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Regard sur l'illégitimité des actions de l'Exécutif ou simplement le défaut de loi organique du gouvernement
Publié dans L'opinion le 03 - 07 - 2013

La crise actuelle du gouvernement au Maroc, qu'elle soit politique ou constitutionnelle, exprime un état de conflit que tout un chacun analyse et explique selon son libre cours ; et les solutions ne semblent pas germer dans la mesure où les protagonistes se heurtent à l'inexistence de référentiel pouvant trancher la discorde, et font erronément appel à leurs réciproques rapports de force.
Cela peut paraitre farfelu ou prétentieux de la part de cet article qui invoque le fait qu'à défaut d'un référentiel mutuellement admis, la dissolution d'un conflit est renvoyée aux rapports de force en cas de désaccord ou à d'autres pratiques primaires.
Or, il se trouve que le seul référentiel dont disposent les protagonistes se limite à une banale «Charte de la Majorité» qui n'épouse ni le cadre d'un contrat pure et dur, ni la force d'un référentiel juridique ou réglementaire. Etant observé que la charte de la majorité n'ayant pu servir de plate-forme de négociations, il est légitime de s'interroger sur la nature de l'outil faisant défaut, dont l'existence purgerait aisément le problème.
Autrement, quelle est la pièce du puzzle dont l'existence ou la présence serait de nature à trancher la discorde ou servir à établir la supériorité ou l'infériorité des rapports de négociation, voire servir de référentiel à l'arbitrage d'un Juge, par exemple le Conseil Constitutionnel ?
Un retour éclair à la Constitution, croisé à la chronologie des actions du Gouvernement depuis son investiture, est fort instructif à plusieurs égards en adoptant non point la démarche réussie des sauts d'obstacles, mais plutôt «la chute des haies formant obstacles», ou plus clairement «affronter» les obstacles.
De façon plus explicite mais succincte :
- l'article 1er de la Constitution invoque le principe de «séparation des pouvoirs», c'est-à-dire tout simplement gouverner ensemble ; et celui de la «bonne gouvernance» c'est-à-dire respecter toutes les normes ;
- l'article 6 de la Constitution précise que la loi est l'expression suprême de la Nation. C'est-à-dire tout le monde est tenu de «... s'y soumettre». Ce même article stipule que « Sont affirmés les principes de constitutionnalité, de hiérarchie et d'obligation de publications des normes juridiques».
- Par ailleurs, le Dahir n°1-11-91 du 29 juillet 2011 (27 chaabane 1432) portant promulgation du texte de la Constitution (B.O. n°5964-bis, 20-7-2011), cite : «Est promulgué et sera publié au Bulletin officiel, à la suite du présent dahir, le texte de la Constitution, tel qu'adopté par voie de référendum le vendredi 28 rejeb 1432 (1er juillet 2011)» fin de citation.
En dehors de tout justificatif malicieux, nul ne peut contester ou occulter l'ordre - instruction clairement adressé par Sa Majesté - à qui de droit- portant exécution et publication du texte de la Constitution dans la mesure où cette Constitution exprime et traduit la volonté du peuple et la volonté Suprême.
En parallèle, le sujet étant trop délicat pour ne pas rappeler un certain nombre de règles et de principes prérequis, préalables à l'échafaudage d'un diagnostic de sondage de la validité et la légitimité en Droit. Pour ce faire, il est édicté ci-après quelques fondements, parmi d'autres fondements du Droit, de nature à éclairer la réflexion ; notamment :
1- La hiérarchie des normes en droit représentée sous la forme d'une pyramide au sommet de laquelle se trouve la Constitution, ne prend tout son sens que si son respect est contrôlé par un juge.
2- Le strict respect de la Constitution et de la loi, notamment la constitutionnalité et la légalité de la nomination des membres du Gouvernement, une des conditions de la bonne gouvernance (article 1er de la Constitution de juillet 2011) dont doivent bénéficier tous les citoyens étant de l'intérêt de chaque citoyen et du pays, chaque citoyen y a un indéniable intérêt. Ce strict respect est d'autant plus impérieux lorsqu'il s'agit d'une première investiture qui vient de prendre le Pouvoir; Gouvernement qu'on ne doit donc pas laisser violer la Constitution et la loi dès ses premiers actes, même si cette violation n'est pas intentionnelle comme on peut le présumer.
3- Un «acte de gouvernement » ne peut être supérieur à la Constitution et en légitimer, «constitutionnaliser», ou légaliser la violation.
4- «forma dat esse rei»: la constitutionnalité et la légalité des conditions de forme étant nécessaires et préalables aux conditions de fond, il est de la plus haute importance que les conditions de forme soient strictement respectées.
5- «Malitiis non est indulgendum» : il ne faut montrer aucune indulgence envers ceux qui sont de mauvaise foi !
6- En vertu du principe de légalité, chaque norme juridique doit se conformer à l'ensemble des règles en vigueur ayant une force supérieure dans la hiérarchie des normes, ou du moins être compatible avec ces normes. La méconnaissance de ce principe constitue gravement une source de désordres juridiques.
Ces rappels étant édictés dans la chronologie des faits, Mr Benkirane, au prorata des résultats des élections fut - par Sa Majesté le Roi Chef Suprême de l'Etat - nommé Chef du Gouvernement du Royaume par Dahir n°1-11-183 du 29 novembre 2011 (B.O. n° 6000 du 1er /12/2011); le Chef du Gouvernement, ainsi nommé au titre des dispositions de l'article n°47 de la Constitution, proposa la composition de son Gouvernement ; composition par ailleurs définie dans le texte du dahir n°1.12.02 du 03 janvier 2012 (B.O. n°6009-bis du 04 janvier 2012).
Une fois Serment prêté, le Chef du Gouvernement et son équipe constituée essentiellement en vertu des articles n° 42, 47 et 87 sont au Pouvoir.
A ce stade de l'évolution des évènements, le respect de la Constitution parait acquis ; cependant un retour attentif aux trois articles ci-dessus permet de constater que la mise en œuvre des articles 42 et 47 étant apurée, mais l'article 87 n'a fait l'objet que de mise en œuvre partielle gravisime (voir encarté).
En effet, et comme il est aisé de le constater, l'exécution et la mise en œuvre des dispositions du 2ème et du 3ème alinéa de l'article 87 n'ont pas encore vu le jour ; et ce malgré les 68 Conseils du gouvernement tenus entre le 5 janvier 2012 et le 6 juin 2013.
Composition du Gouvernement et organisation
Article 87 de la constitution de juillet 2011 ; bulletin officiel n°5964-bis du 30 juillet 2011.
Le gouvernement se compose du Chef du Gouvernement et des Ministres, et peut comprendre aussi des secrétaires d'Etat.
Une loi organique définit, notamment, les règles relatives à l'organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membre.
Elle détermine également les cas d'incompatibilité avec la fonction gouvernementale, les règles relatives à la limitation du cumul des fonctions, ainsi que celles régissant l'expédition des affaires courantes par le gouvernement dont il a été mis fin aux fonctions.
Or, la légitimité de la nomination du Chef du Gouvernement et de ses ministres découle de la force légitime des dispositions de la constitution, représentant et traduisant la volonté du peuple marocain et du Roi.
La constitution, ni Dame Justice, n'étant ni sourdes, ni non plus muettes, et moins encore aveugles ; l'exigence d'une telle loi organique au niveau de l'article 87 est à ces multiples égards intelligente et logique, voire obligatoire; en l'occurrence par la volonté et la diligence d'instaurer les conditions crédibilisant et légitimant les décisions de l'action gouvernementale définies hiérarchiquement à l'article 49, 87 et 92.
Si le temps du présent avec sa connotation impérative utilisé dans la formulation du 2ème et 3ème alinéas de l'article 87 demeure clairement injonctif ; sa mise en œuvre et sa concrétisation restent victimes des handicaps culturel et opérationnel à la tête du Gouvernement et de ceux de ses ailerons de garde.
En effet, la dite Loi organique n'ayant pas encore vu le jour et risquerait de ne jamais l'être !
Mais, là où «le bât blesse», c'est que l'appréciation et la jouissance des forces des dispositions de la constitution de juillet 2011 pour disposer des pouvoirs de l'Etat au Maroc, exige, réclame et impose également l'appréciation de l'ensemble des dispositions de cette formidable démocratique Constitution ; ainsi que le respect des procédures juridiques, mais aussi le respect de la volonté de concrétisation de la transition démocratique.
Or depuis l'investiture, il parait que certains aspects des plus importants de la constitution sont occultés, transgressés (déplaisent ou n'arrangent guère l'actuel Chef de Gouvernement) ; de sorte à se permettre, avec la bénédiction, l'ignorance ou le machiavélisme, de transgresser le reste de ses dispositions, voire les instrumentaliser.
Or chose connue, le Gouvernement de M. Benkirane s'est attelé à l'approbation d'une seule principale loi organique, à savoir la nomination aux fonctions supérieures au niveau de l'appareil administratif pour en dominer les décideurs et leurs attributions à des fins purement politiciennes.
Cette dernière loi organique ayant été promulguée en dehors d'un cadre organique du Gouvernement, transgresse ainsi par voie de fait l'ensemble des règles en vigueur ayant force supérieure dans la hiérarchie des normes ; engendrant ainsi de graves désordres juridiques ; et par voie de fait ceux constitutionnels et /ou politique cités à l'introduction de cette réflexion, voire ultérieurement des désordres sociaux non souhaités.
Si l'organisation, la conduite des travaux, et la définition du statut du Gouvernement et de ses membres sont soumis et sujets à l'établissement de règles dans le contexte de loi organique exigée ; il n'en demeure pas moins que les décisions prises à l'occasion des attributions et missions découlant des articles 92 et 49 restent et ouvrent la voie à tous les abus et à tous les excès et transgressions.
Si la fuite en avant du Chef du Gouvernement et ses prétextes argumentent la non-promulgation de la loi organique du Gouvernement prévue à l'article 87 en raison du caractère préexistant de textes disparates, éclatés et fragmentés régissant l'organisation et la conduite du Gouvernement, cet attitude (évitement, occultisme, politique de l'autruche, ou orgueil injustifié) évoque néanmoins et de manière tangible l'expression tacite d'un déficit de capacité de ce même Gouvernement à dresser un recueil de textes des moins aisées, restant à la portée d'une ordinaire compilation pour en faire une loi organique.
A ce niveau, il importe de rappeler les engagements électoraux de l'actuel Chef de Gouvernement en matière de lutte contre toutes les formes de délinquance de l'Administration en l'occurrence «la légalité, le mérite, la compétence, et l'égalité des chances», ainsi que l'engagement de production et de mise en œuvre de l'arsenal juridique et réglementaire de nature à mettre fin à tous les abus et les excès ; et satisfaire ainsi les instructions d'ordre Royales édictées au dahir portant promulgation de la Constitution ; mais également la volonté, les attentes et la confiance de l'ensemble des marocains.
Récemment et au vu de l'exercice de l'action gouvernementale, à travers 68 Conseils de gouvernement, il semble que les principes invoqués dans sa campagne électorale, aient été dissous, omis ou sciemment occultés caractérisant ainsi au choix, soit de la pure hypocrisie, ou la mauvaise foi politique dans tous les cas de scénarios
Si cela semblerait à se dévoiler, la mission dont a été investi le Gouvernement par le peuple et le Roi demeure amorphe et dépourvue de tout esprit de citoyenneté, et encore moins d'esprit de nationalisme.
Compte tenu et considérant ce qui précède, accéder au statut de Chef de Gouvernement fut-il un vœu pieux, un rêve passager, ou une volonté inébranlable de servir les citoyens comme ils le souhaitent ?
- Un rêve, il est concret !
Un vœu pieux, le vœu est concrétisé mais loin de satisfaire les citoyens, et encore moins la volonté Divine !
- Une volonté inébranlable, cela n'apparait ni dans les actions, ni dans la satisfaction des marocains !
Et pour s'épargner des excuses, ce discours demeure adressé au Chef du Gouvernement, et non à M. Benkirane !


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