Pressé de faire repartir le processus de paix israélo-palestinien, Nicolas Sarkozy a cependant refusé lundi d'abonder dans le sens de son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui a suggéré la proclamation unilatérale d'un Etat palestinien si Israël tardait de revenir à la table des négociations. Le président français a apporté un soutien sans faille au président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, plaidant pour un Etat palestinien "viable" et en paix avec ses voisins israéliens. "Les négociations d'abord, la proclamation d'un Etat après", a tempéré en souriant le président palestinien lors d'une conférence de presse avec M. Sarkozy à l'issue d'un déjeuner de travail à l'Elysée. S'il n'a pas exclu que les Palestiniens saisissent le Conseil de sécurité de l'ONU si les négociations tardaient encore, il a précisé qu'ils ne le feraient qu'avec "l'accord de tous les Etats du monde, des Etats-Unis et de l'Union européenne". "Bernard Kouchner s'est interrogé effectivement, et à juste titre, sur le temps que prenait tout ceci. Et il a mis sur la table un certain nombre de possibilités, d'alternatives, au cas où on ne débloquait pas les choses", a aussi souligné Nicolas Sarkozy. Il a cependant pris ses distances avec la proposition de proclamer un Etat palestinien pour forcer la main aux Israéliens. Et de rectifier la position "officielle" de la France: "nous voulons un Etat palestinien" mais "un Etat réel, qui puisse donner une espérance en l'avenir aux millions de Palestiniens", "un Etat palestinien dans les frontières de 1967, avec un échange de territoires" et Jérusalem comme capitale. "Sur le fond des choses, la position de la France est: un Etat palestinien viable, moderne, démocratique, reconnaissant l'existence d'Israël et vivant en paix aux côtés d'Israël", a-t-il ajouté. Selon M. Sarkozy, la situation actuelle est "d'autant plus incompréhensible et inacceptable que tout le monde connaît les termes d'un accord de paix définitif". Ces termes sont "deux Etats, Jérusalem capitale de deux Etats, un Etat palestinien dans les frontières de 1967, un échange de territoires, une discussion sur les réfugiés". "Dans la déclaration de Bernard (Kouchner), il y a de la prospective, de dire: 'si on n'arrive pas à ça, on peut marquer politiquement, le moment venu, en accord avec nos amis palestiniens l'idée de cet Etat, pour lui donner un cran de plus en quelque sorte'", a encore expliqué Nicolas Sarkozy devant son ministre assis au premier rang. Prenant fait et cause pour les Palestiniens, tout en insistant sur la nécessité de garantir la sécurité israélienne, Nicolas Sarkozy a aussi fermement condamné "l'assassinat" d'un cadre du Hamas dans un hôtel de Dubaï, opération que les autorités émiraties attribuent au Mossad, les services secrets israéliens. "La France condamne toutes les exécutions. Ce ne sont pas des méthodes et rien ne peut justifier ces méthodes", d'autant plus que l'assassinat a eu lieu "sur le territoire des Emiratis, qui est un pays qui concourt à la paix, au rapprochement et à la coopération", a souligné Nicolas Sarkozy, sans jamais nommer le Mossad. Mahmoud Abbas s'est félicité du soutien du chef de l'Etat français, assurant que les Palestiniens allaient continuer sur "la voie démocratique" qu'ils avaient "choisie" et qui allait les conduire vers des élections. "La paix ne viendra que par les négociations. Je souhaite que la partie israélienne nous aide et accepte les propositions internationales", a-t-il ajouté.