En partenariat avec la Fondation Friedrich Ebert, l'association Jossour Forum des femmes marocaines continue son cycle de tables rondes. En présence de Rhizlane Benachir, responsable ressources humaines à l'Agence de développement social et coordinatrice nationale de Jossour, de Ali Bouabid, délégué général de la Fondation Abderrahim Bouabid, de Malika Ghefrane, professeur universitaire et conseillère Genre auprès d'Aster International en France, de représentants de plusieurs associations féministes, le débat a mis en exergue les mesures qui devront être introduites par le projet pour garantir la représentativité des femmes dans les institutions prévues, notamment régionales et locales. Grâce aux diverses interventions, la rencontre a permis de dresser l'état des lieux au niveau du modèle de régionalisation avancé, d'apprécier les avancées réalisées et d'identifier les obstacles persistants. Un vrai moment de débat où les femmes présentes n'ont pas tari de recommandations pour l'avenir. Un enjeu de citoyenneté Pour Ali Bouabid, la réussite du projet est fortement liée à l'émergence d'élites locales femmes/hommes, animées d'une vision prospective et aptes à assurer une gestion locale répondant aux normes de rigueur, d'efficacité et d'ouverture. Cela permettra d'atteindre les résultats escomptés en termes de développement équitable et durable. La réussite du projet de régionalisation est effectivement liée à l'intégration du potentiel que représentent les femmes au niveau des régions. Ce potentiel féminin offre de grandes opportunités pour la réalisation du projet de régionalisation sur des bases solides. «La régionalisation touche la citoyenneté dans son ensemble. Tout projet de ce type a besoin de s'inspirer de la réalité» explique le délégué général. Il ajoute qu'il s'agit d'un enjeu de citoyenneté pour un pays comme le Maroc, qui aspire à la démocratie. Par ailleurs, si le projet de régionalisation devant déboucher sur une plus grande autonomie des entités territoriales est censé se traduire par le renforcement de la décentralisation avec une plus grande responsabilisation des acteurs locaux, Ali Bouabid estime qu'actuellement, le niveau de décentralisation régionale est trop faible. «Pour ce faire, le Maroc a besoin de nouveaux procédés démocratiques. Cet équilibre ne peut se faire qu'avec la réorganisation des pouvoirs. On a besoin d'assimiler le concept de l'autonomie avant de parler de régionalisation» ajoute-t-il. Il traite également de la question du quota et remet tout le processus en question. «Quel a été le résultat de cette politique du quota dans les listes électorales ? Rien. A présent, on a besoin d'être mieux éclairés pour les étapes suivantes. 10% seulement du chantier de régionalisation est fait. On est au stade embryonnaire. L'Etat doit donc sérieusement suivre le déroulement du projet et être conscient, je le répète, qu'il s'agit d'un enjeu de citoyenneté», prévient Ali Bouabid. Pour plus d'égalité «Dans le projet de régionalisation avancée, les femmes doivent s'inscrire dans un processus évolutif, porter de véritables projets économiques et en faire de véritables entités plus productives», souligne Malika Ghefrane, professeur universitaire. Elle ajoute que plusieurs mécanismes doivent être prévus pour redresser les inégalités existantes et faire face aux besoins spécifiques de toutes les catégories de la population, en particulier des femmes. Les intervenants de la table ronde ont insisté sur la place qu'occupera la femme dans le tissu social, local et régional et ont relevé plusieurs points pour mieux valoriser l'apport et la contribution économique et sociale de la gent féminine. «Les femmes ont le droit d'être hissées à un niveau plus décisionnel de la productivité et du rendement, au-delà de celui de cible directe de toutes les activités génératrices de revenus» explique l'universitaire. Pour les femmes présentes, le projet de régionalisation avancée est sensé tenir compte des impératifs de la bonne gouvernance territoriale, des spécificités et des potentialités propres à chacune des régions, ainsi que des besoins de leurs populations respectives en matière de développement. Il permettra de préserver le multiculturalisme qui caractérise le Maroc et d'œuvrer pour l'éradication des inégalités régionales. Avec la région, le citoyen et la citoyenne doivent ainsi être reconnus, aussi bien en tant qu'individus qu'en tant qu'acteurs, pour leur avenir, avec le concours de représentants proches. Cette proximité constitue la voie pour mettre en œuvre une gestion participative et responsable de la vie locale. De leur côté, les associations féministes comptent s'adapter aux nouvelles exigences générées par le schéma de fonctionnement de la société qui découlera de ce projet de régionalisation. «Les femmes ont besoin d'être soutenues par des politiques plus affirmées. Elles sont capables de faire la différence grâce à leurs compétences» insiste Malika Ghefrane. Elle précise que le projet de régionalisation offre de grandes opportunités pour les femmes. Contribuer en tant que composante des élites locales à tous les niveaux du développement sera l'occasion d'améliorer ses conditions de vie et de prouver au monde entier ses compétences. Pour clore le débat, Ali Bouabid précise que le discours féministe est ainsi appelé à s'adapter aux nouvelles données tout en veillant à ce que les droits des femmes et le principe d'égalité soient intégrés dans la dynamique que connait le Maroc aujourd'hui et principalement à travers les réformes politiques. «Il faut aujourd'hui redéfinir les priorités des femmes et leurs modes d'intervention au regard de la phase historique que vit actuellement le pays», ajoute-t-il. Une recommandation que tous les intervenants ont vivement saluée, en attendant la prochaine table ronde au sujet du code de la famille. Un grand débat en perspective…