L'émissaire international pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, rencontre ce samedi le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, à Moscou. Selon un porte-parole russe, les deux hommes vont « discuter d'une série de questions liées à un règlement politique et diplomatique en Syrie, y compris les efforts menés par Brahimi pour mettre fin aux violences et lancer un dialogue national complet ». Le chef de la diplomatie russe a appelé vendredi matin le gouvernement syrien à mettre ses actes en conformité avec ses paroles sur la tenue de discussions avec l'opposition. «Nous incitons activement la direction syrienne à concrétiser autant que possible sa volonté affichée de dialoguer avec l'opposition», a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, à l'issue d'un entretien avec son homologue égyptien Mohamed Kamel Amr à Moscou. Toutefois, le ministre russe des Affaires étrangères a estimé que les chances s'amenuisaient d'aboutir à une transition négociée et a mis en garde contre un «chaos sanglant». L'émissaire international Lakhdar Brahimi a appelé jeudi à la formation d'un gouvernement de transition doté de pleins pouvoirs en Syrie avant la tenue d'élections, soulignant que le changement dans le pays, en proie à un conflit meurtrier depuis 21 mois, devait être «réel». Sur le terrain, des rebelles sont parvenus à pénétrer, après des mois de siège, dans l'aéroport militaire de Menagh, près d'Alep (nord), où de «violents combats» les opposent à l'armée, ont rapporté dans la soirée l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et des militants. L'opposition s'est dite ouverte à toute transition politique dès lors que le président Bachar al-Assad n'en faisait pas partie, une question épineuse sur laquelle M. Brahimi ne s'est pas clairement prononcé. Les Syriens réclament «un changement réel et tout le monde comprend ce que cela veut dire», a affirmé M. Brahimi, sans évoquer le sort de M. Assad, au moment où Moscou démentait l'existence d'un accord avec Washington sur son maintien jusqu'à la fin de son mandat en 2014. L'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe a appelé de ses voeux «un gouvernement ayant tous les pouvoirs» durant la transition qui prendra fin avec des élections, sans en préciser l'échéance, une condition à laquelle l'opposition s'est dite ouverte si en sont exclus «la famille Assad et ceux qui ont fait du mal au peuple syrien». M. Brahimi, qui n'a encore pas obtenu l'assentiment de Damas ou de l'opposition à une sortie de crise, a assuré qu'il n'avait aucun «projet complet» pour le moment, menaçant toutefois de recourir au Conseil de sécurité de l'ONU, jusqu'à présent paralysé par les veto russe et chinois à toute résolution condamnant Damas. «Il n'y a pas eu et il n'y a pas» de plan russo-américain Le médiateur a de nouveau évoqué l'accord sur les principes d'une transition en Syrie adopté le 30 juin à Genève par le Groupe d'action sur la Syrie. Pour lui, il y a dans ce texte «suffisamment d'éléments pour négocier une sortie de crise au cours des prochains mois». Les membres de ce Groupe divergent toutefois sur l'interprétation de cet accord qui ne contient aucun appel au départ de M. Assad. Washington estime qu'il ouvre la voie à l'ère «post-Assad», tandis que Moscou et Pékin affirment qu'il revient aux Syriens de déterminer leur avenir. M. Brahimi a enfin démenti la mise au point d'un plan de règlement russo-américain, dont la Russie a également nié l'existence. «Il n'y a pas eu et il n'y a pas» de plan russo-américain sur un gouvernement de transition, avec maintien de M. Assad jusqu'aux prochaines présidentielles, comme l'affirmaient des informations de presse, a affirmé un porte-parole des Affaires étrangères russes. «Placer le départ d'un président élu en pierre angulaire de tout dialogue est une violation de tous les accords obtenus» à Genève, a-t-il estimé. M. Brahimi doit mener samedi en Russie de nouvelles discussions sur une solution au conflit qui a fait plus de 45.000 morts selon l'OSDH et deux millions de déplacés, tandis que quatre millions de personnes ont désormais besoin d'aide humanitaire, selon l'ONU. Alors que les Nations unies ont récemment dénoncé un conflit devenu «ouvertement communautaire», M. Brahimi a estimé que les divisions, «au début politiques, (... prenaient) désormais une forme affreuse, celle d'affrontements confessionnels». Jeudi, les violences ont fait au moins 58 morts à travers le pays, selon un bilan provisoire de l'OSDH, qui s'appuie sur un réseau de militants et de sources médicales civiles et militaires.