La police et des soldats pakistanais ont eu ordre, vendredi, de tirer à vue à Karachi, après que des violences politiques et ethniques ont fait près de 70 morts et des dizaines de blessés depuis mardi, rapporte un responsable pakistanais. "Nous avons donné l'ordre aux forces de sécurité de tirer sur toute personne impliquée dans les violences", a déclaré le ministre de l'Information de la province Sharjeel Memon à Reuters. "Trente-sept personnes ont été tuées hier (jeudi)", a-t-il indiqué. Le chef de la police de Karachi Saud Mirza a lui affirmé que le bilan était de 63 morts et de 150 blessés depuis le début des affrontements mardi. En plus de la police et des soldats, environ un millier de paramilitaires vont être déployés dans la ville pour contenir la violence, a précisé la police. Les boutiques et les stations-service sont restées fermées et les transports publics ne circulaient pas vendredi. La plupart des violences ont eu lieu dans les quartiers ouest de la métropole de Qasba Colony et dans ses environs. Mais les troubles gagnent peu à peu les autres quartiers de la capitale économique et financière du Pakistan. Des coups de feu continuaient de retentir vendredi dans de nombreux endroits de la ville et certains habitants brûlaient des pneus et jetaient des pierres au passage des quelques véhicules circulant. Des groupes de personnes attendaient en vain aux arrêts de bus. Les soldats et les policiers patrouillaient dans des rues quasiment vides. Le premier parti politique, le Muttahida Qaumi Movement (MQM), avait annoncé une journée de deuil à la suite de la flambée de violence. Karachi, ville de plus de 18 millions d'habitants, est souvent le théâtre de violences interreligieuses et interethniques. La lutte entre le MQM, qui représente les intérêts des mohajirs, et l'ANP, liée à la minorité pachtoune, fait rage depuis des années. Ces dernières violences sont liées à la décision du MQM de quitter la coalition au pouvoir. "C'est un problème ethnique et politique et il faudra un engagement politique fort pour ramener la paix dans la ville", a confié un responsable proche des services de sécurité qui a demandé à ne pas être nommé. L'ambassadeur américain à Islamabad Cameron Munter a lancé un appel au calme. "Nous appelons toutes les parties à ne plus commettre de nouvelles violences", a-t-il déclaré dans un communiqué. Les conséquences économiques de ces affrontements pourraient être très dommageables pour le pays, a prévenu Muhammad Saeed Shafiq, président de la chambre de commerce. "Si le gouvernement ne fait pas attention à la dégradation de la situation à Karachi et n'empêche pas le sang des innocents de couler, nous fermerons nos usines et nos bureaux", a-t-il dit. Un rapport récent de la commission pakistanaise des droits de l'homme indiquait que 490 personnes avaient été tuées depuis le début de l'année à Karachi après des violences religieuses ou politiques.