La journaliste et écrivaine Kenza Sefrioui et le psychanalyste Jalil Bennani ont été les grands gagnants, jeudi soir à Rabat, du Prix Grand Atlas 2013, respectivement dans les catégories «Essais francophones» et «Prix culturethèque», attribué par le grand public. Kenza Sefrioui a été récompensée pour son essai intitulé «La revue Souffles (1966-1973): Espoirs de révolution culturelle au Maroc», et Jalil Bennani pour son livre «Un psy dans la cité», tandis que «L'Islam au quotidien», écrit par Mohammed El Ayadi, Hassan Rachik et Mohamed Tozy et traduit par Abdelaziz Loudiy, Mahfoud Souaidi et Mohamed Wasif, a été primé dans la catégorie «Traductions en arabe». Présidé par l'islamologue et anthropologue franco-algérien Malek Chebel, le jury du Prix Grand Atlas, créé par l'ambassade de France et qui souffle cette année sa 20ème bougie, comprenait des spécialistes marocains et français du monde de la sociologie et de l'édition, à savoir les sociologues Baudouin Dupret et Hind Taarji, les éditeurs Simon-Pierre Hamelin et Colette Olive, en plus de Zohra Ousaadi, responsable de la médiathèque de l'Institut français d'Agadir. Au total, neuf ouvrages (cinq essais francophones et quatre ouvrages traduits) étaient en lice pour ce prestigieux Prix organisé cette année pour la première fois en partenariat avec la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (BNRM). «J'ai choisi de travailler sur la revue Souffles parce qu'elle représente à mes yeux un bol d'air, un concentré d'intelligence, un vent de liberté par lequel je me suis laissée emporter pendant dix ans», a confié à la MAP Mme Sefrioui, en marge de la cérémonie de remise des Prix qui s'est déroulée au siège de la BNRM en présence de l'ambassadeur de France au Maroc, Charles Fries. «Je suis heureuse d'avoir réussi à passer ce message quant à l'importance de revenir au discours de gens qui étaient fondamentalement libres et qui rêvaient de démocratie et de justice sociale pour leur pays» a-t-elle dit, appelant à ancrer ces valeurs dans la continuité et établir des passerelles entre les anciennes et jeunes générations qui portent les mêmes idéaux. Concernant son ouvrage primé, Jalil Bennani a expliqué à la MAP qu'il s'agit d'»un livre sous forme d'entretien, convivial, ouvert et accessible au public, qui traite des questions que se posent les gens sur la société contemporaine, notamment celles relatives à la jeunesse, l'amour, la sexualité et l'enseignement, en relation, bien entendu, avec la thérapie et la psychanalyse». Sur la place de la psychanalyse dans la société marocaine, le spécialiste estime que celle-ci «reste encore marginale, minoritaire» mais qu'elle «a droit de cité» au Maroc où le contexte général s'avère être, plus que jamais, propice à l'essor de cette discipline, grâce aux avancées démocratiques et à la liberté d'expression qui gagne du terrain. «Il y a encore évidemment des résistances et des préjugés par rapport à la psychanalyse», a admis M. Bennani, ajoutant que, pour qu'elle ait pleinement sa place dans la société, la psychanalyse «ne doit pas être simplement importée, mais doit interroger la culture et la langue locales et créer une ouverture vers d'autres champs qui sont d'ailleurs les thèmes de mon livre». Dans une allocution de circonstance, M. Fries a indiqué que les organisateurs ont choisi cette année de se focaliser sur les essais de sciences humaines qui traitent de thèmes aussi divers que l'égalité, la diversité culturelle, l'altérité, l'économie et l'entreprise, l'histoire des idées, l'histoire collective et les vécus individuels, l'ultime objectif étant d'»interroger les possibilités de vivre-ensemble dans la cité». La grande nouveauté de cette 20ème édition, a-t-il fait savoir, est l'attribution du Prix Culturethèque, pour lequel le grand public a voté en ligne à partir des extraits des œuvres candidates, disponibles sur la plateforme numérique des médiathèques de l'Institut français du Maroc. D'après Malek Chebel, les critères de sélection des œuvres gagnantes «sont tout à fait professionnels, car fondés de prime abord sur la qualité des œuvres en question», lesquelles montrent «qu'il y a une cohérence d'ensemble, une portée et un sens dans la production littéraire marocaine contemporaine». Les œuvres candidates sont le reflet de la production marocaine depuis un an et demi sur le plan sociétal, des idées, de la philosophie et de la création sémantique, a-t-il noté, ajoutant qu'»en primant ces livres, nous primons la relève de la réflexion au Maroc, la jeunesse et la transmission du savoir». Inscrit dans la politique de coopération de l'ambassade de France au Maroc en faveur de l'écrit et du livre et grand rendez-vous de la saison culturelle France-Maroc de l'Institut français du Maroc, le Prix Grand Atlas a été inauguré par une conférence animée par le président de son jury, Malek Chebel, sous le signe «Eloge de la diversité». Créé par l'Ambassade de France pour valoriser la création littéraire et éditoriale francophone au Maroc, le Prix Grand Atlas rend hommage depuis deux décennies à des auteurs et des traducteurs de livres francophones. Pour fêter sa 20ème édition, il est organisé pour la première fois en partenariat avec la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (BNRM), lieu par excellence de culture, d'échanges intellectuels et de transmission des savoirs. Le Prix Grand Atlas 2012 a été décerné à l'écrivain Mohamed El Ouardi pour son roman «Village maudit» dans la catégorie fiction francophone et à Mohamed El Ammari pour sa traduction du roman «La vie est ailleurs» de Milan Kundera.