Le 11 février 1990, alors que Nelson Mandela fraîchement libéré de 27 années d'emprisonnement prononce son premier discours en public sur le balcon de l'Hôtel de Ville du Cap, personne ou presque ne prête attention au fringant jeune homme, barbu et cravaté, qui lui tend le micro. Agé de 37 ans, le regard plein d'étoiles et l'ambition débordante, le jeune Matamela Cyril Ramaphosa, incarne à l'époque l'espoir d'une Nation Arc-en-ciel exorcisée des démons de l'Apartheid et assagie par les décennies d'adversité et d'injustice. En février 2018, après avoir gravi les échelons de la gouvernance dans son pays, en passant par le syndicalisme, la politique, puis par le monde du business et des affaires qui en feront le premier milliardaire noir d'Afrique du Sud, Ramaphosa a pu se hisser au sommet de l'Etat, en s'imposant comme le remplaçant légitime de son corrompu prédécesseur, Jacob Zuma. Au cours de ses trois années de présidence marquées par une crise protéiforme, ainsi que par l'isolement diplomatique de son pays autrefois influent à l'échelle continentale, Ramaphosa s'est fait le chantre d'une ligne dure et des plus hostiles à l'égard de la cause nationale du Maroc. Défenseur inconditionnel des thèses séparatistes et allié de la première heure de l'Algérie dans sa campagne de sape de notre intégrité territoriale, il a montré le pire visage que les marocains pouvaient espérer d'un supposé héritier de Nelson Mandela et des anciens combattants de l'ANC auxquels le Royaume avait ouvert ses frontières en les armant, en les entraînant et en leur servant de base arrière. Mais voilà que le pragmatique et néanmoins «bipolaire» Cyril Ramaphosa confronté dans son pays à une grave crise politique et en proie à un vote de défiance qui vient d'être reporté au mois de février 2021, semble être revenu à la raison de la réalpolitique. D'abord en s'abstenant de condamner l'opération de nettoyage du poste frontalier d'El Guerguerat, puis en suggérant lors de la 14ème session ordinaire de l'Union Africaine (UA) qu'il préside, que l'affaire du Sahara avait pour cadre de traitement exclusif la troïka établie par la résolution 693 adoptée lors du sommet de l'UA de juillet 2018 à Nouakchott. Soufflant le chaud et le froid, Ramaphosa n'a cependant pas omis de jeter un petit os à ses alliés algériens et polisariens en susurrant la nécessité de la tenue d'un «référendum d'autodétermination» au Sahara... Bipolaire on vous dit ! Majd El Atouabi