à utiliser une terre si elle n'est pas utilisée. Pourtant, ils ne l'appliquent pas. Pourquoi ? Car les gros propriétaires terriens paient des milices qui tuent les paysans qui s'installeraient sur des terres (non cultivées !). Certes ce problème est différent en Inde où la propriété est, d'abord, plus morcellée et plus transparente, mais on peut retenir que sans terre, un paysan est un SDF et on ne peut pas s'étonenr qu'il meure de faim. Il est apparu récemment que des Etats du Nord et de grandes entreprises achetaient des terres au Sud afin d'y produire des matières végétales destinées à leur propre consommation. Ainsi, 1 millions d'hectare (ha) de Madagascar, 690.000 ha au Soudan, 270.000 ha en Mongolie sont possédés par la Corée du Sud. De même 1,2 millions d'ha aux Philippines, 700 milles ha au Laos sont possédés par la Chine (qui n'a que 9% des terres arables, mais 40% de la population active agricole). De même encore, 1,6 million d'ha en Indonésie sont possédés par l'Arabie Saoudite. Et là, les titres de propriétés peu clairs sont souvent détournées par les gros acheteurs, voire par les Etats pour confisquer les terres et les vendre au profit du pays du Nord ! On n'insistera jamais assez sur le fait que c'est une forme de colonialisme car le déséquilibre des monnaies fait que les achats peuvent sembler pour des prix importants pour les locaux du Sud, mais sont dérisoires pour des pays à forte monnaie. De plus, ces achats sont destinés à faire produire des matières agricoles par un pays sans que ce pays puisse les consommer puisqu'ils sont destinés à être exportés au Nord. C'est ainsi qu'on peut avoir un pays dans lequel la population meure de faim mais que ce pays exporte des matières agricoles ... Est-ce juste ? - Sans semences, et surtout sans diversité de semences, les paysans ne peuvent pas produire et donc manger. Il faut donc rappeler aux paysans que les semences dont ils ont besoin sont les semences de cultures vivrières (ce qu'ils mangent) et non de cultures de rente (ce qu'ils peuvent envisager de vendre sur un marché souvent global comme c'est le cas avec le coton). On le voit bien en Inde où des semenciers (qui, ô surprise font aussi des OGM !) ont incité il y a plusieurs années les paysans à cultiver du coton au lieu des cultures vivrières car les cours étaient hauts. Mais comme ces semenciers ont incité presque tous les paysans du monde (y compris en Afrique et particulièrement au Mali), la production a augmenté fortement. Mais si la production augmente fortement, les prix... baissent fortement. et donc les paysans peuvent en arriver à ne plus pouvoir gagner assez. Mais comme ils ont supprimé leurs cultues vivrières, ce qu'ils ne peuvent pas acheter n'est pas compensé par ce qu'ils produisent puisqu'ils ont basculé en cultures de rente et non vivrière. Notez que le semencier, lui, mesure son bénéfice au nombre de semences de coton vendues et pas au cours du coton. Son intérêt est donc que la production soit forte (et donc les cours bas !). - Il faut de l'eau et elle est parfois accaparée par certains gros propriétaires. Ou tout simplement rare et là il n'y a rien à faire qu'essayer de faire avec l'eau disponible ! - Pour le soleil, fort heureusement, il ne peut encore être détourné et est donc partagé (selon aussi la propriété foncière !). Les enjeux alimentaires Les OGM pourraient-ils résoudre la faim dans le monde ou aider à la résoudre ? A l'évidence la réponse à la première question est non. Il faut en fait revenir à pourquoi la faim est endémique dans certains pays. En fait, il existe des pays où les gens meurent de faim alors que le pays exporte des produits agricoles. Imaginons ce qui arriverait dans un tel pays si l'on double la productivité de l'agriculture. Eh bien ceux qui exportent (et qui n'ont vraiment pas faim !) doubleraient leurs bénéfices. Si les gains de productivité se font au détriment du recours à la main d'oeuvre, les pauvres auraient encore moins de travail. Ce qui les nourrirait encore moins ! De toute façon, ce ne sont pas eux qui profitent de ce doublement de la productivité. En clair, plus que la question de la productivité, c'est la question de qui profite de la productivité. C'est aussi la conclusion des études de Amartya Sen (économiste indien qui a eu le prix Nobel en économie pour ses travaux sur la faim dans le monde) qui a montré en le chiffrant ce qu'on vient de montrer : La faim ne résulte pas d'un défaut de production, mais d'un défaut d'accès à la propriété foncière, d'infrastructures minimales (routes, camions, ...) pour mieux répartir les écarts de production entre des régions, d'accès aux information, de démocratie, ... Une étude menée en 2013 montre que les OGM ne répondent pas à la contradiction "moins de terre agricole disponible, mais plus de bouches à nourrir". Le régime alimentaire des pays dits en développement se modifie ; ils consomment de plus en plus d'aliments d'origine animale (viande, lait, œufs). Or, la production de ces aliments-là nécessite souvent davantage de calories que ce qu'ils offrent en retour : pour la viande de bœuf, par exemple, le ratio est de l'ordre de vingt sur un. Autre question importante est relative à l'utilisation des plantes GM comme agro-carburants et pour d'autres usages industriels. Au Brésil et aux États-Unis, en 2010, 6 % de la production agricole globale étaient des agrocarburants. Pour l'instant, l'usage de cultures traditionnellement alimentaires pour faire tourner des moteurs reste cantonné à quelques pays, mais la tendance évolue rapidement (+ 450 % en dix ans). Aujourd'hui, tous usages confondus, 9 % (en poids et en colories) et 7 % (en protéines) des cultures alimentaires ne servent pas à nourrir des humains. Les auteurs concluent qu'un changement dans la destination des cultures alimentaires (pas d'agrocarburants, moins d'alimentation animale) permettrait à l'humanité d'augmenter énormément la quantité de calories produites – et de nourrir 4 milliards de personnes en plus. Ils soulignent également que deux cultures, le maïs et le soja, servent essentiellement à alimenter le bétail (74 % du maïs mondial) ou à l'industrie non alimentaire. Or, ces deux plantes représentent aussi la grande majorité des cultures GM dans le monde. Une étude du 2 mai 2013 montre que «L'Argentine a perdu sa souveraineté alimentaire. Le modèle d'agro-export basé sur le soja, tel que configuré en Argentine est un modèle de développement socialement et écologiquement non soutenable». Au Kenya, des essais de patate douce OGM résistante à un virus, conduits pendant trois ans, ont échoué. Cette patate douce était sensible à des maladies virales. De plus, une variété conventionnelle (en clair non OGM) donnait un meilleur rendement. La patate douce OGM résultait d'un projet qui avait duré neuf ans, couté 6 millions de dollars financé par Monsanto, la banque mondiale (toujours prête à aider ... Monsanto), et le gouvernement américain. Un gène codant pour la protéine d'enveloppe du virus était censé apporter la résistance à ce virus. Cependant, les maladies virales ne sont pas le principal ravageur de cette plante, mais plutôt des insectes. Cet exemple a couté cher, pris du temps (non utilisé à d'autres méthodes), et était censé prouver l'efficacité des OGM pour le Sud, ... Il montre l'inutilité de cet OGM. Et si on arrêtait de financer ces recherches au profit de recherches qui visent vraiment à l'autonomie des paysans du Sud ? Les enjeux environnementaux Un premier aspect des enjeux environnementaux des OGM est les contaminations mais aussi les pollutions qu'ils peuvent susciter. Pour les enjeux environnementaux, on retiendra essentiellement les nuisances pour l'environnement et non celles pour les paysans (traités dans les enjeux agricoles), ni les nuisances économiques (pertes de marché, perte de valeur de terres agricoles où des repousses d'OGM sont susceptibles d'arriver, ...). L'un des nombreux enjeux environnementaux des OGM est dans la dissémination de gènes de résistance aux herbicides. Cela s'est déjà passé au Canada. Un agriculteur avait utilisé dès 1995 des colzas résistants à trois herbicides différents. La première année, il a eu des "mauvaises herbes" résistantes à un herbicide. La seconde année, des "mauvaises herbes" résistantes à deux herbicides. La troisième année, il avait des "mauvaises herbes" résistantes à trois herbicides... C'est cela qu'on appelle la fabrication de super "mauvaises herbes". Cela a deux conséquences possibles. Bien sûr ces deux solutions ne s'excluent pas et sont toutes les deux néfastes. - La première serait de faire que l'on soit forcés de ne plus utiliser des herbicides comme le roundup qui est certes toxique, mais qui est tout de même nettement moins polluant que l'atrazine. On peut espérer que cela forcerait les thuriféraires de l'agriculture industrielle à faire machine arrière, mais l'expérience montre que quand ces gens sont dans une mauvaise passe, ils ont plutôt tendance à y persister. - La seconde possibilité serait de faire qu'on utilise des herbicides plus polluants. On a même prouvé que le blé se croise avec de l'Egilope cylindrique. Pourtant, l'Egilope a 28 chromosomes et le blé 42 ... ! Ce qui prouve que des croisements peuvent se faire même pour des espèces non seulement différentes, mais n'ayant même pas le même nombre de chromosomes. Pourquoi y a-t-il problème ? Les promoteurs des OGM (tant les industriels que la recherche publique) assènent souvent des "arguments" trop simples qui font penser qu'il ne peut y avoir le moindre problème. Voilà ces arguments : «En mangeant des carottes ou des laitues, on ne court pas le risque d'introduire dans son génome des gènes de carottes ou de laitue» ; «L'humain (et les animaux) sont insensibles aux antibiotiques. Donc l'éventualité du transfert du gène de résistance à l'antibiotique à l'homme ne changerait rien». Comme souvent, il faut se méfier des arguments amusants (comme le coup de la salade) car il sont souvent creux. Voilà ce que l'on peut répondre (une fois que tout le monde a ri !) : Bien sûr, manger une salade n'a jamais transformé en salade ! Et personne n'a affirmé que manger un OGM nous transformerait en OGM (sauf peut-être en légume... :). Mais, au moins quand nous grandissons, nous incorporons des bouts d'ADN (des bases ATGC). Celles-ci ne pouvant venir de l'air, viennent de l'alimentation. Nous utilisons donc, à l'évidence, des bases (ou de plus gros morceaux d'ADN) issues de l'alimentation pour assurer le maintien ou l'accroissement de nos cellules. Les seules questions sérieuses sont alors: (1) quelle est la taille des morceaux d'ADN recyclés ; (2) cette taille permet-elle qu'un gène soit recyclé, intégré ? (3) quand on digère, comment se passe la découpe des morceaux d'ADN de nos aliments ; (4) est-ce que nous, ou les bactéries que nous hébergeons dans nos intestins, pouvons récupérer un gène ; (5) quelles seraient les conséquences d'un transfert de gène ? (6) l'insertion étant aléatoire, ne peut-elle pas modifier le reste des fonctions biologiques contrôlées par le génome ? (effets pléiotropiques) Il est vrai que les animaux sont insensibles aux antibiotiques (ceux-ci ne touchent que des bactéries). Mais nous ne dénonçons pas le risque de résistance des humains aux antibiotiques. Un des risques est que nos bactéries de l'intestin, qui font une grande partie de notre digestion, deviennent résistantes à un antibiotique. Comme les bactéries échangent très facilement des gènes, il n'est pas exclu qu'une bactérie indésirable devienne résistante à un antibiotique, ou récupère un autre gène... Ajoutons que l'on a montré que des pommes de terre génétiquement modifiées avec un gène dérivé de pathogène humain pouvaient induire une réponse immunitaire. Cela prouve bien qu'un gène introduit dans une pomme de terre, même s'il n'exprime pas une protéine toxique, engendre une réponse ; bref, il est reconnu par le système immunitaire. Il est donc indiscutable que si un aliment transgénique peut avoir un effet positif (selon ses promoteurs), pourquoi ne pourrait-il pas être négatif, fût-ce pour un autre OGM ? Maintenant que nous sommes convaincus que les choses sont plus complexes que ce qu'en disent les promoteurs des OGM, nous pouvons avancer. Il nous faut donc distinguer deux types de risques. les risques liés au transfert d'un gène: - vers une bactérie (du sol ou une bactérie de notre intestin) ; - vers une autre plante (même espèce ou espèce différente) ; - vers un animal (incluant l'humain). les risques liés à l'insertion, aléatoire, d'un gène qui en modifierait d'autres, ou assurerait la synthèse d'une protéine non conforme à ce qui était désiré. Un gène peut-il être transféré ? Avant de répondre, il faut bien distinguer les transferts entre bactéries de ceux où interviennent d'autres organismes (plantes, animaux). 1) Transferts entre bactéries: Les transferts de gène entre bactéries (dits horizontaux pour les distinguer des transferts verticaux de la reproduction) prennent place de trois façons différentes : transformation ; conjugation ; transduction. Les transferts de gènes entre bactéries sont chose courante, alors qu'ils sont exceptionnels (mais pas inenvisageables) avec des animaux ou des plantes. Les risques alimentaires des plantes transgéniques sont alors multiples : transfert vers des bactéries intestinales ; transfert vers un animal (dont l'humain) ; pollution alimentaire (allergie, produits dérivés, exposition aux insecticides des OGM, ...) ; ceux encore non envisagés ... et bien sûr non étudiés comme la surexposition à sous-produit de dégradation d'un herbicide ... 2) Qu'en est-il finalement de la possibilité de transfert ?: L'alimentation nous fournit les bases nécessaires pour faire de nouvelles cellules. Comme nos aliments (non cuits, ...) contiennent des ADN entiers, notre digestion consiste à décomposer l'ADN, de son état de très très longue molécule vers des toutes petites. Il y a donc forcément, un stade de la digestion où il y a des morceaux qui peuvent être des gènes et que ces morceaux, soient intégrés à une cellule, qu'elle soit bactérienne ou animale (dont les humains). Cela prouve qu'il existe un risque de transfert de gène et que ce risque était totalement négligé lors de la mise au point des OGM. On retiendra deux expériences scientifiques. Dans la première, la taille de l'ADN en fin de digestion (dans les fèces= selles) d'une souris atteignaient la taille d'un gène. Donc dire que la digestion dégrade tout est clairement faux ! Dans la deuxième expérience, le scientifique a nourri une mère souris avec des plasmides contenant des morceaux d'ADN étranger. Ce scientifique a retrouvé des morceaux de cet ADN étranger jusque dans les noyaux de plusieurs organes des petits de la souris ! Ce même scientifique, plus récemment, a reproduit l'expérience avec des aliments OGM autres que des plasmides et d'autre articles mentionnent de tels aspects avec des changements dans les noyaux des cellules du foie. L'équipe de Manuela Malatesta a également montré que le retour à une alimentaiton normale supprimait les effets constatés. 3) Ces transferts ont-ils plus de chance avec un OGM qu'avec un aliment normal ?: On sait que les gènes insérés, en agronomie, sont moins stables que des gènes de plantes mutantes et qu'ils sont moins stables que les gènes naturels. On sait aussi que le génome des organismes peut reconnaître qu'un gène n'est pas "naturel" (méthylé, avec des codons non spécifiques, ...). L'organisme peut alors désactiver ce gène et cela arrive chaque jour. Si nous prenons un coup de soleil, certaines de nos cellules mutent et ne sont plus conformes. Les gènes gardiens du génome les reconnaissent, tentent de les réparer, et, s'ils n'y arrivent pas, ils forcent la cellule à se "suicider". La désactivation d'un gène s'est même vue aussi en conditions agronomiques. Cependant, les conditions alimentaires ne sont pas les conditions agronomiques et l'on ne peut pas transposer simplement ce qui se passe dans l'environnement à ce qui se passe dans nos estomacs. Le surcroît d'instabilité d'un gène d'OGM dans l'alimentaire n'a jamais été quantifié ... tout simplement parce que l'instabilité n'est déjà pas très étudiée. Cependant, on aura compris que s'il y a un ordre dans les priorités (et il y en a toujours), lutter contre l'abus (et même l'usage !) des antibiotiques dans l'alimentation animale passe avant le fait de lutter contre l'usage des gènes de résistance aux antibiotiques dans les OGM. Cela ne justifie bien sûr pas ces OGM ni ces gènes de résistance qui ne sont pas nécessaires, mais ne font que réduire les coûts de production des industriels. Bref historique de la transgénèse En 1972, une équipe américaine dirigée par Paul Berg (Stanford) crée une molécule d'ADN hybride à partir de l'ADN du singe et de celui d'une bactérie. Il s'agit de la première manipulation génétique. En 1973, Stanley Cohen et Herbert Boyer utilisent les techniques de recombinaison de l'ADN pour créer ce qu'ils appeleront une chimère génétique. Comme cette appellation est moins vendeuse que OGM, elle a été abandonnée par les scientifiques. En 1974, à Asilomar, les scientifiques cosignent un moratoire décidant l'arrêt de tout transfert de gènes. A l'époque, les spécialistes étaient en très petit nombre, ce qui a facilité les discussions. Ce serait impensable aujourd'hui que les biologistes moléculaires forment une communauté très nombreuse. En 1975, une conférence organisée à Asilomar, près de San Francisco, autorise la reprise des expériences, assorties de plusieurs précautions. A partir des années 80, les expériences se multiplient en laboratoire. Les premiers organismes transgéniques : La première bactérie modifiée génétiquement date de 1973. Notons que les bactéries échangent couramment des gènes. Mais ce procédé, naturel, ne correspond pas à une manipulation génétique où l'intention de l'humain entre en jeu. La première plante transgénique, un tabac résistant à un herbicide, fut créée en 1983. En 1986, le premier essai en champ était pour un tabac résistant à un herbicide. Il a eu lieu en même temps aux EUA et en France (SEITA). En 1994, la tomate MacGregor, dite Flavr Savr (Flavour Savour) apparaît sur le marché américain, vendue 2 à 3 fois plus cher. En fait, elle est infecte, avec un goût d'acier qui n'est pas du à la variété, mais probablement à l'activation d'un autre gène. On ne sait pas encore. En 1994, c'est également le premier OGM commercialisé en Europe pour la production de semences, un tabac résistant à un herbicide.