L'amélioration de la qualité des apprentissages représente aujourd'hui un défi majeur pour le système éducatif marocain. La sous-performance des élèves est associée à une combinaison complexe des facteurs individuels, familiaux et scolaires, selon le Policy Center for the New South (PCNS). L'amélioration de la qualité des apprentissages constitue un défi majeur pour le système éducatif marocain, qui, d'après de nombreuses évaluations qualitatives et quantitatives, se positionne parmi les moins performants en termes de compétences scolaires, selon le Policy Center for the New South (PCNS) dans un récent Policy Paper intitulé « Exploration multi-niveaux des causes de la pauvreté des apprentissages au Maroc : une approche compréhensive ».
« Les lacunes des élèves marocains sont multiples : difficultés à comprendre et à appliquer des concepts de base en mathématiques, résolution de problèmes complexes, reconnaissance des données graphiques, interprétation des textes et identification des idées principales en lecture, compréhension limitée des concepts scientifiques fondamentaux en sciences », souligne le Policy Paper (PP) élaboré par Aomar Ibourk, Karim El Aynaoui et Tayeb Ghazi, économistes du PCSN.
Ainsi, le Policy Paper montre que plus de 40 % des élèves ne parviennent pas à atteindre le niveau de maîtrise requis en mathématiques, sciences et lecture. « En ce qui concerne les mathématiques et les sciences, il est alarmant de constater que de nombreux élèves rencontrent des difficultés fondamentales. Ils éprouvent des difficultés à comprendre et à utiliser les concepts de base tels que l'addition, la soustraction, la multiplication et la division. Aussi, la résolution de problèmes mathématiques simples impliquant des quantités, des mesures et des relations spatiales leur pose des défis considérables », fait observer le PP. La reconnaissance et l'interprétation des données à partir de graphiques, de tableaux et de schémas simples sont également des compétences qui échappent à cette proportion d'élèves, ajoute le PP.
De plus, la connaissance des propriétés des formes géométriques de base reste un obstacle majeur pour leur progression académique.
Concerne le domaine des sciences, le PP note que les élèves peinent à comprendre les concepts scientifiques fondamentaux, tels que la matière, l'énergie et les systèmes vivants. « Pour ces élèves, l'identification des caractéristiques et des comportements des organismes vivants, ainsi que la reconnaissance des phénomènes naturels de base et de leurs causes demeurent des défis majeurs », peut-on lire dans le rapport du think tank basé à Rabat. Pire, dans le domaine de la lecture, le rapport montre que plus de 40% de ces élèves ne parviennent pas à comprendre et à interpréter des textes narratifs et informatifs de niveau élémentaire. Les élèves ont du mal à identifier les informations explicites dans un texte et à tirer des conclusions basées sur les informations fournies, fait savoir la même source.
Causes de la pauvreté d'apprentissage au Maroc
En se basant sur les données de l'enquête PISA 2018 (Programme for International Student Assessment), le PP met en évidence plusieurs causes de la pauvreté d'apprentissage au Maroc. Tout d'abord, la sous-performance des élèves est associée à une combinaison complexe des facteurs individuels, familiaux et scolaires. « Nos résultats confirment que des variables telles que le genre, l'absentéisme, l'attitude négative envers l'école, le sentiment de malaise à l'école et l'expérience de violence jouent un rôle important dans l'appartenance au groupe des mauvais élèves », souligne l'analyse du PCSN, notant, cependant, que la peur de l'échec ne semble pas exercer d'effet sur cette appartenance, une fois que d'autres variables sont prises en compte.
Par ailleurs, l'étude observe que des niveaux socio-économiques plus élevés, des ressources éducatives familiales plus abondantes et un soutien émotionnel accru des parents sont tous liés à une probabilité nettement moindre d'être classé parmi les mauvais élèves. Ces conclusions confirment l'importance de ces facteurs dans la réussite scolaire, corroborant ainsi les recherches précédentes dans ce domaine, estiment-ils.
En ce qui concerne le parcours scolaire, le PP relève que la fréquentation de l'éducation préscolaire et le redoublement d'une année scolaire ont des effets différents sur la probabilité d'appartenir au groupe des mauvais élèves. D'après cette étude du PCSN, les enfants qui ont bénéficié d'une éducation préscolaire ont une probabilité nettement inférieure d'appartenir à ce groupe, alors que ceux qui ont redoublé une année ou plus présentent une probabilité plus élevée (une autre façon de présenter ce dernier constat est de le décrire comme reflétant la persistance de la contre-performance).
En ce qui concerne les facteurs liés à l'école, le PP montre que les écoles situées dans les zones urbaines ont un pourcentage de mauvais élèves inférieur à celui des écoles rurales. De plus, les écoles privées affichent un pourcentage de mauvais élèves moins élevé que les écoles publiques. Par ailleurs, la présence d'autres écoles dans le voisinage exerce un effet négatif sur le pourcentage de mauvais élèves (grâce peut-être à la disponibilité d'options éducatives supplémentaires, la concurrence entre les écoles, la concentration moins élevée, etc.), tandis qu'un taux d'encadrement élevé est associé à une augmentation de ce pourcentage.
De plus, le manque de matériel pédagogique et le manque de personnel enseignant ont un impact positif sur le pourcentage des mauvais élèves, alerte le PP.
Ces conclusions offrent des perspectives précieuses pour l'amélioration des performances des apprenants en identifiant les leviers potentiels sur lesquels agir, estime le document, préconisant ainsi d'investir dans des interventions ciblées visant à améliorer l'attitude, l'absentéisme, le soutien émotionnel et la prévention de la violence à l'école. Objectif : réduire la proportion d'élèves en difficulté et favoriser leur réussite scolaire.
Le PP recommande également d'accorder une attention particulière à l'égalité des chances éducatives, en veillant à ce que les ressources et les opportunités éducatives soient équitablement réparties, en particulier pour les élèves issus de milieux socio-économiques défavorisés.
En ce qui concerne les établissements scolaires, le PP suggère de prendre des mesures pour améliorer la qualité de l'environnement éducatif. Cela peut inclure l'augmentation des ressources disponibles, l'amélioration de l'encadrement pédagogique, l'investissement dans des équipements pédagogiques adéquats et la mise en place de mécanismes d'assurance qualité pour évaluer et améliorer les performances des écoles.
Enfin, le PP préconise de promouvoir la collaboration entre les différents acteurs du système éducatif, enseignants, parents, décideurs politiques...
A. CHANNAJE La qualité de la formation des enseignants jugée faible La qualité de la formation des enseignants est jugée faible, en grande partie en raison du faible pourcentage d'enseignants ayant suivi une formation adéquate, ressort-il d'un récent Policy Paper du PCSN intitulé « TaRL Maroc : des débuts prometteurs pour un soutien scolaire innovant », publié en juin dernier. La plupart des enseignants sont titulaires de licences générales, plutôt que de licences en enseignement, et même ceux qui ont suivi une formation en éducation ont souvent reçu une formation théorique qui ne leur permet pas de disposer des compétences pratiques nécessaires pour gérer efficacement une classe, précise la même source. En réponse à cette situation, il a été proposé dans la feuille de route de créer un institut de professeurs afin de normaliser la qualité de la formation et d'accréditer les enseignants. Ce nouvel organisme devrait contrôler les contenus et la composition des programmes de formation, et délivrer des certificats d'accréditation qui devraient être pris en compte dans les parcours professionnels des enseignants.