Faux pass vaccinal, tests PCR falsifiés... Les délits liés à la fraude des documents sanitaires se multiplient et diffèrent selon les besoins. Les services de la police judiciaire ont traités dernièrement pas moins de 125 affaires relatives à la falsification de documents sanitaires liés à Covid-19 ; dont près de la moitié dans la ville d'Agadir ( 62 ). C'est qu'on apprend d'un récent bilan rendu public par la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN). Arrêté au 3 septembre 2021, ce nouveau bilan fait état de multiples saisies dont 445 faux tests PCR, 23 faux pass vaccinaux et 35.777 tests rapides de dépistage Covid-19. Des opérations qui ont conduit à l'interpellation de 259 personnes, dont 250 pour falsification de tests PCR et pass vaccinaux et 9 pour le trafic de kits de tests rapides. Parmi les 250 individus appréhendés, 188 ont été interceptés au niveau des postes-frontières, ajoute la même source. Laboratoires privés, médecins, infirmiers, aides-soignants et autres corps de métiers sont impliqués dans cette fraude. Le dernier réseau en date a été démantelé à Oujda. Une nouvelle affaire qui implique trois médecins, quatre infirmiers et une étudiante stagiaire. Falsifiant une centaine de tests PCR, les prévenus ont été arrêtés par la police judiciaire et une somme d'un million de dirhams saisie. Lutte acharnée Rappelant que le Ministère public a adressé, vendredi 27 août, aux procureurs généraux et aux procureurs du Roi, une circulaire au sujet de la lutte contre la fraude des documents sanitaires. Incitant les autorités judiciaires à mener une action vigoureuse contre la falsification des documents relatifs à Covid-19, la présidence du ministère public en appelle à la vigilance pour détecter les éventuels cas de fraude. Décidé à traquer les réseaux de ce trafic grandissant, le Ministère public a appelé la police judiciaire « à recourir à tous les moyens appropriés pour détecter la fraude, ouvrir des enquêtes et à faire preuve de fermeté à l'encontre des personnes impliquées dans ces affaires ». Des actes et des délits qui, en plus d'être incriminés par la loi, « sapent les politiques publiques destinées à juguler la propagation de la pandémie, particulièrement les efforts d'élargissement des catégories bénéficiaires de la vaccination et de prévention des déplacements en infraction avec les règlements en vigueur », note le Ministère public dans sa circulaire. Qu'en dit la loi « En effet, la falsification du pass vaccinal et des tests PCR et leur utilisation peuvent être qualifiées de Faux et usage de faux selon la loi marocaine », note Réda Mesnaoui, avocat au barreau de Casablanca. Selon le code pénal marocain, l'article 351 précisément, le faux désigne toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie dans un écrit par un des moyens déterminés par la loi. Quant à l'usage de faux, c'est le fait d'exploiter un faux en toute connaissance de cause. Et ceci dans l'objectif d'avoir les mêmes effets qu'avec la pièce originale. Une définition claire qui permet de qualifier la fraude du pass vaccinal et du PCR de « Faux et usage de faux ». « Notons toutefois que le législateur marocain fait la distinction entre le faux en écritures publiques et authentiques, celui en écritures privées, de commerce ou de banque et les faux commis dans certains documents administratifs et autres certificats », précise l'avocat. Passible d'emprisonnement et d'amende, ce délit est incriminé par l'article 360 du code pénal. Ce dernier stipule en effet que « Quiconque contrefait, falsifie ou altère les permis, certificats, livrets, cartes, bulletins, récépissés, passeports, ordres de mission, feuilles de route, laissez-passer ou autres documents délivrés par les administrations publiques en vue de constater un droit, une identité ou une qualité, ou d'accorder une autorisation, est puni de l'emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de 200 à 1.500 dirhams ». Des peines qui peuvent être doublées l'interdiction de l'un ou plusieurs des droits mentionnés à l'article 40, pendant cinq ans au moins et dix ans au plus (Droits civiques, civils ou de famille ). Peine de prison Egalement coupable, celui qui fait usage de faux est puni par la loi marocaine. Ainsi selon l'article 361, « Quiconque se fait délivrer indûment ou tente de se faire délivrer indûment un des documents désignés à l'article précédent, soit en faisant de fausses déclarations, soit en prenant un faux nom ou une fausse qualité, soit en fournissant de faux renseignements, certificats ou attestations, est puni de l'emprisonnement de trois mois à trois ans et d'une amende de 200126 à 300 dirhams ». De lourdes peines qui ne sanctionnent pas uniquement les délits mais aussi l'attention de les commettre. « Selon le même article, la tentative est punie comme le délit consommé. Les mêmes peines sont appliquées à celui qui, sciemment, fait usage desdits documents contrefaits, falsifiés ou altérés et à celui qui fait usage d'un des documents visés à l'alinéa premier », nous explique Maître Mesnaoui. Dans le cas précis des pass vaccinaux et des tests PCR, le code pénal a de quoi qualifier « un faux sanitaire ». « Le législateur a désigné ce genre de délit dans le code pénal. L'article 364 stipule que tout médecin, chirurgien, dentiste, officier de santé ou sage-femme qui, dans l'exercice de ses fonctions et pour favoriser quelqu'un, certifie faussement ou dissimule l'existence de maladie ou infirmité ou un état de grossesse, ou fournit des indications mensongères sur l'origine d'une maladie ou infirmité ou la cause d'un décès, est puni de l'emprisonnement d'un à trois ans, à moins que le fait ne constitue l'une des infractions plus graves prévues aux articles 248 et suivants », nous explique Réda Mesnaoui. De lourdes peines de prison doublées d'amendes qui devraient dissuader les fraudeurs de pass et de test ainsi que leurs clients potentiels. Opter pour la vaccination et le dépistage dans le respect du règlement serait ainsi beaucoup moins risqué... A bon entendeur !