Mouammar Kadhafi exhorte ses partisans à "triompher des ennemis", tandis que ses opposants progressent sur le terrain et que pressions et sanctions internationales contre le chef d'Etat libyen se multiplient. "Nous combattrons s'ils le veulent", a déclaré vendredi le leader de 68 ans alors que l'est du pays est contrôlé par ses adversaires et que Tripoli est le théâtre d'affrontements. Des quartiers semblaient désormais aux mains des opposants dans la capitale qui a longtemps été considérée comme le bastion du régime, avec Syrte la ville natale du "Guide". "On n'arrête pas d'entendre des coups de feu", a témoigné une habitante de la capitale libyenne. "Je pense que la révolte a gagné Tripoli. Si vous allez sur la place Verte, vous trouverez de nombreux partisans de Kadhafi. Mais dans d'autres lieux (de la capitale), il y a des manifestants anti-Kadhafi" a déclaré un habitant du centre-ville. Al Djazira a fait part de deux morts et de plusieurs blessés lors d'échanges de coups de feu dans plusieurs quartiers. Al Arabiya fait part d'un bilan de sept morts dans la capitale. Saïf al Islam, fils du dirigeant libyen, a minimisé vendredi l'étendue des combats entre partisans et adversaires du régime et a indiqué qu'il espérait un cessez-le-feu négocié dans les villes de Misrata, troisième ville du pays, et de Zaouiya. En revanche, "à part à Misrata et à Zaouiah, tout est calme", a-t-il déclaré. Selon des témoins, le centre de Zaouiah, situé à 50 km à l'ouest de la capitale, serait sous le contrôle des rebelles, selon un témoin. Les récits des déplacés confirment la violence des combats dans cette ville portuaire où se trouvent des raffineries de pétrole. "Il y avait des cadavres partout. (...) C'est une guerre au sens propre du terme", a déclaré Akila Jmaa, qui a réussi à fuir Zahouiay et à gagner Ras Jdir, à la frontière tunisienne. SANCTIONS Hors de Libye, la pression s'accentue sur le régime de Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis 1969. Le président américain Barack Obama a imposé vendredi des sanctions en promulguant par décret-loi le gel des avoirs du clan Kadhafi. Selon Washington, le gouvernement libyen continue "de violer les droits de l'homme". Un projet de résolution de l'Onu estime que les violences commises contre des civils en Libye pourraient constituer des "crimes contre l'humanité" justifiant des poursuites de la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye. Navi Pillay, haut commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, s'est prononcée en faveur d'une intervention internationale pour faire cesser les massacres. Selon elle, des milliers de personnes risquent encore de mourir ou d'être blessées dans les violences exercées contre les manifestants anti-gouvernementaux. L'Union européenne prendra une décision en milieu de semaine prochaine au plus tard sur l'imposition de sanctions à la Libye. Une réunion technique qui s'est tenue vendredi à Bruxelles a toutefois permis d'arrêter une liste de sanctions : gel des avoirs financiers, interdiction de visas et embargo sur les armes ainsi que sur les matériels de gestion des troubles à l'ordre public tels que les gaz lacrymogènes. La délégation libyenne à la Ligue arabe, dont le siège se trouve au Caire a annoncé qu'elle rejoignait le camp des insurgés, et a dénoncé les "crimes abominables" commis contre des civils sans armes. Les ambassadeurs de Libye en France et auprès de l'Unesco, basée à Paris, ont également démissionné. Il est difficile d'évaluer le soutien dont bénéficie encore le régime ainsi que le degré de fidélité de l'armée, des milices et des mercenaires. Un ancien allié de Kadhafi prédit une fin de règne "à la Hitler" pour Kadhafi, en référence au suicide du Führer dans son bunker berlinois à la fin de la deuxième guerre mondiale. (Reuters)