JEUDI 31 OCTOBRE, LES CHEFS DE FILE DE L'ISTIQLAL et de l'USFP ont tenu une conférence de presse pour annoncer solennellement la version 2013 de la Koutla, la troisième du genre. Une Koutla à deux. Ni Hamid Chabat ni Driss Lachgar, respectivement secrétaire général des istiqlaliens et premier secrétaire des socialistes, ne semblent vouloir pour l'instant aller plus loin dans la coordination avec les formations qui se placent dans l'opposition parlementaire ou extra parlementaire. Quand bien même l'auraient-ils voulu. Deux petits partis de gauche, les travaillistes et les congressistes, qui avaient quitté la matrice socialiste, ont déjà réintégré le bercail. Les anciens communistes du PPS, qui avaient fait un long parcours avec la Koutla version deux, sont en sainte alliance avec les islamistes au sein du gouvernement. Avec les libéraux de l'Union Constitutionnelle restés en rade de la nouvelle majorité où se trouve naturellement leur place, ça ne ferait pas sérieux. Le Parti Socialiste Unifié de Nabila Mounib est pour l'instant dans un autre trip. Avec les salafistes ou les intégristes d'Al-adl wa Al-ihsane, il n'en n'est pas question. Que reste-t-il ? Le groupuscule d'Annahj Addimocrati. Les incurables gauchistes, style les années soixante-dix, jouent dans la gamme du radicalisme. Va donc pour une « Koutla » à deux. MAIS MÊME À DEUX, CE N'EST PAS GAGNE d'avance. Au sein de l'Istiqlal, Hamid Chabat a fort à faire avec les dépités du dernier congrès qui a créé une véritable rupture avec l'istiqlalisme traditionnel, familial et urbain ainsi qu'avec ceux qui n'en reviennent pas encore que leur parti ait quitté le gouvernement. Versant USFP, Driss Lachgar a maille à partir avec le courant d'Ahmed Zaidi, chef du groupe parlementaire. Ce courant, influent au sein des députés, ne semble pas concerné par la démarche. Il affirme même n'être pas au fait de ce qui se tramait. En vérité, il ne croit pas à la démarche. Or, qu'est ce qu'un parti opposant qui n'a pas la maîtrise totale de ses parlementaires ? Un des animateurs de ce courant, le député Hassan Tarik, ne croit pas aux approches nostalgiques. Mais il ne voit pas d'inconvénient à une action commune qui renforcerait l'équilibre institutionnel d'autant plus possible qu'un rééquilibrage des rapports de force avec le PJD s'est réalisé avec la crise gouvernementale provoquée par l'Istiqlal ainsi qu'avec les régressions du « printemps arabe ». Pour faire l'addition et retenir la somme de l'opération, il faut croire que personne, même Lachgar et Chabat, surtout eux, ne se racontent des histoires. Tout au plus, travaille- t-on, dixit un dirigeant socialiste, à « une plateforme d'orientation qui a pour point de départ l'évaluation et l'analyse de la situation générale actuelle sur les plans politique, économique, social, culturel et environnemental afin de procéder à une analyse qui va au-delà de la critique du gouvernement Benkirane, qui est [à ses yeux] un gouvernement accidentel. » Pour dire les choses autrement, l'action commune Istiqlal–USFP est une nouvelle Koutla, mais sans le nom et, surtout sans illusions.