Depuis plusieurs mois, les autorités françaises et belges s'inquiètent de l'exode de plusieurs milliers de jeunes en Syrie, aux côtés d'organisations affiliées à Al-Qaida. | Le phénomène est « particulièrement préoccupant », insistent les ministres de l'intérieur français et belge réunis, jeudi 5 décembre à Bruxelles, pour tenter de trouver des solutions face à l'exode de milliers de jeunes Européens partis combattre en Syrie dans les rangs d'organisations proches d'Al-Qaida. Ils seraient désormais entre 1 500 et 2 000 à avoir gagné le pays contre 600 en juin, selon les estimations citées par Manuel Valls et Joëlle Milquet. « Les Belges sont entre 100 et 150, avec des mouvements », a précisé Mme Milquet. « Un peu plus de 400 Français sont concernés, dont 184 sont actuellement en Syrie », a pour sa part indiqué M. Valls, précisant que « 14 Français sont morts en Syrie, 80 sont revenus et une centaine veulent partir ». « NOS RESSORTISSANTS DEVIENNENT DANGEREUX » « Lorsque le conflit a éclaté en Syrie, il était difficile d'agir car il s'agissait d'aller combattre un régime condamné par tous, ce qui rendait les incriminations difficiles », a rappelé Manuel Valls. Aujourd'hui, la situation a changé, souligne-t-il : « La plupart des individus ont fait état de leur volonté de combattre dans les organisations proches d'Al-Qaida. » Mais « il n'y a pas de retours massifs » de ces combattants étrangers, a nuancé Joëlle Milquet. « Aujourd'hui nous ne constatons pas de menace directe ou avérée contre nos pays, nos intérêts ou nos ressortissants », a pour sa part reconnu Manuel Valls. « Nous ne devons pas pour autant baisser les bras, car les groupes djihadistes se sont renforcés, et nos ressortissants deviennent dangereux », a-t-il toutefois averti. COORDINATION DES PAYS EUROPÉENS La France et la Belgique coordonnent les actions des pays européens les plus concernés par ce problème. Trois réunions ministérielles ont été organisées avec leurs homologues britannique, allemand, néerlandais, espagnol, italien, suédois, et danois. La dernière s'est tenue à Bruxelles mercredi soir, avant un conseil des ministres de l'intérieur de l'Union européenne et a accueilli le ministre de l'intérieur américain, Rand Beers, et des représentants du Canada et de l'Australie, ont précisé les deux ministres. En juin déjà, M. Valls avait dressé un portrait robot de ses combattants, lors d'une réunion de crise avec ses homologues européens : « Il s'agit d'hommes plutôt jeunes, d'origine très modeste, et pour la plupart convertis à un islam radical. Ils ont un passé de délinquance, ont été impliqués dans le trafic de drogue et parfois dans des actes de grand banditisme. » L'Union européenne cherche à combattre le recrutement, notamment sur Internet, et veut démanteler les filières qui acheminent les recrues. « Nous devons neutraliser le cyberespace et, sur ce point, les Américains posent un problème à cause de leur premier amendement qui défend la liberté d'expression », a souligné Manuel Valls. Les Européens doivent pour leur part se mobiliser contre les filières qui acheminent les recrues depuis l'Europe par les pays des Balkans, la Turquie, le Maroc. Une filière a ainsi été démantelée au Maroc, qui acheminait une dizaine d'individus par semaine en Syrie, a raconté M. Valls.