Le souk constitue un levier de développement économique et un moyen de mobilisation de ressources financières au profit des communes qui les abritent. Cependant, ils souffrent de plusieurs difficultés de gestion et de logistique, selon le CESE. Lieu de vie, d'échange et de partage d'informations par excellence, le souk demeure le lieu privilégié de la rencontre de la vie rurale marocaine. Historiquement, le souk est un lieu de rassemblement des habitants ou des membres des tribus d'une même régions ou localité, qui se tient chaque semaine. Le souk prend souvent le nom du jour de la semaine et de la région, de la localité et de la tribu où il se tient, souligne le CESE (Conseil Economique, Social et Environnemental) dans une auto-saisine intitulée : « Pour une politique urgente de rénovation et de développement des souks hebdomadaires en milieu rural ». Réalisée sur la base d'une approche participative impliquant l'ensemble des parties prenantes et sur l'organisation d'une visite de terrain à la région de Casablanca-Settat, cette auto-saisine, fraîchement publiée, fait état de 889 souks hebdomadaires sont opérationnels en milieu rural 822 sont opérationnels et 67 non-opérationnels. Elle fait état aussi de l'absence d'études académiques et sectorielles actualisées sur les souks (la dernière étude de la Direction générale des collectivités Territoriales (DGCT) date de 2013 et la dernière enquête du HCP a été réalisée entre 2010-2011. Fonction économique/commerciale Il faut aussi souligner que c'est la fonction commerciale et économique qui « domine la majorité des souks hebdomadaires, car elle se caractérise par l'échange d'importants flux monétaires le jour du souk, découlant essentiellement de la vente des bétails et du commerce divers ». Le CESE estime également que le souk hebdomadaire rural établit généralement des liens avec les réseaux des marchés les plus proches et les centres avoisinants de collecte et de stockage des produits ruraux locaux. De ce fait, il contribue à la dynamisation des communes rurales et des petites agglomérations limitrophes. Les données du CESE indiquent, en outre, que la région de Marrakech-Safi abrite 161 souks, soit 18,1% du total des souks hebdomadaires au Maroc, tandis que la région de Dakhla-Oued Ed-Dahab ne dispose d'aucun souk hebdomadaire rural. A l'échelle locale, 889 souks hebdomadaires sont recensés, dont 822 opérationnels répartis sur 792 communes rurales, soit 61,8%. Les 490 communes rurales restantes ne disposent d'aucun souk. « En effet, dans ces communes, certains souks sont abandonnés, ou ne sont pas fonctionnels. D'autres nécessitent une mise à niveau », souligne-t-on. Par contre, les flux financiers, qui circulent le jour du souk, ne sont ni maîtrisables ni quantifiables. « Avec un nombre de visiteurs qui avoisine en moyenne 3000 visiteurs par souk, soit 2.600.000 visiteurs par semaine, au niveau national, les souks hebdomadaires génèrent des recettes importantes qui varient selon la vocation du souk, sa taille et son emplacement », note la même source. Faible contrôle sanitaire des abattoirs Dans la même rubrique des dysfonctionnements, le CESE indique que 689 abattoirs existants ont une capacité avoisinant les 68 mille tonnes de viande par an. Il relève, cependant, un faible contrôle sanitaire à ce niveau, puisque près du tiers des ne sont pas couverts par les services vétérinaires. Le Conseil constate aussi le faible intérêt accordé par les stratégies nationales et régionales à la problématique des souks, à leur modernisation et à leur rôle dans le développement durable, d'autant plus qu'on note l'absence d'une stratégie dédiée à ces espaces portée par l'ensemble des départements ministériels concernés. Le Plan Maroc Vert pointé du doigt En outre, les initiatives entreprises en faveur des souks hebdomadaires restent limitées et souffrent d'un manque de convergence et d'intégration au niveau régional, d'autant plus que le Plan Maroc vert n'a pas prévu parmi ses actions prioritaires la modernisation du souk hebdomadaire. « La nouvelle Génération Green 2020-2030 a inscrit dans ses objectifs la modernisation de 12 souks de gros et la qualification des marchés hebdomadaires. Il demeure que les trois initiatives proposées en faveurs du développement du souk en milieu rural ne sont pas encore traduites sur le terrain par des plans d'action opérationnels. Elles restent discontinues et n'ont pas fait l'objet d'une coordination et d'une concertation élargie avec les partenaires clés et les bénéficiaires directes à savoir les usagers du souk et les communes », déplore le CESE. On estime, d'autre part, que près du tiers des souks gérés par affermage ne sont pas alimentés en eau et ne sont pas raccordés à un réseau d'assainissement, 45 % ne disposent pas d'éclairage et 15% n'ont pas de murs de clôture. Les cinq pistes proposées Au regard de son potentiel de développement socioéconomique, le CESE estime que le souk devrait être repensé selon une approche territoriale intégrée. A ce titre, le Conseil identifie certaines pistes s'articulant autour de cinq axes. D'abord, ériger les souks hebdomadaires parmi les priorités de l'Etat et des collectivités territoriales. Pour cela, le Conseil recommande, entre autres, la mise en place, à court terme, d'une vision unifiée dédiée au développement des souks hebdomadaires en milieu rural, tout en respectant les particularités provinciales et régionales, et en tenant compte des évolutions récentes de leurs fonctions et leur rôle, en tant que service public de proximité. Pour le 2 ème axe, le CESE suggère d'asseoir une gestion rénovée des souks en milieu rural qui favorise une réelle implication de tous les acteurs concernés. Pour celà, il suggère, entre autres, de repenser le positionnement géographique des souks hebdomadaires en vue de rentabiliser les investissements mobilisés à moyen et long terme. Pour le 3 ème axe, le Conseil recommande de doter les souks en infrastructures et équipements modernes en phase avec les dynamiques du développement et de la dématérialisation du service public. Pour le 4ème axe, il suggère de rendre le souk hebdomadaire un levier majeur qui contribue efficacement à la promotion du développement territorial et à l'ancrage de la population locale. Et ce, via, la diversification des recettes de la commune... Enfin, pour le 5 ème axe, le Conseil recommande de donner un nouvel élan à la recherche et la production de connaissances sur les souks en milieu rural. Il recommande, à cet égard, de mener des études approfondies sur les souks hebdomadaires en milieu rural. Repères Le souk, un espace de vie enraciné au Maroc D'après le CESE, le souk demeure le lieu privilégié de la rencontre de la vie rurale marocaine. Historiquement, le souk est un lieu de rassemblement des habitants ou des membres des tribus d'une même régions ou localité, qui se tient chaque semaine. Le souk prend souvent le nom du jour de la semaine et de la région, de la localité et de la tribu où il se tient. Le terme souk « vient de l'arabe (سوق) et signifie «marché». Il a été introduit tardivement en France (1876) où il désigne un marché découvert et /ou couvert. Jean-François Troin, auteur d'une étude sur les souks marocains a distingué différentes formes de ces espaces, avec plusieurs fonctions. Selon lui, le souk en milieu rural permettait à la population de s'y rendre pour vendre ses produits, acheter des denrées nécessaires pour subvenir à ses besoins durant toute la semaine, régler ses différends, rencontrer famille et amis, etc. 313 millions de DH, la recette annuelle des souks L'étude menée par le ministère de l'Intérieur en 2013, estime la recette annuelle des souks à environ 313 millions de DH, dont 95% provenant de la location, avec une moyenne de 400.000 Dh par souk. Les recettes de 70% des souks, ne dépassent pas 200.000 Dh/ an et les coûts de location varient entre 2 000 Dhs et 7.000.000 de DH, selon le type de souk. Ce que dit la loi n° 54-05 Conformément à la loi n° 54-05 relative à la gestion déléguée des services publics, la commune peut déléguer la gestion du souk hebdomadaire, comme service public dont elle a la responsabilité, pour une durée limitée, à une personne morale de droit public ou privé. La commune lui reconnait le droit de percevoir une rémunération sur les usagers et/ou de réaliser des bénéfices sur ladite gestion.