L'Otan s'apprêtait, hier mardi, à donner son feu vert au déploiement de missiles Patriot pour protéger la Turquie d'éventuelles attaques venues de Syrie, alors que les inquiétudes grandissent sur les risques d'un recours aux armes chimiques par le régime de Bachar al-Assad. Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a prévu que l'utilisation d'armes chimiques par la Syrie entraînerait une «réaction internationale immédiate». «Une utilisation éventuelle d'armes chimiques serait totalement inacceptable pour la communauté internationale. Je m'attends à une réaction immédiate de la communauté internationale» si c'était le cas, a déclaré M. Rasmussen avant une réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de l'Otan à Bruxelles. De son côté, le président américain Barack Obama a directement menacé son homologue syrien de «conséquences» s'il faisait usage d'armes chimiques, comme le craignent certains experts. «Le recours à des armes chimiques est et serait totalement inacceptable. Si vous commettez l'erreur tragique d'utiliser ces armes, il y aura des conséquences et vous en répondrez», a prévenu M. Obama. Les Etats-Unis sont «inquiets à l'idée qu'un régime de plus en plus assiégé (...) réfléchisse à l'utilisation d'armes chimiques contre les Syriens», a renchéri le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney. Un responsable américain a affirmé lundi que Damas était en train de mélanger les composants nécessaires à la militarisation du gaz sarin, un puissant neurotoxique qui provoque une paralysie complète puis la mort. Damas a cependant réaffirmé lundi «qu'elle ne fera pas usage de ce genre d'armes, si elle en possède, contre son peuple», selon une source au ministère des Affaires étrangères. Pour Washington et de nombreuses autres capitales comme Berlin, l'utilisation d'armes chimiques constituerait le franchissement d'une «ligne rouge». «L'usage d'armes chimiques changerait la donne. Le régime (syrien) sait bien que la communauté internationale n'acceptera pas que ces armes soient utilisées», a expliqué le ministre jordanien des Affaires étrangères, Nasser Judeh. Cet avertissement pourrait être réitéré par les ministres des Affaires étrangères des 28 pays membres de l'Otan qui se réunissent mardi et mercredi au siège de l'Alliance atlantique à Bruxelles. Sans surprise, ils devraient répondre favorablement, dans l'après-midi, à la demande faite par la Turquie d'installer temporairement des batteries de missiles Patriot à proximité de la frontière syrienne. «Il y a consensus sur cette question. Nous sommes tous d'accord pour démontrer notre solidarité avec la Turquie, sur la base des principes fondamentaux de l'Otan», a expliqué un diplomate sous le couvert de l'anonymat. Une fois l'accord donné, il reviendra aux trois pays de l'Otan possédant des Patriot --Etats-Unis, Allemagne et Pays-Bas-- de décider du nombre de batteries, de la date et de la durée de leur déploiement. En raison des délais nécessaires, liés notamment à l'approbation parlementaire en Allemagne, les Patriot devraient être opérationnels au cours du premier trimestre 2013, a souligné un diplomate. 300 à 400 soldats de ces pays pourraient être stationnés en Turquie afin de faire fonctionner les quatre à six batteries qui pourraient être déployées à Malatya, Diyarbakir et Sanliurfa, selon une source militaire turque. La Syrie devrait être le principal sujet de discussion au cours du déjeuner que partageront les chefs de la diplomatie des pays de l'Otan avec leur homologue russe Sergueï Lavrov. En visite à Istanbul, le président russe Vladimir Poutine a critiqué le déploiement des Patriot, qui selon lui ne va «pas apaiser» les tensions avec la Syrie mais «au contraire l'exacerber».