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La Direction Générale des Impôts passée au crible A cause des défaillances des procédures, 29,6 MMDH dus à l'Etat n'ont pas été recouvrés
Absence de contrôle de la comptabilité des Recettes et production d'états comptables non fiables
Le Projet SIT tombé à l'eau Le recouvrement des impôts dus à l'Etat que nous présentons, ci-après, en deuxième partie de notre dossier consacré au rapport de la Cour des comptes sur la Direction générale des impôts est essentiel dans le cadre du constat dressé par cette institution, car il met en lumière les blocage et les défaillance d'un système, celui des impôts en l'occurrence, appelé à être réformé pour plus d'efficacité et d'efficience et, aussi, d'équité et de justice se traduisant par l'allégement de la pression fiscale sur les contribuables et la contribution de tous les assujettis au paiement de l'impôt. Ci après la deuxième partie de notre dossier. Le recouvrement des impôts de l'Etat (IS, TVA et IR) est pris en charge par la Direction Générale des Impôts depuis 2004. Il était auparavant assuré par les services de la Trésorerie générale du Royaume (TGR). La Cour des comptes a examiné la fonction recouvrement par les recettes de l'administration fiscale (RAF) rattachées aux directions régionales des impôts du grand Casablanca et de Rabat, et a relevé les observations suivantes : La Cour des comptes a constaté des insuffisances en matière d'étude, de concertation et de coordination préalable entre les services de la DGI et de la trésorerie générale du Royaume, avant la prise en charge du métier du recouvrement. De plus, la DGI n'a pas mis en place les moyens humains et matériels nécessaires. La création des RAF n'a pas été précédée d'étude des besoins de la population fiscale à prendre en charge. Ainsi, une RAF peut être chargée des activités réalisées par plusieurs perceptions. Il s'en suit un volume important du travail impactant la qualité de service au niveau de la réception et du traitement des contribuables. Malgré le fait que les receveurs soient des comptables publics ayant la responsabilité de recouvrer les impôts et taxes et rendre compte de leur gestion, ils ne sont pas autonomes par rapport aux ordonnateurs de recettes et restent hiérarchiquement rattachés aux chefs des services d'assiette. Les RAF fonctionnent comme les anciens bureaux d'enregistrement et timbre et jouent quasiment un rôle de régisseurs rattachés aux services de l'ordonnateur. De nombreux receveurs de l'administration fiscale ne sont pas suffisamment sensibilisés aux obligations et à la responsabilité encourue au titre de l'exercice de la fonction de comptable public. Ainsi, est il noté que de nombreux receveurs ne produisent pas leurs comptes de gestion à la Cour des comptes. 8 milliards de DH traités manuellement et les agents des impôts remplacent ceux du Trésor À titre d'illustration, au niveau de la RAF Laos de Rabat, le montant des rôles manuels pris en charge pour la période 2005 à 2011 a atteint 8 milliards de DH contre 2 milliards de DH par voie de rôles automatiques. A la RAF Casablanca Rachidi, elles ont atteint plus de 15 milliards DH contre 7 milliards DH par voie de rôles automatiques. Ces émissions manuelles qui sont saisies par les RAF pour prise en charge, peuvent retarder la procédure du recouvrement et engendrer des contentieux. En l'absence de ressources dédiées, des agents des RAF exercent la fonction d'agent d'exécution et de notification du Trésor (ANET) sans être dûment commissionnés; d'où le risque d'entacher la procédure de notification des dossiers du recouvrement. La Cour des comptes a constaté l'absence d'un système d'information qui régit les processus métiers du recouvrement. L'application utilisée ne prend pas en charge des fonctions importantes, notamment les procédures de recouvrement amiable et forcé ainsi que les dégrèvements, annulations, remboursements TVA et restitutions de l'IS. Anomalies présentées par l'application SIA et problème d'interfaçage L'application SIA de gestion du recouvrement présente certaines anomalies parmi lesquelles : - Incapacité d'arrêter le montant exact des restes à recouvrer : l'application ne permet pas d'obtenir le solde exact en temps réel des RAR. - Edition de situations des restes à recouvrer incomplètes et erronées. Cela implique notamment que l'administration pourrait attester de la régularité de la situation fiscale des contribuables qui ont des RAR. La mise en place du système intégré de taxation «SIT» (déployé au niveau de trois RAF de Casablanca) n'a pas abouti à la correction des anomalies du SIA et à l'amélioration du processus de recouvrement au sein des RAF. De plus, l'utilisation du SIT a engendré des difficultés de réalisation des opérations de recettes et dépenses et de tenue de la comptabilité. Les anomalies d'interfaçage SIT-SIA ont un impact négatif sur la gestion des RAF. À titre d'illustration, la comptabilisation des opérations non interfacées dans les délais (télépaiements, titres de recettes, etc.) après le versement de la comptabilité au comptable de rattachement, engendre une discordance entre la comptabilité déjà versée et la situation générée suite à la constatation de ces opérations après versement. Un autre cas d'illustration concerne les recettes à classer, apurées au niveau du SIT, qui ne figurent pas dans la comptabilité des RAF et ne sont pas, par conséquent, versées à la TGR (à juin 2011, le montant au niveau de la RAF Casablanca Rachidi a atteint plus de 1,7 milliard DH). Les RAF consacrent peu de temps au recouvrement des recettes sur rôle ou des restes à recouvrer. L'essentiel de leur activité est focalisé sur le recouvrement spontané et les opérations y afférentes. La Cour des comptes a pu relever les principales observations suivantes : Accumulation des restes à recouvrer Les RAF ayant pris en charge le recouvrement des impôts de l'Etat depuis 2004, ont accumulé depuis cette date des restes à recouvrer qui s'élèvent à 29,6 milliards DH. L'ampleur du montant des restes à recouvrer s'explique par de nombreux facteurs mais de façon particulière par la défaillance du recouvrement amiable et forcé. L'insuffisance des efforts de recouvrement a également induit la prescription de certaines créances publiques. Le montant des RAR prescrits au niveau des RAF de la DRI de Rabat a ainsi atteint près de 1,6 milliard DH. Le suivi du recouvrement se fait sur la base de fichiers demandés au service informatique communiqués au RAF sous format Excel. L'application informatique de gestion du recouvrement ne permet pas d'assurer ce suivi. Par conséquent, le receveur qui encourt une responsabilité personnelle et pécuniaire, n'a pas la main sur les restes à recouvrer de son poste. De plus, le suivi tient peu compte de la prescription. Le calcul des frais des actes engagés pour le recouvrement forcé prévus par l'article 91 du code de recouvrement se fait manuellement pour des milliers d'articles constituant les RAR. Ces frais ne sont pas pris en charge par l'application recouvrement, d'où le risque qu'ils ne soient pas recouvrés. De plus, il a été constaté que la DGI conclut des accords de recouvrement avec certains contribuables sans prendre en compte les frais des actes engagés par les receveurs pour le recouvrement forcé. Parmi les principaux objectifs de rattachement du recouvrement aux services d'assiette, figure celui d'optimiser les conditions du recouvrement en assurant une information fiable aux comptables par les agents de l'assiette. Or, la Cour des comptes a constaté que cet objectif est loin d'être atteint dans la mesure où les services d'assiette ne sont pas suffisamment sensibilisés à la mission du recouvrement qui leur est assignée. A titre d'illustration, au niveau des RAF RabatLaos, Tchad I et Salé, le taux du retour des avis sans frais envoyés aux contribuables atteint plus de 80 % au motif de l'adresse incomplète ou erronée. Cette situation parait paradoxale du fait que l'information est souvent disponible et mise à jour au niveau des bases de données des services d'assiette. De même, dans certains cas, des RAF émettent plusieurs avis à tiers détenteurs (ATD) pour un même contribuable et les envoient à plusieurs banques pour manque du numéro du compte bancaire alors que celui-ci existe dans la base de données assiette (ou bien dans les dossiers physiques). Un manque de coordination est également noté au niveau de la conclusion des accords transactionnels par les services d'assiette avec des contribuables lorsque le recouvrement atteint le stade du recouvrement forcé. Cette étape se fait le plus souvent sans concertation avec le RAF qui devient le seul responsable du recouvrement. Par ailleurs, et en l'absence de connexions informatiques entre les RAF, et d'une plateforme d'échange de données, les receveurs n'ont pas la possibilité de faire opposition à des opérations soumises aux droits d'enregistrement pour les contribuables qui ont des restes à recouvrer auprès d'autres RAF. Cette situation porte souvent préjudice aux intérêts du Trésor. Mise en oeuvre tardive du recouvrement forcé La Cour des comptes a constaté que les opérations d'apurement des restes à recouvrer ne se font pas avec les diligences nécessaires et dans des délais appropriés. Les RAF ont tendance à procéder tardivement au recouvrement forcé ce qui retarde le recouvrement des créances de l'Etat et peut constituer une source de contentieux pouvant porter atteinte aux intérêts du trésor. Il convient de citer à cet égard, la RAF Laos qui n'a entamé les actes de recouvrement forcé que deux années après la date de mise en recouvrement pour la majorité des restes à recouvrer. Le RAF n'a commencé à diligenter les restes à recouvrer pour les côtes mises en recouvrement en 2004 et en 2005 qu'à partir de 2006 et ces diligences ne concernent que 22.043.916,74 DH sur un total de RAR pour ces deux années de 715.105.000 DH soit 3% seulement qui ont été diligentés. Les RAF n'effectuent pas les diligences nécessaires pour l'ensemble des restes à recouvrer. Il est en effet constaté, pour l'échantillon de RAF visités, que les diligences sont faites uniquement pour les restes à recouvrer de plus de 1 million DH et une partie des côtes frappées par la prescription. De plus, pour la majorité des cas, la notification n'aboutit pas ce qui rend les diligences faites inefficaces. De plus, la majorité des actes du recouvrement forcé se limitent au stade du dernier avis sans frais ou au stade du commandement. Les services chargés de la vérification procèdent à la conclusion d'accords de recouvrement avec les contribuables en vue de favoriser les voies de recouvrement amiable et réduire le contentieux. Cependant, ces accords qui sont conclus sans concertation avec les RAF, accordent aux contribuables des remises gracieuses en majorations de retard et pénalités et des différés de paiement, sans toutefois, prendre en compte les restes à recouvrer. A signaler que l'octroi de facilités de paiement aux contribuables sur le recouvrement des nouvelles créances par rapport à d'autres plus anciennes enfreignent les dispositions de l'article 27 du code de recouvrement qui interdit au comptable public d'imputer les paiements partiels des créances à des nouvelles dettes du contribuable. Celui-ci devant imputer ces paiements partiels aux dettes plus anciennes. RAF : Absence d'un contrôle de la comptabilité et production d'états comptables non fiables Les RAF ne contrôlent généralement pas leur comptabilité avant son versement aux comptables de rattachement ce qui risque d'avoir des discordances au niveau du compte 82.04 « règlement avec le comptable supérieur » qui enregistre d'une manière réciproque et corrélative les mouvements de fonds et les règlements intervenant entre le RAF et le comptable de rattachement. Les résultats de l'exécution de la loi de finances de l'année 2010 arrêtés par la trésorerie générale du Royaume font ressortir des écarts importants entre les écritures comptables des RAF et les données statistiques relatives au produit de certains impôts et taxes précédemment communiqués au ministère de l'Economie et des Finances et à la TGR. Ces écarts signalés par le trésorier principal chargé du Centre national des traitements à la DGI, depuis le 11 novembre 2011, ne sont pas encore redressés. L'origine de ces écarts n'a pas été identifiée par la DGI. Toutefois, deux causes principales pourraient expliquer cette situation. la première, est relative aux fausses imputations comptables de certains impôts et taxes fréquemment commises par les RAF lors de l'imputation des paiements résultant des accords transactionnels conclus entre les services de l'assiette et les contribuables. La deuxième, réside dans le retard accusé dans la comptabilisation des télépaiements. Cette situation a un impact sur la qualité des situations budgétaires et comptables devant servir à l'élaboration du projet de loi de règlement ainsi que sur les réalisations et les prévisions fiscales. D'autres anomalies ont un caractère fréquent et un impact sur la fiabilité et la valeur probante des états comptables des RAF, parmi lesquelles les suivantes : - Non régularisation des rejets des balances d'entrée dans les écritures comptables depuis de nombreuses années. C'est notamment le cas de la RAF Roudani où les balances d'entrée de janvier 2006 n'ont pas encore été versées (en 2012) au Trésorier préfectoral de Casablanca. - Les retards engendrés par les défaillances du SIA entravent la bonne gestion des RAF et se répercutent négativement sur la relation avec le comptable de rattachement. En effet, certaines RAF se trouvent dans l'obligation de confectionner manuellement leurs comptes de liaison avec le comptable de rattachement. Les comptes recettes à classer « 80-37 » comportent des soldes importants qui ne sont pas encore apurés (certaines opérations datent de 2004). Par conséquent, les recettes y afférentes ne sont pas définitivement imputées dans les rubriques budgétaires appropriées. La gestion du compte « recettes à classer » connaît de nombreuses anomalies ce qui rend complexe son apurement. Parmi les principales difficultés, il convient de citer les suivantes : - L'inscription de recettes non identifiées au compte RAC : La consignation des recettes fiscales au sein du compte RAC se fait sans prendre en charge l'identifiant fiscal du contribuable, ce qui rend difficile leur imputation définitive. - La comptabilisation de versements relatifs à des RAR dans le compte RAC : Les RAF utilisent le compte RAC pour comptabiliser les montants des émissions établies par les services de vérification et d'assiette et ayant fait l'objet d'accords de recouvrement. Ces versements ne sont pas imputés sur les restes à recouvrer des contribuables soit pour absence de titres d'annulation soit pour non émission de rôle. - Les paiements différés relatifs aux accords transactionnels sont logés dans les RAC : L'apurement de ces versements (qui peuvent être importants) est lié à la prise en charge du montant global des accords et des titres d'annulations relatifs aux remises gracieuses accordées aux contribuables. A titre d'illustration, le montant des RAC non apurées de la RAF Casablanca Al Qods issues des services de vérification (depuis novembre 2011) s'élève à plus de 55 millions DH. La Cour des comptes recommande principalement ce qui suit : - Mettre en place une organisation permettant d'assurer convenablement la mission du recouvrement ; - Renforcer la compétence et l'autonomie des comptables publics qui ont la charge de la fonction recouvrement ; - Se doter d'un système d'information approprié pour la gestion du métier de recouvrement et renforcer la coopération avec la Trésorerie générale du Royaume dans ce domaine ; - Veiller à un suivi approprié et à la mise en oeuvre des diligences nécessaires pour le recouvrement des RAR et éviter les risques de prescription des créances publiques ; - Mettre en place les mesures adéquates pour assurer la fiabilité des états comptables et veiller à l'apurement du compte «Recettes à classer». Contrôle fiscal: Absence d'une stratégie claire Le système fiscal marocain étant, pour les impôts de base, un système déclaratif, le contrôle en est le corollaire fondamental. Il constitue un gage du bon fonctionnement du système dans son ensemble. Le contrôle assure un rôle important non seulement par son aspect dissuasif à travers la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, mais également par son aspect pédagogique en ce sens que c'est un outil important pour rappeler aux contribuables leurs obligations en matière fiscale. La DGI accorde un intérêt croissant au contrôle fiscal. Les missions de vérification sont passées de 841 en 2000 à 1421 en 2011. Les recettes issues de la vérification ont aussi connu une progression significative. Elles sont passées d'une moyenne d'un milliard DH, entre 2000 et 2004, à 4,3 milliards DH en 2011. Néanmoins, l'effectif des vérificateurs, à l'instar de l'effectif global de la DGI, est resté stable avec une moyenne d'environ 350 vérificateurs sur la période 2001- 2010. Suite à divers entretiens avec des responsables de vérification, il a été constaté l'absence d'une stratégie suffisamment claire en matière de contrôle fiscal. L'approche adoptée se focalise essentiellement sur des objectifs de recettes annuelles pour faire face aux exigences de la loi de finances et beaucoup moins sur des aspects importants des missions dévolues en principe à l'administration fiscale comme l'élargissement d'assiette, l'établissement de l'équité fiscale, la promotion de l'investissement et de l'activité économique,... La direction des impôts ne dispose pas d'un système d'information de suivi permettant de retracer l'ensemble du processus de vérification et d'apprécier l'activité de contrôle fiscal en général et des vérificateurs en particulier. De plus, il n'existe pas de procédures formalisées encadrant l'activité des vérificateurs sur les plans de conduite des missions, des aspects déontologiques, de l'organisation des travaux, de documentation des observations, ... Insuffisances dans la programmation des missions du contrôle fiscal La programmation des missions de vérification pose de nombreuses difficultés dans la mesure où elle n'est pas basée sur des outils informatiques adaptés, des bases de données continuellement alimentées et suffisamment riches en informations pertinentes et des méthodes (et outils) de gestion et d'analyse basées sur l'identification, l'évaluation et l'analyse des risques. Par ailleurs, de nombreuses insuffisances caractérisent les recoupements qui en limitent l'efficacité et en réduisent l'utilité autant pour la programmation et le ciblage des missions de vérification que pour les diverses autres activités de contrôle qui en dépendent. Parmi les difficultés, il convient principalement de citer les suivantes : - Les sources d'informations restent limitées et les données reçues par la brigade de recoupement restent insuffisantes, non exhaustives et peu fiables. - La faible mobilisation de ressources externes d'informations via le droit de communication. - La non exploitation d'une grande partie des informations disponibles dans les bases de données de la DGI. - L'insuffisance des outils informatiques utilisés pour le traitement des données et leur manque de fiabilité couplée à des retards dans le traitement de l'information. En plus de la faible formation, motivation et valorisation des ressources humaines exerçant dans le recoupement. En outre, le système d'information (SIA) est loin de satisfaire les besoins d'une programmation rationnelle et d'une façon générale à assurer le contrôle tant sur pièces que sur place. Celui-ci présente en effet des insuffisances structurelles notamment : - Le traitement de l'information par recoupement et rapprochement reste limité du fait de la nature non intégrée du SIA. - Le SIA ne prend pratiquement en charge que les informations nécessaires au calcul de l'impôt et n'offre pas la possibilité d'intégrer des informations importantes contenues dans les liasses fiscales. Même si le système prévoit des champs relatifs à des informations précieuses pour le recoupement, les données ne sont souvent pas saisies ou sont saisies de manière erronée. En l'absence d'outils d'analyse de risques, de critères et d'arguments cohérents permettant d'assurer une couverture optimale et sur une périodicité raisonnable, de la population des contribuables pour leur vérification, le processus de proposition des vérifications reste insuffisant. En effet, l'essentiel des propositions de vérification provient des inspecteurs d'assiette sur la base d'une appréciation individuelle qui peut souvent être subjective. De plus, des insuffisances sont constatées quant à la mise en place de règles générales pour les propositions de missions de vérification. A titre d'exemple, le cumul de plusieurs années consécutives de déficit (IS et IR) ou le maintien d'un solde TVA créditeur ou nul permanent, n'est pas forcément un motif de programmation systématique à la vérification. Les programmes de vérification ainsi que les vérifications enclenchées via un ordre de vérification, ont dans certains cas, tendance à être communiqués tardivement aux DRI (services de vérification). Cela a un impact sur la qualité du travail de vérification ; les redressements pouvant être non fondés ou insuffisamment argumentés et engendrer du contentieux. Une partie importante des missions de vérification programmées n'est pas réalisée (ou abandonnée) et ce aussi bien par les services régionaux de vérification que par les services centraux. Ainsi, à fin 2011, le stock des missions de vérification programmées et non réalisées a été évalué par la direction chargée du contrôle à 1574 dossiers ; ce qui dépasse largement, en volume, le programme d'une année entière de vérification pour l'ensemble de la DGI. Défaillances dans l'organisation des missions et les dossiers de vérification Des insuffisances ont été constatées au niveau de l'organisation des missions de vérification et des dossiers tenus par les vérificateurs, ainsi qu'en matière de suivi et de documentation des missions de vérification clôturées par les services compétents. Parmi celles-ci, l'absence de tableaux de bord pour le suivi des missions de vérification et l'archivage inadéquat des dossiers en cours et même des dossiers clôturés. De plus, la vérification se caractérise souvent par l'absence de dossiers de travail dûment formalisés et documentés. Ainsi, les investigations menées par les vérificateurs ne sont pas consignées ce qui ne permet pas d'évaluer la nature et la portée des diligences effectuées, de même que les actions de contrôle qui n'ont pas abouti et les raisons de leur abandon. En conclusion, le défaut de traçabilité des investigations menées par les vérificateurs constitue un obstacle pour le contrôle et l'évaluation des missions de vérification. Les services de vérification recourent rarement à des sources d'informations autres que celles examinées au sein de l'entreprise. Ainsi, la circularisation des fournisseurs ou des clients des entreprises vérifiées est quasiment inexistante. C'est également le cas pour les entités privées et surtout publiques en mesure de produire à l'administration fiscale des informations utiles pour la vérification (Justice, Intérieur, Equipement, Conservation foncière,...). De même, les vérificateurs s'adressent rarement aux propres services de l'administration fiscale pour disposer d'informations et de recoupements utiles concernant les activités et les opérations des contribuables. C'est le cas notamment de la brigade de recherches et recoupements et des services chargés des droits d'enregistrement et de timbre. Rejet systématique de la comptabilité : une approche discutable Les approches et appréciations faites par les vérificateurs ne sont pas uniformes. Elles varient d'une DRI à une autre, et même au sein d'une même DRI, entre un vérificateur et un autre. De plus, ces approches restent discutables, surtout dans les cas nombreux de rejet de la comptabilité. Ainsi : - Le vérificateur peut procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires et rejeter la comptabilité du contribuable. Pour ce faire, il utilise des données de gestion partielles internes à l'entreprise contrôlée, alors même que la comptabilité de celle-ci est rejetée. - La comptabilité du contribuable n'est souvent pas suffisamment vérifiée pour relever d'éventuelles réintégrations. Les vérificateurs rejettent souvent la comptabilité sans justifier clairement les infractions constatées. - L'approche de rejet de la comptabilité est même parfois systématique notamment lorsque le vérificateur n'arrive pas à trouver des motifs solides de redressement ou lorsqu'il y a risque de prescription. Le rejet de la comptabilité se traduit généralement par un rejet du chiffre d'affaires et par conséquent, par sa rectification sur la base de l'estimation du vérificateur. Cela peut rendre la reconstitution du chiffre d'affaires et les redressements contestables et peu convaincants et les dossiers difficilement défendables en cas de recours du contribuable devant les commissions d'arbitrage ou devant les tribunaux. L'examen d'un échantillon d'accords amiables conclus entre la direction générale des impôts et les contribuables a montré que ces accords ne contiennent pas les détails de l'imposition établie ni les bases de conclusion des accords. Cette situation met en évidence le large pouvoir d'appréciation des services de vérification et les risques afférents à l'adoption de bases imposables insuffisamment détaillées au niveau des accords conclus ainsi que le risque d'iniquité dans le traitement des contribuables. Ainsi, est-il constaté que les taux de marge pour la reconstitution du chiffre d'affaires diffèrent d'un cas à l'autre et que des taux différents de remise des majorations peuvent être appliqués. De plus, des remises sont souvent accordées en l'absence de motivation du taux appliqué. Les services de l'administration fiscale peuvent conclure des accords transactionnels sans que les redressements ne soient notifiés aux contribuables. Dans certains cas, la vérification peut n'être faite qu'en partie et même ne pas être réalisée. Cette situation concerne de manière particulière le secteur de la promotion immobilière, pour lequel la procédure de vérification se limite souvent au seul envoi de l'avis de vérification au contribuable. Cette pratique a pour conséquence d'engendrer une iniquité de traitement entre les contribuables puisqu'aucun élément objectif et mesurable n'est pris en compte pour arrêter le montant de l'accord. La Cour des comptes a constaté que les impositions comportent systématiquement un taux de majoration de 15% et ce, bien que le code général des impôts ait prévu un taux qui peut atteindre 100% en cas de mauvaise foi ou de dissimulation (art 186). L'application systématique du taux de majoration minimum met sur le même pied d'égalité l'ensemble des contribuables et ne permet pas de faire une distinction entre les contribuables de bonne et ceux de mauvaise foi. Cas de la promotion immobilière Eu égard à l'augmentation des marges de la promotion immobilière ainsi que de la pratique de la sous déclaration, la DGI a convenu amiablement en 2008, avec la fédération nationale des promoteurs immobiliers, que les promoteurs procèdent au dépôt de déclarations rectificatives visant à augmenter leurs contributions fiscales et ce sur la base d'un protocole d'accord que le promoteur signe avec l'administration des impôts. Cette situation n'a pas été officiellement formalisée. Cette démarche soulève des observations, notamment sur les aspects suivants : Conclusion d'un accord global avec l'ensemble d'un secteur d'activité ; Conclusion d'accords qui, dans les faits, sont équivalents à un abandon des redressements ; Conclusion d'accords avant même d'entamer la procédure de vérification ou juste après son démarrage; Non dépôt des déclarations rectificatives mentionnées au niveau du protocole d'accord par les promoteurs. Encouragée par les recettes significatives qui ont pu être recouvrées (près de 1,8 milliards DH entre 2008 et 2011), la DGI a continué à adopter la même approche au cours des années suivantes pour les promoteurs qui ne se sont pas manifestés. Cependant, et malgré ses avantages, l'approche adoptée reste focalisée sur le court terme puisqu'elle ne permet pas de lutter efficacement contre la pratique dite «du noir». Bien au contraire, cette situation risque d'encourager la pratique de la sous déclaration dans un secteur qui peut générer des marges significatives. Résultats mitigés du contrôle fiscal La direction générale des impôts a accordé une importance considérable au développement du contrôle fiscal depuis les années 2000. Cela a permis de réaliser des résultats qui peuvent globalement être considérés comme positifs. Toutefois, ces résultats méritent d'être nuancés dans la mesure où : Malgré l'augmentation des recettes fiscales, les défaillances du fonctionnement et de l'organisation du contrôle restent importantes ; Une partie significative des recettes du contrôle fiscal a été réalisée auprès des organismes publics. Ainsi, les redressements de 4 grands établissements publics ont totalisé 6,7 milliards DH, sachant que la moyenne des recettes annuelles pour l'ensemble du contrôle fiscal est de 1 milliard DH entre 2000 et 2004 et 3,3 milliards DH entre 2005 et 2011. La Cour des comptes recommande ce qui suit : Développer une stratégie formalisée pour le contrôle fiscal avec des objectifs clairs et mesurables ; Mettre en place un système d'information de gestion et d'aide à la décision permettant, en particulier, de prendre en charge, analyser, recouper et traiter les données issues des différentes sources d'informations; Mettre en place une programmation adéquate en fonction des risques ainsi que de couvrir l'ensemble du processus de vérification ; Développer et formaliser les procédures et harmoniser les méthodes de vérification, et renforcer le suivi des missions de vérification ; Veiller au renforcement de la communication et de la collecte d'informations au niveau interne et externe. Gestion défaillante du contentieux devant les juridictions administratives L'examen de l'aspect relatif à la gestion du contentieux devant les juridictions administratives a permis de relever ce qui suit : - L'absence de suivi des risques de contentieux Devant la tendance à la judiciarisation des relations entre l'administration fiscale et le contribuable, la DGI n'a pas encore mis en place un mécanisme de suivi des risques capable d'anticiper, de maîtriser et de traiter les situations porteuses de contentieux en amont de l'activité de suivi des affaires devant les juridictions. - La perte fréquente de documents des dossiers contentieux Plusieurs affaires sont perdues devant la justice par défaut de production des documents demandés par les tribunaux. Les cas les plus fréquents concernent les lettres de notification des avis d'imposition aux contribuables. Au niveau de la DRI de Rabat, par exemple, il a été constaté qu'à plusieurs reprises la section des affaires judiciaires n'a pas pu disposer de la documentation nécessaire pour préparer les mémoires en défense et présenter des éléments de preuve décisifs. L'absence des pièces de dossier aurait plusieurs causes. Soit que l'administration ne les aurait pas établies lors de l'imposition (en méconnaissance des règles de procédure), soit qu'elle les aurait établies mais perdues à cause des conditions inadéquates d'archivage (particulièrement pour les dossiers anciens), ou encore, que l'absence des pièces soit imputable au personnel chargé de les conserver. A signaler que malgré sa récurrence, la perte de pièces maîtresses pour certaines affaires en justice n'est suivie d'aucune enquête ou investigation pour en clarifier les circonstances. Cette situation est favorisée par l'absence d'un système qui responsabilise les personnes et assure la traçabilité de l'intégrité des dossiers. - Un déficit de communication inter-services Un déficit de communication a été noté entre le service des affaires judiciaires de la DGI et les sections des affaires judiciaires attachées aux DRI. En effet, la section n'est pas informée du sort et de l'issue des dossiers dont elle assure le suivi en première instance, et qui sont confiés aux services centraux pour le suivi des recours. Cet état de fait empêche un retour d'informations qui serait très instructif, notamment pour pallier les insuffisances relevées par les décisions rendues par les juridictions d'appel et de cassation. En outre, il a été relevé une carence de communication entre les deux entités chargées du suivi des affaires judiciaires et les autres services de l'administration : assiette, contrôle et recouvrement. Ce qui empêche de sensibiliser l'ensemble des services sur les points afférents au contentieux et d'entamer des réflexions conjointes sur les points d'intérêt communs. L'analyse d'un échantillon de décisions de justice rendues par différentes juridictions administratives entre 2007 et 2012 conservés au niveau de la DRI de Rabat et de la DGI fait ressortir quelques principaux chefs d'annulation des impôts par les tribunaux: - Un redressements et régularisations insuffisamment justifiés; - Un vice de procédure, notamment celle relative à la notification; - Le défaut de production, lors du procès, des documents à l'appui des impositions; - La méconnaissance des règles d'exonération ou de prescription; - L'incapacité de prouver le fait générateur de l'impôt, etc. La Cour des comptes recommande de : - Mettre en place une cartographie permettant d'identifier et hiérarchiser les risques de contentieux ; - Développer un système d'information permettant de regrouper, traiter et diffuser l'information ainsi que de prendre en charge les processus métiers relatifs au contentieux ; - Renforcer la fonction contentieux au niveau des DRI, en les dotant des profils et moyens adéquats ; - Renforcer et sécuriser et système d'archivage et de transfert physique des dossiers ; - Promouvoir la communication entre les services du siège et ceux des directions régionales des impôts. Projet de système d'information SIT : Engagements non respectés La Direction générale des impôts a progressivement développé et mis en place un système d'information pour la gestion des impôts depuis la fin des années 1980. Ce système dit SIA n'est pas intégré ; il est constitué d'un ensemble d'applications informatiques dont le développement a été réalisé dans l'objectif principal de transiter d'un mode manuel de traitement et de gestion des impôts vers un mode automatisé. En 2002, la DGI a entrepris un programme de révision de son système d'information. Elle a lancé une étude pour la réalisation de son schéma directeur informatique et de télécommunications (SDIT) pour la période 2003-2007 et qui a été achevée en décembre 2002. Dans le cadre de la mise en oeuvre des recommandations de ce schéma directeur, la DGI a opté pour : - La refonte de ses applications informatiques pour la construction d'un système centré sur le contribuable, intégré, ouvert, portable et sécurisé fonctionnant dans une architecture centralisée ; - La mise en place d'une plateforme technique centralisée pour supporter le système à construire ; - La réalisation d'un réseau de transmission de données TCP/IP propre à la DGI. La mise en place du projet SIT a été organisée en deux chantiers, le premier concerne l'assiette et le recouvrement (SIT-Assiette) et le second concerne le contrôle fiscal (SIT-PVRC) et les affaires juridiques. Ainsi, depuis 2003, la DGI s'est lancée dans un vaste chantier de refonte de son système d'information et a conclu plusieurs marchés dont le total dépasse les 140 millions DH. De point de vue conceptuel, le projet SIT est une refonte globale dans la gestion de la matière fiscale. Le nouveau système a été conçu pour une gestion orientée contribuable (qui constitue le pivot de l'application) en instaurant un identifiant fiscal unique. En plus, il prévoyait la constitution d'une base de données nationale orientée contribuable, l'instauration du compte fiscal, l'élargissement de la couverture fonctionnelle avec la prise en charge du recouvrement, des dépenses fiscales (remboursement, restitution...), la couverture du processus des affaires juridiques, la couverture des processus de programmation et de vérification tout en prévoyant de doter les utilisateurs d'outils d'aide à la vérification et de l'analyse risque. La gestion de ce chantier a connu plusieurs difficultés depuis son lancement, engendrant la non maîtrise des coûts et des délais pour un projet qui devait en principe se concrétiser vers 2009, et surtout la non maîtrise de la qualité des livrables applicatifs. En effet, la DGI a décidé la refonte simultanée de toutes les applications informatiques ASSIETE (IR, IS, TVA et enregistrement), ce qui a posé le problème de disponibilité des fonctionnels et la difficulté de cerner les règles de gestion de la matière fiscale dans les délais contractuels. Cette difficulté a été amplifiée notamment par l'absence de procédures formalisées et la divergence des gestionnaires quant à l'interprétation de la matière fiscale. D'ailleurs, le problème du délai qui allait courir entre la spécification détaillée et le développement y afférent se posait déjà à la phase de la conception. La conséquence était une précipitation de la phase de la conception détaillée au détriment de la couverture fonctionnelle et de la qualité des spécifications. En outre, malgré l'importance du projet et bien que son schéma directeur préconisait le recours à une assistance à la maîtrise d'ouvrage, la DGI s'est livrée seule dans sa relation avec le prestataire. La Cour des comptes s'est arrêtée également sur d'autres difficultés qui ont caractérisé la gestion de ce projet, notamment : Bien que le projet SIT ait prévu un plan d'assurance qualité (PAQ), celui-ci est resté une simple formalité. En effet, plusieurs structures organisationnelles prévues par le PAQ n'ont pas été mises en place (comité de validation pour la phase de la conception détaillée pour chaque domaine fonctionnel, module commun et application, comité de gestion des anomalies, comité de gestion des évolutions et modifications, comités techniques de recettes), ainsi qu'un manque de formalisme avec l'absence à titre d'exemples de fiches de tests et de fiches d'anomalies. La conséquence principale étant une dilution des responsabilités. D'ailleurs, le problème de la structure/ personnes ayant la responsabilité de la validation fonctionnelle et opérationnelle des codes applicatifs installés sur les sites pilotes se pose encore avec acuité (à juin 2012). La société prestataire s'est engagée pour livrer une solution clé en mains. Toutefois, à juin 2012, la solution n'était pas encore validée, ni fonctionnellement, ni opérationnellement. La Cour des comptes a constaté que plusieurs règles de gestion et de calcul, non liées à des évolutions réglementaires, ont été remises en cause par les fonctionnels des trois sites pilotes, lesquels besoins ont fait l'objet d'évolutions qui n'ont pu être couvertes ni par la garantie ni par la maintenance corrective. En conséquence, la DGI a eu recours (appel d'offres ouvert n°27/2010/DGI) au marché reconductible de maintenance et d'assistance au moment où le projet SIT-Assiette était toujours en garantie, notamment pour la prestation n°2 portant sur la maintenance évolutive pour un montant de 4.120.000 DH. L'exécution du projet a largement dépassé le délai contractuel et prévisionnel de 36 mois pour s'établir à environ 70 mois (de la date de notification de l'ordre de service pour le commencement des travaux à la réception provisoire du projet). La conséquence est la révision continuelle des plannings du projet dans ses différentes phases au point où même après la réception provisoire des différents livrables applicatifs, la DGI trouvait des difficultés pour fixer un planning de généralisation du SIT (assiette et PVRC). Ainsi, le premier site de généralisation n'a eu lieu qu'en janvier 2012 et sur lequel des tests en pré-production ont encore lieu à fin juin 2012. Défaillance dans la phase de la conception D'un côté, bien que le PAQ ait prévu un guide de conception et de développement, la Cour des comptes a constaté la non production de ce guide qui devait détailler principalement le fonctionnement des ateliers de conception détaillée et les outils/méthodes utilisées pour la conception. D'un autre côté, la DGI trouvait des difficultés dans la validation de cette phase, comme confirmé par les ordres d'arrêt et de reprise et par les comptes-rendus du comité de suivi. Il convient également de préciser que la DGI a convenu avec le prestataire la réception provisoire des livrables de la conception détaillée en prenant en considération qu'au fil des travaux de développement, des modifications des règles de gestion peuvent avoir lieu. Or, contractuellement, cette réception provisoire vaut réception définitive. Cette situation a suscité par la suite des divergences avec le prestataire qui a considéré que toute demande de modification ou d'ajout de règles non prévues dans la phase de la conception, est une évolution vu que la DGI a validé les livrables de la conception détaillée. Défaillance dans le processus de validation des livrables la conception détaillée et précipitation de la phase de développement Malgré la diversité de la matière fiscale, la Cour des comptes a noté que pour la phase de conception qui devrait impliquer un périmètre large de gestionnaires disposant d'un savoir faire métier, la direction du projet n'a pas assuré une couverture adéquate et une assurance de la complétude des spécifications. Par conséquent, lors du déploiement des applicatifs dans les sites pilotes, plusieurs remises en cause des règles de gestion/calcul, non liées généralement à un changement dans la réglementation fiscale, ont été relevées par les gestionnaires régionaux et se manifestaient encore en juin 2012 lors des travaux de la revue générale des applicatifs. Lors du déroulement de la phase de développement et eu égard au retard accusé dans le planning d'exécution du projet, la direction du projet DGI a conduit ce chantier avec un certain empressement qui a été préjudiciable à la qualité des livrables démontrée d'ailleurs par l'audit de la qualité des codes. Défaillance dans les tests réels A ce titre, plusieurs insuffisances ont été notées dont notamment : La non responsabilisation des équipes de tests ; les testeurs fonctionnels étaient choisis et appelés sur initiative du chef de projet fonctionnel. Ce n'est qu'en mai 2012 qu'une équipe de testeurs a été nommée officiellement par la direction générale. Certains tests fonctionnels ont été menés par l'équipe technique de la DGI faute de disponibilité des équipes fonctionnelles et suite à la multitude des versions d'applicatifs livrées par l'éditeur. Des testeurs fonctionnels ont été sollicités pour mener les tests au niveau central et ramener leurs propres cas de tests. Chaque testeur était ainsi livré à lui-même en l'absence de scénarios de tests formalisés. A fin juin 2012, un effort d'enrichissement des catalogues des règles fonctionnelles était toujours en cours au niveau des sites pilotes. Bien que la matière fiscale réponde à des règles généralement complexes, il est noté l'absence des scénarios de tests suffisamment élaborés et modélisés au moyen de graphes, des diagrammes représentant les éléments déclenchant, l'enchaînement opératoire et les résultats. Par conséquent, une incertitude quant au périmètre de couverture des tests fonctionnels subsiste encore à juin 2012. Se pose également la question de la structure de validation en production pour pouvoir passer à la réception définitive des codes applicatifs eu égard à la réticence des gestionnaires des sites pilotes tel qu'il a été constaté par la Cour des comptes au mois de juin 2012. En outre, il convient de noter le manque de confiance vis-à-vis des applicatifs qui se trouve amplifié avec la fréquence et la cadence élevées des livraisons des codes applicatifs (environ 137 livraisons à juin 2012) et l'absence d'automatisation des tests unitaires, d'intégration et d'anti-régression. Ainsi, après un investissement de plus de 100 millions DH (uniquement pour le marché n°4/2004/ DGI et la première année du marché reconductible de la TMA et sans compter les charges de fonctionnement), une mobilisation de l'équipe technique DSI, une mobilisation des gestionnaires des sites pilotes, la DGI se trouve avec un système, instable, présentant des incohérences de calcul, faisant défaut dans plusieurs spécifications détaillées fonctionnelles, une boucle infinie de tests/constat des anomalies/remontées à l'équipe technique/prise en charge par l'éditeur/relivraison/re-tests. Face à cette situation, une grande question se pose concernant la responsabilité de la validation fonctionnelle et opérationnelle des applicatifs et en conséquence leur recettage. Il est en effet évident que les gestionnaires des sites pilotes éprouveront une large hésitation face à une équipe technique du projet qui paraît dépassée par l'importance des difficultés liées au projet, et qui ne maîtrise pas son échéancier et ses engagements au titre de la validation des fonctionnalités acquises dans les versions antérieures. Même s'il est supposé que le système ait été stabilisé et déployé au niveau des DRI, une autre question importante se pose. Elle concerne la viabilité, l'évolutivité et la maintenance de ce système alors que d'importantes inquiétudes sont soulevées à propos de la dépendance vis-à-vis du prestataire notamment à cause du choix de la direction du projet pour l'implémentation du Framework, et face à la qualité de la javadoc. Par ailleurs, la résistance au changement pourrait être renforcée par les défaillances techniques et de gestion du projet, notamment : Les retards dans la concrétisation du projet surtout dans les sites pilotes (cas de la direction inter préfectorale des grandes entreprises et la direction des personnes morales qui sont en sites pilotes depuis 2009 ; soit presque trois ans sans toutefois disposer de version définitive). Les problèmes techniques et fonctionnels persistant dans les applicatifs avec la croissance de la charge de travail qui incombe aujourd'hui aux sites pilotes pour les tests et re- tests à l'occasion de chaque livraison. Pour la deuxième composante, soit le SIT-PVRC, la DGI s'est lancée dans ce projet alors que le noyau dur, en l'occurrence, le SIT-Assiette n'était pas encore validé fonctionnellement et opérationnellement. En plus, il reste un projet de système se limitant plus à une automatisation, puisque le recoupement qui en était la pierre angulaire n'a pas été retenu dans la prestation. Se pose également la question de la validité fonctionnelle et opérationnelle des applicatifs livrés et réceptionnés le 21 décembre 2010, surtout qu'à juin 2012, ils n'étaient pas encore déployés dans les sites pilotes. Cherchant toujours à disposer d'un système «totalement intégré», la DGI s'est lancée dans d'autres projets dont l'aboutissement est conditionné par la mise en oeuvre du projet SIT ASSIETE. C'est le cas notamment des projets relatifs à la conception et la mise en place d'un système décisionnel et à l'acquisition des outils d'aide à la vérification et à l'analyse des risques. La Cour des comptes recommande à la DGI de procéder à un audit du projet pouvant éclairer sa direction générale sur les choix et les décisions convenables à prendre. Si le choix est fait de continuer à concrétiser ce projet, la Cour des comptes attire l'attention de la DGI, sur l'importance des aspects de gestion de l'implémentation du SIT et d'acceptation par les utilisateurs.