Le Maroc et l'Espagne ont officiellement lancé des pourparlers autour du transfert de la gestion de l'espace aérien du Sahara marocain, selon la réponse du gouvernement du pays ibérique à un sénateur canarien. "Les échanges avec le Maroc sur ce sujet ont commencé", a assuré par écrit la primature espagnole en réponse aux questions du sénateur canarien Fernando Clavijo. A cet égard, les pourparlers concernent la gestion de l'espace aérien et la coordination entre les deux parties afin de parvenir à une plus grande sécurité dans les connexions et à la coopération technique", précise le gouvernement, qui ajoute que « les négociations se conforment au point 7 de la déclaration commune du 7 avril 2022 », dite "feuille de route" de la nouvelle relation entre l'Espagne et le Maroc. Le point 7 stipule que "des pourparlers vont s'engager sur la gestion de l'espace aérien" au-dessus du Sahara. Notons que celui-ci est géré depuis les îles Canaries depuis la Marche Verte. Coopération technique La convention de Chicago de 1944 a reconnu que "chaque Etat a la souveraineté complète et exclusive sur l'espace aérien au-dessus de son territoire". Ce territoire inclut "les régions terrestres et les eaux territoriales y adjacentes qui se trouvent sous la souveraineté, la suzeraineté, la protection ou le mandat dudit Etat". Et c'est ainsi que l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI), relevant de l'ONU a attribué à l'époque la souveraineté aérienne des territoires occupés aux pays colonisateurs, dont celle sur le Sahara à l'Espagne.
Après la récupération de nos provinces du Sud en 1975, l'OACI a décidé de laisser le contrôle aérien de la zone à l'Etat espagnol, puisque l'ONU considère ce territoire comme "non-autonome". En théorie, cet espace aérien relève toujours des autorités espagnoles. Mais dans les faits, les choses sont plus complexes.
A une question parlementaire sur le sujet en 2017, le gouvernement de Mariano Rajoy avait affirmé que "l'Espagne est responsable de la gestion de l'espace aérien au-dessus du Sahara Occidental par décision de l'OACI", tout en reconnaissant que "ENAIRE a signé un accord avec l'ONDA pour la coordination des mouvements d'aéronefs entre les espaces aériens, tels qu'ils existent à travers différents espaces aériens voisins, et ce, sans l'intervention des autorités de l'aviation civile des pays concernés".
Les termes de l'accord entre ENAIRE et l'ONDA n'ont jamais été dévoilés." Il n'y a pas de convention internationale qui, d'une manière générale, régit ce type de cas. En revanche, il y a des accords au cas par cas qui peuvent être signés par les Etats concernés. Ce sont des accords provisoires qui ne règlent pas le litige mais permettent un fonctionnement ordinaire d'ici son règlement définitif ", explique William Woll, avocat spécialisé dans le droit des espaces. Dans le cas du ciel du Sahara, il s'agirait d'un accord de contrôle technique entre les deux établissements publics (ENAIRE et ONDA), sans implication politique, puisque "le cas d'une souveraineté partagée entre deux pays d'un même espace aérien n'existe pas. Cependant, un Etat souverain peut déléguer les services de la circulation aérienne à un autre Etat dans le cas d'une incapacité technique à assurer ces missions. C'est le cas par exemple des îles Tonga et Samoa qui ont délégué le contrôle de la navigation à la Nouvelle-Zélande", analyse un juriste du droit aérien ayant requis l'anonymat.