Les jeunes sont de plus en plus préoccupés par le changement climatique qui menace les océans. Telle est la conviction de Saâd Abid, que nous avons contacté à l'occasion de la Journée internationale des océans, célébrée le 8 juin de chaque année. - Dans quel état se trouvent nos océans ? - Nos océans se trouvent dans un état lamentable et ça ne fait qu'empirer. Il y a énormément de plastique dedans. Selon une étude, la meilleure estimation, datant de 2015, évalue la quantité de plastique à 150 millions de tonnes métriques. Cette valeur devrait atteindre 600 millions de tonnes métriques d'ici 2040 si rien ne change. Rien qu'en Afrique, seulement 4% des déchets sont recyclés. 90% étaient placés dans de mauvais endroits. En cas d'inondations, tout finit dans les océans. Ces derniers souffrent d'acidification. L'océan produit entre 50% et 70% de l'oxygène de la planète et constitue la principale source de subsistance pour plus d'un milliard de personnes, et séquestre jusqu'à 30% d'émissions de CO2. Donc, plus on y jette du plastique, plus on met à mal le processus du phytoplancton (tous les organismes unicellulaires qui se retrouvent dans l'eau, ndlr), qui permet de séquestrer le CO2 et relâcher de l'oxygène en même temps. Si on continue comme ça, les océans vont s'acidifier, les espèces et l'être humain vont disparaître d'ici quelques centaines d'années. C'est un constat alarmiste, mais c'est le cas de le dire. - Ramasser le plastique sur la plage, c'est bien. Mais agir en amont pour qu'il n'y soit pas, c'est mieux. Pensez-vous que les opérations de nettoyage (ramassage de mégots, de plastiques) ne suffisent plus aujourd'hui pour sauver les océans des ravages de la révolution industrielle et des émissions de gaz à effet de serre ? - Il est d'abord primordial de revoir nos modes de production. Le plastique est une invention incroyable pour les industriels, les consommateurs. Aujourd'hui, c'est l'une des principales causes de la pollution des océans. Il faut ensuite vérifier que le taux de recyclage augmente et que les déchets produits ne finissent pas dans les océans. Le nettoyage des plages vient aider en enlevant les déchets qui sont sur une plage. Généralement, entre 70 et 80% de ces déchets proviennent de la mer. Cela vient en même temps sensibiliser et éduquer les gens. On fait ça depuis 12 ans, mais on ne sent pas de différence en termes de propreté sur les plages. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que si on se contente du nettoyage des plages et qu'en parallèle les modes de production ne changent pas, la situation ne va pas s'améliorer. - Quels sont les gestes à adopter au quotidien pour préserver nos fonds marins ? - Primo, ne pas jeter dans les égouts et par terre des déchets car dès qu'il y a de la pluie, tout finit dans les fonds marins. C'est le cas surtout dans les villes qui ne sont pas équipées de stations d'épuration et de tri. Secundo, c'est un message pour les pêcheurs, arrêtez de jeter les piles dans l'océan! Elles sont composées principalement de mercure, ce qui porte atteinte à la perte de biodiversité, au moment où les pêcheurs vivent de la pêche ! - Trouvez-vous que les jeunes sont davantage sensibilisés aux enjeux écologiques ? - De manière globale, c'est clair que cette génération est beaucoup plus sensible aux enjeux du changement climatique. Une chance qu'on n'avait pas quand on était petits. Les jeunes sont aujourd'hui beaucoup plus conscients de la qualité de la nourriture, de l'impact qu'ils ont sur l'environnement...Donc oui, les jeunes sont davantage sensibilisés aux enjeux écologiques. Il faut veiller à ce que tout le monde soit sensibilisé et surtout que tout le monde agisse en faveur de la protection de l'environnement. - Quels programmes pédagogiques en milieu scolaire propose l'association "Bahri" ? - Avant Covid-19, on proposait beaucoup de programmes à des écoliers. On leur parlait des différents projets qu'on menait, notamment le nettoyage des plages, de la durée de vie des déchets, des gestes éco-citoyens à adopter. Ensuite, on les emmenait sur le terrain pour l'expérimenter et ainsi avoir le sentiment d'avoir fait des choses nobles. On accompagne cela par des activités sportives et éducatives pour que ce ne soit pas une corvée. Recueillis par Safaa KSAANI Climat De nouveaux records battus en 2021
Dans un message à l'occasion de la Journée mondiale de l'océan, célébrée le 8 juin, le chef de l'ONU a indiqué que l'Organisation météorologique mondiale a annoncé, le mois dernier, que quatre indicateurs clés sur le climat avaient battu de nouveaux records en 2021 : l'élévation du niveau de la mer, le réchauffement de l'océan, l'acidification de l'océan et les concentrations de gaz à effet de serre. «Il est clair que la triple crise liée aux changements climatiques, à la perte de biodiversité et à la pollution menace la santé de nos océans, dont, en fin de compte, nous dépendons toutes et tous », relève-t-il. Et de rappeler que l'océan produit plus de 50% de l'oxygène de la planète et constitue la principale source de subsistance pour plus d'un milliard de personnes. L'économie bleue emploie quelque 40 millions de personnes. Or, les ressources et la biodiversité océaniques sont mises à mal par les activités humaines. Plus d'un tiers des stocks de poissons dans le monde sont exploités à des niveaux biologiquement non viables. Une proportion importante des récifs de corail a été détruite. La pollution plastique atteint les îles les plus reculées et les fosses océaniques les plus profondes. Les zones côtières qui meurent à cause de la pollution terrestre sont de plus en plus nombreuses. Pour le Secrétaire Général de l'ONU, il est temps de prendre conscience que, pour atteindre les objectifs de développement durable et les objectifs de l'Accord de Paris sur les changements climatiques, il faut agir d'urgence, collectivement, à la revitalisation de l'océan. Cela signifie, selon lui, qu'il faut trouver «un nouvel équilibre dans notre relation avec le milieu marin. Cela signifie aussi qu'il faut travailler avec la nature, et non contre elle, et établir des partenariats inclusifs et diversifiés entre les régions, les secteurs et les communautés afin de collaborer de manière créative et trouver des solutions pour les océans».