Malgré des réformettes, la tension perdure entre l'administration qui se veut moderne et le secteur privé qui crie à la corruption. Les relations entre l'Administration des douanes et impôts indirects (ADII) et le secteur privé n'ont jamais été au beau fixe. Corruption, pots de vin aux douaniers, magouilles dans les nomenclatures, procédures complexes et lourdeur administrative, tant d'écueils qui entravent la bonne conduite du projet d'ouverture marocain. «Aujourd'hui, on est confronté à un grave problème au niveau de l'importation. Je suis surpris quand je trouve le produit que j'ai importé, vendu au prix d'achat du pays d'origine. Les pots de vin versés aux agents douaniers pour changer les nomenclatures pour payer moins de taxes est un mal pour la promotion du commerce extérieur du Maroc», s'alarme cet importateur casablancais. Un observatoire inutile Pour faire face à cette relation tumultueuse entre les deux parties, la dernière innovation en date de l'ADII est la création d'un observatoire de l'éthique douane-secteur privé. Mais trois mois après sa mise en place, le bilan du fameux observatoire venu remédier à la corruption est plus que mitigé. L'instance est encore sans vision directive. Les modalités de fonctionnement, les procédures, les interventions et la gestion interne sont au point mort. Même les missions de cet observatoire, telles que les avance le directeur général de l'Administration des douanes et impôts indirects, Abdellatif Zeghnoun, prêtent à confusion et manquent de visibilité et de cohérence. «L'Observatoire a pour mission le recueil d'informations auprès des opérateurs et usagers ou par le biais des services de l'Administration des douanes, de la CGEM et des associations professionnelles, déclare Abdellatif Zeghnoun. Il procède, également, à la revue régulière des instructions et pratiques professionnelles à la lumière des données recueillies en vue d'identifier les niches et les risques de corruption.» Mais reste à identifier la nature des informations recueillies. Le directeur des douanes se réjouit également de cette initiative qui vise selon lui, une meilleure transparence dans les relations entre la douane et les entreprises ou les usagers. Ce qui, selon lui, diminuera la corruption qui sévit dans le secteur. L'Organisation mondiale de la douane a salué le caractère pionnier du Maroc à instaurer un observatoire de l'éthique. «C'est de la poudre aux yeux, s'indigne un opérateur de la place. L'idée de créer un tel observatoire est complètement absurde. On n'arrêtera ou diminuera la corruption qu'en s'attaquant à la source du fléau sur le terrain.» Une complicité avec la CGEM ? Dans la même lignée, pour faciliter le commerce extérieur, l'administration a tout récemment pris une série de mesures. «Parmi les nouvelles innovations, on note la procédure de cession sous le régime de l'admission temporaire pour perfectionnement actif des marchandises entre opérateurs. Elle permet ainsi à une entreprise de sous-traiter en suspension des droits et taxes, certaines opérations auprès d'autres entreprises et d'encourager, par la suite, l'installation des plateformes», explique Abdellatif Zeghnoun. Deux autres changements visent à simplifier les échanges : «Le cautionnement mixte globale à travers un système de revolving et la suppression de la formalité de dépôt physique de la déclaration sommaire», indique le directeur des Douanes. Pour Ghali Benkirane, consultant en commerce international, c'est surtout une relation de complicité entre la CGEM et les douanes qui s'installe. Pour ce spécialiste, des facilités ont été instaurées par l'ADII dont la catégorisation des entreprises est la parfaite illustration. De leur côté, les opérateurs économiques jugent ses réformettes en deçà de leurs attentes. Mohamed Amine Hafidi Les nouvelles dispositions de la douane Ce début d'année a connu une vague de réformes de l'Administration des douanes. Outre la simplification des procédures douanières, la Loi de Finances 2010 a amendé le Code des douanes par une disposition particulière : la cession sous le régime de l'admission temporaire pour perfectionnement actif. Parmi les nouvelles dispositions également, la mise en place de facilités de cautionnement de transit pour accompagner le développement des zones franches ainsi que la facilité de cautionnement mixte globale à travers un système de revolving. Ce dernier permet à l'entreprise d'économiser le passage aux guichets bancaires pour chaque opération. Sur le registre de l'accompagnement des plateformes, l'Administration des douanes œuvrent pour la dynamisation du régime de l'entrepôt, à travers son ouverture, en même temps sur le marché national l'exportation et l'assouplissement des conditions d'agréments des locaux. Par ailleurs, un chantier a été ouvert au niveau de la dématérialisation des procédures du commerce extérieur. A titre d'exemple, ont été instauré : l'informatisation de la totalité du circuit de dédouanement, le paiement électronique, l'édition de la mainlevée (autorisation d'enlèvement) chez l'opérateur, le crédit d'enlèvement national, le devis estimatif et la caution globale. Poursuivant le même objectif, l'ADII a inscrit dans son plan d'actions au titre de cette année, la suppression de la formalité de dépôt physique de la déclaration sommaire rendant ainsi la procédure de mise en douane complètement dématérialisée. Cette volonté s'est traduite par la contribution active de la douane dans la mise en place d'un système d'information de la communauté portuaire (PortNet) pour traiter l'ensemble des échanges des flux documentaires liés aux opérations du commerce extérieur portuaire.