L'ambitieux programme d'aide sociale directe est confronté à des défis sur lesquels il peut buter pour atteindre les résultats escomptés. Le point avec le juriste Chakib Khayari. - Le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a exposé, lundi 23 octobre, devant le Parlement les détails du programme d'aide sociale directe, qui sera activé dès décembre 2023. Quel est le cadre juridique régissant les programmes d'appui social ?
- La loi 72-18, relative au système de ciblage des bénéficiaires des programmes d'appui social et à la création de l'Agence nationale des registres (ANR), vise à améliorer l'efficacité et l'efficience du système de protection sociale non contributif.
Cette loi a été publiée dans le Bulletin Officiel en 2021 dans le but d'établir un dispositif national d'enregistrement des ménages et des personnes souhaitant bénéficier des programmes d'appui social gérés par les administrations publiques, les collectivités territoriales et les organismes publics.
La nécessité de la loi 72-18 découle de plusieurs facteurs. Tout d'abord, malgré les avancées dans la mise en œuvre des programmes d'assistance sociale, il subsiste des préoccupations quant à l'efficacité et à l'efficience du système de protection sociale non contributif. De plus, la crise sanitaire qu'a connue le Maroc a mis en lumière l'importance de l'identification rapide des personnes nécessitant une aide sociale de la part de l'Etat, mettant ainsi en relief l'essentiel d'un Registre social unifié (RSU).
- Quel est le déroulement normal de ce Programme après sa présentation ?
- L'Article 31 de la loi n° 72-18 établit que les administrations publiques, les collectivités territoriales et les organismes publics responsables de la gestion des programmes d'appui social ont l'obligation de fournir à l'ANR toutes les informations nécessaires pour la gestion de ces programmes, y compris la liste des programmes d'appui, les critères d'éligibilité ainsi que la liste des bénéficiaires.
De plus, conformément à l'Article 32 de cette loi, toutes les administrations publiques, les collectivités territoriales ainsi que les organismes publics et privés doivent répondre aux demandes de l'ANR en fournissant les données et les informations nécessaires pour faciliter l'exercice de ses missions.
Ces données et informations doivent être échangées avec l'ANR conformément aux modalités établies dans les conventions conclues par l'ANR avec les parties concernées. En outre, les organismes publics et privés sont tenus de maintenir régulièrement à jour ces données et informations.
- Quelle autorité juridique se charge de sa bonne mise en exergue ?
- La loi 72-18 a établi que l'ANR a pour mission de mettre en place et de superviser le RSU afin d'identifier de manière précise les personnes éligibles aux programmes d'aide sociale gérés par les entités publiques, les collectivités territoriales et les organismes publics, permettant ainsi une meilleure sélection des bénéficiaires.
En plus, l'ANR doit mener des évaluations approfondies de ces programmes et formuler toute recommandation ou proposition au gouvernement en vue de garantir la coordination et la convergence des programmes d'appui social et d'atteindre les objectifs escomptés pour en augmenter l'efficacité et l'efficience.
- A quels défis pourrait se confronter ledit Programme ?
- Les programmes d'aide sociale sont susceptibles de faire face à divers défis, parmi lesquels l'identification des bénéficiaires qui et constitue un défi majeur. Il est complexe de garantir une identification précise des individus éligibles aux programmes d'aide sociale, ce qui peut entraîner des erreurs d'inclusion ou d'exclusion.
En outre, ces programmes sont parfois vulnérables à la fraude et à l'abus, avec des personnes tentant indûment de percevoir des prestations ou de fournir de fausses informations pour bénéficier de ces programmes. Ce qui peut entraîner une utilisation inappropriée des ressources destinées à l'aide sociale.
Un autre défi réside dans le manque de coordination entre les différentes entités publiques, les collectivités territoriales et les organismes publics impliqués dans la gestion de ces programmes. Cette coordination insuffisante peut entraîner des chevauchements, des lacunes dans la couverture et une utilisation inefficace des ressources.
Les programmes d'aide sociale nécessitent des ressources financières et humaines pour leur mise en œuvre et leur évaluation, mais le manque de ressources adéquates peut limiter leur portée et leur impact, rendant ainsi difficile l'atteinte de leurs objectifs.
Par ailleurs, les procédures administratives associées à ces programmes peuvent parfois être complexes et difficiles d'accès pour les personnes dans le besoin. Ce qui peut décourager certaines personnes de demander de l'aide, réduisant ainsi l'efficacité des programmes.
Pour relever ces défis, il est essentiel de mettre en place des mécanismes de vérification efficaces pour l'identification des bénéficiaires, de renforcer les mesures de lutte contre la fraude. Il s'agit aussi de promouvoir la coordination entre les parties prenantes, d'allouer des ressources adéquates et de simplifier les procédures administratives. De telles actions contribueront à garantir que les programmes d'aide sociale atteignent efficacement les personnes dans le besoin et offrent un soutien significatif pour améliorer leur bien-être.
Recueillis par Safaa KSAANI CNDH : Pour la promotion des conditions de vie des catégories vulnérables Le Programme d'aide sociale directe contribuera à la promotion des conditions de vie des catégories vulnérables, notamment les enfants, les femmes et les personnes à besoins spécifiques, a indiqué, samedi à Agadir, la présidente du Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH), Amina Bouayach.
S'exprimant lors de la 12ème session ordinaire de l'Assemblée Générale du CNDH, Bouayach a souligné que cette initiative royale aura des impacts positifs à court et moyen termes, en faveur de ces couches sociales, notant que ce programme représente une ceinture de sécurité sociale ayant des retombées tangibles sur l'effectivité des droits dans la vie quotidienne des citoyens et citoyennes.
La protection sociale constitue la base solide sur laquelle reposent d'autres programmes, tels que le soutien scolaire, qui constituent ensemble des approches efficaces pour lutter contre les différents aspects multidimensionnels de la pauvreté, a-t-elle estimé.
Pour rappel, la mise en œuvre du chantier d'aide sociale directe nécessitera un budget de 25 milliards de dirhams (MMDH) au cours de l'année 2024, pour atteindre 29 MMDH annuellement à partir de l'année 2026.
A ce budget, s'ajoutent 10 MMDH alloués annuellement par l'Etat pour la généralisation de la couverture maladie obligatoire aux familles pauvres et en situation précaire, soit environ 40 MMDH d'ici 2026.