L'ancien international brésilien Socrates, décédé dimanche matin à l'âge de 57 ans, était un joueur emblématique des campagnes mondiales auriverde de 1982 et 1986, mais aussi un médecin diplômé et un promoteur courageux de la démocratie pendant la dictature. Il avait reconnu avoir souffert d'alcoolisme. Un démon contre lequel il n'a pas su lutter. Socrates avait été hospitalisé d'urgence une première fois le 5 septembre, pour une hémorragie digestive, puis avait été traité dix-sept jours avant de quitter l'établissement. Il avait de nouveau été hospitalisé d'urgence dans la nuit de vendredi à samedi. Son décès des suites d'une infection intestinale a été annoncé dimanche. Adepte autoproclamé du beau jeu, ce milieu de terrain très porté vers l'offensive a incarné avec Zico et Falcao les "Seleçaos" des Coupes du monde en Espagne (1982) et au Mexique (1986), équipes saturées de talent et de panache, mais toujours vaincues. A cette époque, le capitaine brésilien (60 sélections, 22 buts) était reconnaissable à sa barbe, sa silhouette longiligne et son allure altière sur le terrain. Il donnait l'impression d'une grande facilité technique et d'une exceptionnelle vision du jeu, faisant de lui le parfait ambassadeur d'une certaine idée "romantique" du football créatif qui caractérisait l'équipe du sélectionneur Tele Santana. Né le 19 février 1954 à Belem, en Amazonie, Socrates Brasileiro Sampaio de Sousa Vieira de Oliveira a débuté sa carrière en 1974 dans le club de Botafogo. En 1978, il rejoint les Corinthians de San Paolo, où il inscrit pas moins de 172 buts en 6 ans et remporte trois championnats paulistes (1979, 1982 et 1983). C'est dans ce club phare que le joueur et quelques-uns de ses coéquipiers ont instauré dans les années 1980, en pleine dictature (1965-1985), la "Démocratie Corinthiane", un système dans lequel chaque décision liée à la vie du club était soumise au vote des joueurs. "Je veux voter pour mon président" L'épisode le plus marquant de cette période fut l'inscription audacieuse de la phrase "Je veux voter pour mon président" sur les maillots des joueurs, qui avait fortement courroucé la junte et marqué les esprits. Socrates fut aussi un étudiant brillant, et avait même décroché un doctorat en médecine de la prestigieuse faculté de San Paulo, faisant figure d'exception, voire de phénomène, dans le milieu du football. Ce sont ses deux facettes de médecin et de démocrate militant qui lui ont valu le surnom de "doctor Socrates". Après un bref passage en Toscane, à la Fiorentina (1984-1985), il revint au Brésil et finit discrètement sa carrière à Santos puis à Botafogo, où il raccrocha les crampons en 1989, à l'âge de 35 ans. Depuis, il était devenu auprès des médias un inlassable pourfendeur du "foot-business" et de l'inculture extra-sportive de ses compatriotes footballeurs. Ces derniers temps, il exerçait toujours comme spécialiste en médecine sportive et demeurait un consultant très sollicité par la presse écrite, la TV et la radio, avant de reconnaître publiquement des problèmes d'alcoolisme à l'origine d'une cirrhose. Socrates était le frère aîné de Rai, milieu de terrain de la "Seleçao" (51 sélections), qui a fait les belles heures du Paris Saint-Germain dans les années 1990.