Les Algériens ne croient pas aux mesures de la présidence et restent déterminés à reprendre le Hirak. Au deuxième anniversaire du Hirak algérien, chacune des parties cherchait à marquer la détermination de ses convictions. Le pouvoir par la voix du président, Abdelmadjid Tebboune, de retour au pays, a annoncé la grâce des détenus du Hirak et la dissolution du parlement. Côté Hirak, de nombreux Algériens affichaient encore leur détermination à investir les artères des villes, pour réitérer leurs revendications d'un changement radical pour lequel ils ont manifesté 54 semaines durant depuis le 22 février 2019, à savoir mettre table rase avec le passé. Les manifestants en lançant leur mouvement il y a deux années, et qui n'a été interrompu que pour cause du Covid-19, exigeaient et exigent toujours une désintégration radicale du système politique algérien et non une réforme qui sacrifierait quelques têtes sur l'autel de l'apaisement. Pour preuve, près des deux tiers des électeurs algériens ont boudé les urnes de l'élection présidentielle qui a porté Tebboune en décembre 2019 au palais d'El Mouradia. Ce chiffre est réduit de moitié presque, une année plus-tard, lors du référendum pour la constitution. A peine 24% des électeurs s'étaient déplacés aux bureaux de vote. En chassant Bouteflika, le Hirak ne voulait pas d'un autre cacique du pouvoir en substitut, ni d'une mesure placébo en guise de réforme constitutionnelle. Dans les deux consultations, le Hirak a montré son rejet en boycottant les urnes respectivement aux trois cinquièmes et aux trois quarts. Le pouvoir n'a pas bien décrypté le message et a tenté d'amadouer le mouvement d'abord par une première amnistie pour les détenus du Hirak. Juste après son élection Tebboune a remis en liberté aux premiers jours de 2020, 76 militants du mouvement contestataire dans une sorte de main tendue au Hirak. La rupture consommée Une mesure juste soporifique puisque, juste après, la main tendue s'est muée en une poigne de fer. Militants, opposants politiques, journalistes, blogueurs et internautes ont constitué une cible du pouvoir qui a renoué avec les arrestations et les poursuites judiciaires. Les procès se sont enchaînés, les peines d'emprisonnement aussi. Une année après la première mesure de grâce, voilà que Tebboune remet ça et annonce une nouvelle charrette de relaxation enveloppée d'un remaniement gouvernemental, d'une dissolution de l'assemblée et des élections législatives anticipées. Le Hirak mordra-t-il à l'hameçon ? Plus qu'improbable. Pour plus d'un Algérien, la rupture est consommée entre le pouvoir et le peuple. Plusieurs observateurs pensent que le pouvoir algérien continue sa politique unilatérale et cherche à se confectionner une majorité parlementaire sur mesure. Et si les Algériens ont plus que largement boycotté la présidentielle et la constitutionnelle, tout annonce qu'il en serait de même pour d'éventuelles législatives. Le ton a été donné mardi dernier à Kherrata, point de départ de la contestation, à l'Est algérien, et les appels sont lancés pour poursuivre, ce lundi, le mouvement ou du moins le commémorer. Ali BENADADA