En dehors de son absorption éphémère de quelques produits planants, le batteur historique des Rolling Stones ne figure dans aucun épisode des frasques retentissantes -drogues, interpellations policières, infidélités, divorces, dégradations de chambres d'hôtels...- de ses camarades de la formation, notamment Mike Jagger et Keith Richards. Lui, après un enregistrement ou une tournée, il retourne auprès de sa femme et de son unique fille. Il se retire dans son domaine anglais du Devon où l'attendent ses pur-sangs arabes. Mieux : après les tumultes sonores et le blues-rock souvent survolté des Stones, il reprend ses activités jazz, se produisant avec son propre groupe dans des clubs intimistes de Londres. Une double-vie musicale, le parfait équilibre pour un artiste qui suggère l'apaisement. Batteur autodidacte Disparu le 24 août à quatre-vingts ans, Charlie Watts ne laisse –individuellement- pas l'image de la rock star. Il était l'employé aux baguettes. Il joue ce qu'il lit ou déchiffre, n'en rajoute pas, en usant d'une rythmique binaire et hautement efficace. Les solos de batterie l'indisposant, il n'en fait pas des caisses. Il réfute aussi le terme «jazzman» qu'on lui ajuste pour mieux le différencier des autres membres du groupe. Ce qui le pousse à trancher : «Je ne suis jamais allé dans une école pour apprendre à jouer du jazz. Ce n'est pas ce que j'aime. Ce que j'aime dans le jazz, c'est l'émotion.» En 1961, il intègre The Blues Incorporated d'Alexis Korner qui voit défiler Mick Jagger, Ginger Baker et Jack Bruce (futurs fondateurs du trio Cream avec Eric Clapton). Batteur autodidacte, Watts rejoint les Rolling Stones de Brian Jones en 1963 en même temps que bill Wyman qui claque la porte en 1993, soit un an après leur naissance. Le line-up comprend alors Ian Stewart, Mick Jagger et Keith Richards. En 1969, Brian Jones est écarté et c'est Charlie Watts qui le lui annonce. Il meurt la même année. Il est remplacé par Mick Taylor, venu de chez John Mayall. En 1974, il est à son tour invité à aller voir ailleurs. C'est Ronnie Wood, un ancien des Faces, qui poursuit l'aventure jusqu'à aujourd'hui. Depuis 1993, les Rolling Stones se résument au quartet Jagger-Richards-Wood-Watts avec la présence du bassiste Darryl Jones jamais déclaré membre du groupe. Charlie Watts réalise une quinzaine d'albums solos confidentiels entre 1981 et 2017. De septembre à novembre prochains, les trois autres papys du rock et Darryl Jones, rejoints par le batteur Steve Jordan, un fidèle de Keith Richards, sillonneront les scènes américaines. Sous le tendre regard de Watts. A.H.