Il y a un an, les électeurs marocains portaient au pouvoir un gouvernement de coalition dirigé par le PJD, avec l'espoir d'opérer un grand changement dans la gestion des affaires de la nation. Concrètement, les Marocains attendaient du nouveau gouvernement de répondre à leurs multiples et urgentes attentes, du moins à la hauteur des engagements énoncés dans la déclaration de son chef devant le parlement. Douze mois après, sans être négatifs, il est difficile de dire que cette première année d'exercice du pouvoir par l'Exécutif en place ait suscité la satisfaction des citoyens. Ni donné un signal positif sur ce que seront les quatre prochaines. Toutes les vérités sont bonnes à dire, même si ça fait mal, surtout quand on doit rendre compte aux électeurs au terme du mandat octroyé. L'équipe gouvernementale n'a pas donné d'elle-même la meilleure des images. Aux déclarations tonitruantes ont succédé les débandades spectaculaires, qualifiées par euphémisme de «retraits tactiques», avant de sombrer lamentablement dans la dénonciation d'entités supranaturelles, aux sons d'une triste mélodie aux relents de défaitisme. Peut être avait-on plus besoin du talisman d'un «fqih» pour conjurer les mauvais esprits que d'une nouvelle Constitution On ne peut imaginer meilleur moyen d'écœurer les gens de la politique. La loi fondamentale de la nation définit clairement les prérogatives du pouvoir exécutif, assumé par le gouvernement élu. Soit celui-ci est capable d'affronter toutes les difficultés qui ne vont jamais manquer de se présenter, soit il se désiste et laisse place à ceux qui peuvent le faire ! Il n'a jamais été dit que le renforcement de la démocratie va s'écouler comme un long fleuve tranquille. C'est à leurs capacités à relever les défis et à surmonter les obstacles que l'on reconnaît les bons gouvernants. Encore faut-il, en fait, que les principes de la nouvelle Constitution soient traduits en projet de lois organiques, processus qui semble traîner en raison d'un gouvernement qui prend tout son temps pour ce faire. La cohésion gouvernementale peine à résister à ses contradictions internes et aux assauts répétés de ceux qui s'imaginent pouvoir la mettre au pas plutôt que de la mettre en symbiose. Les réflexes partisans des uns ont fini par entraîner les réactions outrées des autres composantes de la coalition et les critiques constructives des députés de la majorité ont été rejetées avec fracas. «Silence dans les rangs !». Voilà pour la gestion participative des affaires publiques et du rôle de la chambre d'enregistrement que l'on veut accoler à nouveau au parlement. Pour les prises de décisions concertées au sein de la majorité gouvernementale, disons par politesse que ce n'est pas le genre de la maison pour ceux qui ont longtemps rêvé de s'accaparer le pouvoir. La presse s'en est donné, bien sûr, à cœur joie, se moquant bien de se faire traiter de tous les noms d'oiseaux par ceux qui veulent la museler. A l'inexpérience flagrante de certains dans la gestion des affaires publiques s'est greffée une fâcheuse étroitesse d'esprit, créant un climat qui n'est pas des plus sains. L'opinion publique nationale assiste, effarée, au spectacle désolant de leaders politiques accumulant les sorties ratées et les gaffes dont les journalistes se repaissent. Et que voit-on se profiler à l'horizon ? Plutôt qu'une stratégie aux contours clairement définis que l'on doit voir se déployer d'une année à l'autre, c'est plutôt d'une navigation à vue qu'il s'agit dans la gestion des affaires publiques. Le Maroc recourt à l'endettement extérieure pour maintenir sa trésorerie à flot et réduire la pression sur les liquidités en interne, alors que les importations persistent à enregistrer un rythme de croissance plus importants que celui des exportations, selon les chiffres de l'Office des changes. Normalement, ce sont les secteurs productifs exportateurs qui sont les véritables pourvoyeurs de devises à promouvoir, dans le but évident d'éviter de vivre à terme le même scénario catastrophe dû à l'inflation de la dette souveraine que les pays d'Europe du sud actuellement. Le taux de chômage continue pour sa part de progresser, selon les chiffres du Haut commissariat au plan. Dans l'industrie et le BTP, piliers de l'économie physique, c'est littéralement à des pertes d'emplois que l'on assiste. Il serait peut être temps de se rappeler que les Marocains ont choisi la révolution tranquille via les réformes politiques, ce qui a évité au pays de subir les affres de «l'automne arabe». Il ne faudrait donc surtout pas continuer à les décevoir plus qu'ils ne le sont déjà. Et ce n'est sûrement pas la muette solidarité qui est le remède le plus indiqué pour y parvenir.