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Les défis du développement humain au Maroc
Réparer le déni des droits sociaux et économiques Les dégâts de l'exclusion, les chemins de l'inclusion
Publié dans L'opinion le 15 - 12 - 2012

Abordant le thème de l'inclusion dans son discours du 18 Mai 2005 annonçant l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH), Sa Majesté le Roi avait fait référence à des données objectives qui montrent que de «larges franges de la population marocaine et des zones entières du territoire national vivent dans des conditions difficiles et parfois dans une situation de pauvreté et de marginalisation, qui est incompatible avec les conditions d'une vie digne et décente que Nous souhaitons pour Nos concitoyens».
C'est dire l'importance que Sa Majesté le Roi accorde à la lutte contre l'exclusion. L'inclusion, un concept politique qui donne son sens à cette lutte, est un des objectifs majeurs de l'Initiative Nationale pour le Développement Humain.
Reconnaissant cette priorité sociétale et souhaitant apporter des compléments à son analyse des réalisations de l'INDH pour la période 2005-2009, le Conseil de l'Observatoire National du développement Humain a choisi de consacrer son deuxième rapport au thème de l'inclusion. Ce thème figure parmi les cinq « nœuds du futur» identifiés dans le Rapport du Cinquantenaire (RDH 50), les quatre autres étant le savoir, l'économie, la santé et la gouvernance. Ces nœuds correspondent à des problématiques clefs qui font référence aux blocages et aux déficits structurels de notre pays. Sans leur dépassement, le développement du Maroc sera probablement compromis.
Le Rapport Général du Développement Humain depuis l'indépendance (RDH50) reconnaît, en effet, que « le Maroc n'a pas toujours su inclure l'ensemble des composantes de sa société et de son territoire dans son processus de développement. La femme marocaine n'a pas eu toute sa place, loin s'en faut, dans le processus de développement du pays. Le niveau de développement des femmes, en particulier celles vivant en milieu rural, est demeuré préoccupant comme l'attestent le taux de scolarisation des filles ou le taux de chômage féminin. La première injustice faite aux femmes est l'analphabétisme.
Les jeunes non plus n'ont pas eu la place qui leur revient dans notre marche vers le développement. Leur insertion sociale et économique s'est trouvée réduite par la faiblesse de l'encadrement, en matière d'éducation, d'engagement politique et d'activités culturelles et sportives. Ces déficits d'inclusion sont également d'ordre territorial, puisque des régions entières se sont trouvées exclues de l'entreprise de développement. Le monde rural a été largement laissé pour compte, frappé par le chômage, le sous-emploi, la pauvreté, l'analphabétisme, les maladies et des conditions de vie tantôt rudimentaires, tantôt misérables».
Ce constat du RDH 50 traduit les difficultés de la société marocaine pour assurer le bien-être de tous ses membres et pour réduire les disparités sociales et spatiales. Il pose en termes cruciaux la problématique de l'exclusion dans notre pays avec, en toile de fond, la question centrale de la cohésion sociale. Ce questionnement reste d'une actualité prégnante.
La problématique de l'inclusion s'applique aux politiques mises en œuvre pour lutter contre les causes d'une exclusion qui affecte des franges encore trop larges de la société et réduit considérablement leur aptitude à participer à la vie collective, tant sur le plan économique que social ou politique. Cette exclusion se traduit par des déficits de développement humain des catégories sociales qu'elle concerne et par une incapacité de fait de ses victimes de jouir pleinement des droits civils, politiques et sociaux du citoyen. L'exclusion apparaît, en même temps, comme une contrainte majeure pour le développement, dans la mesure où les «exclus» constituent une force de travail et un capital humain mal valorisés, mal intégrés dans les mécanismes du marché et rejetés dans la pauvreté et la précarité. La désespérance des exclus est aussi, l'histoire récente le montre, porteuse de risques d'explosion sociale.
L'exclusion est une notion équivoque en tant que concept scientifique. Les recherches effectuées en Europe, depuis la fin des années 80, ont cependant abouti à une définition consensuelle de ce concept. Ainsi, l'exclusion n'est plus envisagée comme un état, mais elle est comprise comme un processus ayant son origine dans des situations de précarité. Les références à cette notion permettent de mettre en évidence la fragilisation du lien social dans les sociétés modernes.
L'exclusion se définit par rapport à un espace de référence qui engendre un vécu d'exclusion. Cet espace est, en fait, pluriel. On peut vivre l'exclusion par rapport à l'espace des relations sociales (la famille, le réseau social, etc.), par rapport au champ économique (les disparités des niveaux de consommation, les inégalités des capacités de génération de revenus), par rapport au champ politique (le vécu des limitations de la participation et de l'implication citoyenne), par rapport à des discriminations juridiques, culturelles, ethniques, etc. Un individu, un groupe social, peuvent ressentir une exclusion lorsqu'ils se situent par rapport à l'un de ces champs ou par rapport à plusieurs de ces champs de l'expérience sociale.
L'exclusion est ainsi une notion relative. Elle a de multiples chances d'être ressentie par la majorité des membres d'un corps social, toujours confrontés dans la vie à des inégalités ou à des disparités de traitement. A cette échelle, l'exclusion est vécue comme une ou des particularités des vies individuelles, mais elle ne crée pas nécessairement des phénomènes de rejet social ou de rupture du lien social. L'exclusion prend, par contre, une signification sociale beaucoup plus marquée lorsque des individus ou des groupes sociaux sont confrontés à un cumul de handicaps et à une convergence de facteurs d'exclusion, dont, en particulier, la pauvreté et la précarité. Il s'agit alors d'une exclusion sociale forte qui réduit considérablement l'aptitude à participer à la vie collective. Cette forme d'exclusion affecte le sens-même et la raison d'être des vies individuelles. Elle est un déni de développement humain. L'état d'exclusion, associé au vécu, sans espoir, de la précarité, tend à rejeter leurs victimes dans la marginalisation économique, sociale ou politique.
Au Maroc, l'exclusion est principalement le résultat de la vulnérabilité économique d'une part importante de la population rurale, d'un exode rural continu qui déracine des populations entières, d'une urbanisation anarchique et rapide qui accentue les inégalités sociales et spatiales. Elle résulte aussi de l'inadaptation des systèmes scolaires et universitaires, de l'insuffisance des services sanitaires et sociaux, d'un chômage massif qui touche les moins qualifiés, notamment les femmes, mais aussi les jeunes diplômés, d'une déliquescence dans les villes, mais aussi, de plus en plus, dans les campagnes, de la protection sociale des familles et des personnes âgées qu'assurait la société traditionnelle.
Cette exclusion se manifeste sous des formes diverses. Elle peut, ainsi, être un effet de la faiblesse du pouvoir d'achat et de la pauvreté, de l'analphabétisme, du genre (situation des femmes), de l'âge (situation des jeunes ou des personnes âgées), de la marginalisation linguistique, de la maladie et des handicaps physiques, de l'absence de logement décent et de la marginalisation par rapport à la vie politique. Ces facteurs d'exclusion tendent souvent à s'accumuler et à se renforcer mutuellement. Certaines convergences tendent à isoler des personnes ou des groupes du reste de la société, bien que pouvant coexister avec des situations à l'écart de la pauvreté. Mais d'autres convergences sont profondément associées à la précarité et à la pauvreté, ce qui dessine dans le paysage social des strates de population en marge des dynamiques collectives. Ces strates constituent ce que l'on pourrait appeler, par référence aux classifications de la pauvreté, des exclus absolus. Leurs cohortes forment une part considérable des populations rurales ou se retrouvent dans les masses humaines des quartiers pauvres des villes.
De multiples causes expliquent l'importance de l'exclusion au Maroc. Les pesanteurs sociologiques ont été maintes fois évoquées pour rendre compte de la discrimination des femmes ou de la soumission des jeunes à l'autorité paternelle. On peut aussi invoquer les insuffisances des politiques de développement conduites depuis l'indépendance pour expliquer la pauvreté. On ne peut que renvoyer au RDH 50 qui a très bien analysé ces causes et ces raisons. Les années récentes n'ont fait que les exacerber. La récurrence des sécheresses s'est aggravée, la libéralisation et l'ouverture des frontières ont stimulé la concurrence interne sans qu'aient été mis en place des filets de sécurité, les déficits de compétence entrepreneuriale ont limité la compétitivité sur les marchés extérieurs, la centralisation excessive du système fiscal a été un frein à la décentralisation, l'absence de cette incapacité, totale ou partielle, d'interaction peut entrainer une rupture progressive des liens sociaux (avec les autres acteurs) et symboliques financements autonomes a contraint les investissements en milieu rural, la faible capacité de négociation des travailleurs a accentué la précarisation du marché de l'emploi, etc.
Au cours de la première décennie des années 2000, le Maroc a, cependant, beaucoup changé. Des réformes structurelles ont été mises en œuvre pour améliorer la compétitivité de l'économie nationale dans un contexte d'ouverture grandissante et de globalisation des économies. En même temps, de grands chantiers d'infrastructure ont été lancés, en particulier pour accompagner les plans sectoriels dans les domaines du tourisme, de l'industrie, de l'agriculture, de l'énergie, des transports. Mais l'une des actions politiques les plus importantes a été celle d'une relance nationale de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion.
C'est à partir du milieu des années 90 que l'on a pleinement mesuré les risques que faisaient peser la pauvreté et l'exclusion sur la cohésion de la société marocaine et que l'on a ressenti le besoin de promouvoir des politiques spécifiques pour s'engager dans ce combat. Jusqu'alors, on avait accepté l'idée que la croissance économique entraînait nécessairement un recul de la pauvreté et de l'exclusion. La spécificité de ce problème et son découplage par rapport à la croissance économique n'avaient pas été reconnus. La nouvelle démarche donna lieu à une stratégie de développement social qui comportait un axe économique, un axe de développement humain et une assistance sociale ciblant les pauvres. Ce plan, cependant, ne put atteindre les objectifs qui avaient été fixés au début des années 20004, selon les conclusions du rapport national sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) de 2003, en matière d'amélioration du bien-être. Cette insuffisance fût en partie expliquée par une mauvaise coordination entre les programmes et les institutions chargées de la mise en œuvre, par une dispersion des efforts, par un mauvais ciblage et par une prédominance des actions à caractère correctif et conjoncturel.
Signe positif, cependant, la prise de conscience de la gravité de la pauvreté avait pu toucher de très nombreux citoyens et elle avait, en particulier, fait émerger des organisations de la société civile, motivées et dynamiques, engagées dans un travail associatif en faveur des déshérités. On doit saluer leurs remarquables efforts et les résultats que ces organisations surent obtenir avec des moyens modestes. On leur doit d'avoir apporté un souffle nouveau à la lutte contre l'exclusion et d'avoir levé bien des tabous sur l'engagement dans le champ social.
C'est dans ce contexte que l'INDH a été lancée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le 18 mai 2005. Cette initiative s'est proposé de soutenir des projets locaux dans les régions les plus pauvres et au service des plus pauvres. La philosophie d'action de l'INDH s'appuie sur une approche participative et une gouvernance de proximité. Les projets doivent avoir une justification en termes de développement humain et avoir des effets tant sur la réduction de l'exclusion sociale en milieu urbain que sur celle de la pauvreté en milieu rural.
L'ensemble des programmes INDH, y compris le phénomène de l'exclusion, a fait l'objet d'une première évaluation par l'ONDH dans son rapport annuel de 2008, complété par le rapport de 2009. L'INDH apparaît aujourd'hui comme un dispositif novateur et comme un cadre d'action permettant d'agir de manière intégrée dans les communes rurales les plus pauvres et les quartiers urbains les plus défavorisés.
Des faiblesses ont marqué ses premières années de mise en œuvre mais, au fur et à mesure de l'appropriation des leçons de l'expérience, ces faiblesses devraient être corrigées par des mesures d'amélioration.
Cette évaluation a mis en évidence la nécessité d'une stratégie de lutte contre l'exclusion qui privilégierait trois axes: la mise à niveau des infrastructures de base et l'amélioration de l'accès aux services socio-éducatifs et de santé, la promotion d'activités génératrices de revenus et d'emplois, en ciblant notamment les femmes et les jeunes, et, en troisième lieu, l'accompagnement social des personnes en situation de grande vulnérabilité.
L'INDH devient, ainsi, de plus en plus, un laboratoire de mise en œuvre de politiques adaptées de lutte, à l'échelle locale, contre la pauvreté et l'exclusion. Cette initiative ouvre, en effet, des voies d'expérience qui pourraient être valorisées par les politiques de développement intervenant plus massivement à l'échelle locale, en particulier, celles promues par le Pilier II du Plan «Maroc Vert», celles conduites par les politiques de la ville et du logement social, celles, enfin, qui se mettront en place avec l'élaboration des Plans Communaux de Développement .
Trois catégories de populations sont plus particulièrement touchées par l'exclusion, celle constituée par la majorité des femmes rurales et de larges segments des femmes des villes, celle des jeunes, confrontés à des questionnements sérieux sur leurs perspectives d'avenir, mais qui restent néanmoins optimistes et celle de la grande masse des ruraux pauvres et vulnérables. Ces trois catégories cibles ont été identifiées comme étant parmi les plus vulnérables par le RDH 50.
Le rapport de l'ONDH sur l'inclusion a choisi de se focaliser sur l'évolution de la situation d'exclusion de ces trois catégories de populations. Il se propose, à cet effet, de faire un bilan des principales mesures et réformes qui les ont concernées et d'analyser, par l'examen d'une sélection d'indicateurs, l'impact des politiques qui ont été mises en œuvre pour agir sur les facteurs majeurs de leur exclusion.
Il souhaite ainsi donner une image objective des progrès et des insuffisances de ces actions, ainsi qu'une appréciation de leurs effets sur l'inclusion des femmes, des jeunes et du monde rural durant la période 2004-2009.
Au demeurant, ce travail intervient à un moment particulier de l'histoire de la région où une aspiration forte à la démocratie, à la dignité et au bien-être confère un relief particulier à la problématique de l'inclusion. Il vient ainsi éclairer les décideurs publics sur les résultats des politiques qu'ils mènent pour répondre aux attentes qui s'expriment aujourd'hui.


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