Les banques centrales ont une relation complexe avec l'inflation. A ce titre, la Banque d'Angleterre a maintenu la politique monétaire la plus accommodante de son histoire alors même que l'inflation a dépassé son objectif tous les mois à partir de 2009 jusqu'en novembre dernier. Elle prend aujourd'hui des positions de plus en plus belliqueuses même si l'inflation se rapproche de son plus faible taux post- Lehman. Du côté des Etats-Unis, nous allons savoir au cours de la semaine si la Réserve fédérale était affectée par la montée de l'inflation. A moins d'avoir fait un demi-tour comme celui exécuté par la BoE, Janet Yellen, la présidente de la Fed, sera dans la position opposée: soutenir activement un assouplissement de la politique monétaire à travers le plan d'achats d'obligations devant une inflation galopante. La hausse de l'inflation américaine n'est pas extrême, mais la hausse de l'indice des prix à la consommation de 0,4% était deux fois plus élevée que les prévisions des économistes, tandis que les prix de base, hors alimentation et énergie, ont enregistré la plus forte hausse depuis Octobre 2009 (par coincidence, la dernière fois où l'inflation britannique était aussi basse). L'inflation globale US est de retour à son niveau de 2% par an. Les banques centrales ne devraient pas fonder leur politique sur les fluctuations de l'inflation de mois en mois. Il y a d'autres signes de tension. Les données inquiétantes sur l'emploi, par exemple, ont découragé les travailleurs de retourner sur le marché du travail. Le taux d'emploi a déjà chuté en dessous du niveau auquel la Fed avait entamé son cycle de resserrement en 1994. Et il n'est que légèrement supérieur au niveau atteint en 2004 au lancement du grand cycle monétaire suivant. La volatilité des marchés financiers s'est dissipée, suscitant des craintes de complaisance. Les emprunts bancaires US se sont également redressés. Mais les permis de construire et les mises en chantier ont fortement reculé, plaidant cette fois pour la poursuite d'une politique monétaire très accommodante. Le Fed pourrait en outre revoir à la baisse sa prévision de croissance du PIB pour 2014, un autre facteur favorable à un statu quo prolongé sur les taux. Utilement pour les « colombes », la Fed préfère une mesure alternative d'inflation qui est généralement inférieure au prix à la consommation. Les marchés obligataires ne se contentent pas d'observer les données, mais ils décortiquent la moindre nuance dans les propos de Janet Yellen. Les prix à terme augmentent les chances d'une hausse des taux en mars l'année prochaine, à plus de 20%. Pourtant, alors que les obligations à court terme ont été vendues en prévision, le rendement des obligations à 30 ans demeure bien en dessous de son niveau du début de l'année. La hausse des taux peut être imminente, mais la destination finale n'est pas aussi élevée ❚