Transmettre, réenchanter, partager. Les verbes sont en pleine efflorescence, repris par les grandes voix de l'esprit du cinéma d'animation qui incarnent aujourd'hui, le 12e FICAM. Les festivaliers de 7 à 77 ans se sont manifestement emparés de cette manifestation, courant d'un film à un lieu de rencontre, à l'affût de la riche programmation qui offre master class, débat, films en compétition officielle. Depuis l'ouverture de cette nouvelle édition, Peter Lord, coréalisateur anglais de « Chicken Run » et « Les Pirates ! » (2012), Michel Ocelot, réalisateur français de « Azur et Asmar » (2006) et « Kirikou et les hommes et les femmes » (2012), Marguerite Abouet, auteur de la célèbre BD, « Aya de Yopougon » et Jung, son homologue belge, qui a signé « Couleur de peau : miel », nous ont tour à tour confié les secrets de fabrication de leurs œuvres. Carton surprise de la projection inaugurale, c'est le film « Ernest et Célestine » de Raoul Servais, invité d'honneur de ce 12e FICAM, qui a été présenté samedi 23 mars, au cinéma Dawliz. Surnommé « Le magicien d'Ostende », ce réalisateur de grand talent, incarne la référence cardinale du cinéma d'animation en Belgique. Affichant plus de douze courts-métrages et un long-métrage au compteur, Raoul Servais fait figure de défricheur et d'ambassadeur inspiré, offrant un art oscillant entre fantastique et surréalisme. Une rétrospective est entièrement consacrée, à ses courts-métrages dans le cadre des Cartes Blanches FICAM 2013, afin d'approcher son regard d'homme passionné et orfèvre avoué de l'image. Aya de Yopougon adapté en film Déjà, la même matinée, dès 8H45, Marguerite Abouet, l'auteur à succès phénoménal avec la BD « Aya de Yopougon » (2005), aujourd'hui scénariste et réalisatrice, se déliait au sujet de cette œuvre, adaptée en film d'animation, et qui sera sur les écrans en juillet prochain. Les voix des personnages ne seront autres que celles de comédiens représentant une Afrique jeune, belle, talentueuse : Ayssa Maygua et Jacky Ido, acteur franco-burkinabé, qui a joué dans « Inglorious Basterds » de Quentin Tarentino. Née à Abidjan, où elle a grandi dans le quartier populaire de Yopougon, arrivée en France à l'âge de douze ans, Marguerite Abouet, raconte le continent noir, dénué de toutes formes de misérabilisme, « l'Afrique positive, loin des clichés, de la guerre et de la famine », souligne-t-elle. LA BD « Aya de Yopougon » et le film au titre éponyme, retrace avec humour la chronique de Yopougon, la vie de ce quartier d'Abidjan, à travers une jeune fille, issue de la classe moyenne : Aya, que son père voudrait voir épouser le fils du puissant M. Sissoko, n'a qu'une envie, poursuivre ses études en dépit des embûches, qui vont lui barrer la route. Un festival d'animations Cette journée ponctuée de débats rencontres, de films, a aussi offert une leçon de cinéma, animée par l'actuel grand nom du cinéma d'animation en Angleterre, véritable pionnier du genre, Peter Lord. Le réalisateur en commentant la préparation de son dernier opus, « Les Pirates ! »- pour lequel ses équipes et lui-même, ont dû déployer cinq ans de travail opiniâtre, à coups de milliers de marionnettes, créées avec de la pâte à modeler, du latex, de la peinture- s'est dit amusé des conditions d'enregistrement des voix, notamment, celle du comédien Hugh Grant : « Voilà, comment on fait beaucoup d'économie, en enregistrant dans un studio sale de Londres !» Enfin, à 19h, le public meknassi a pu découvrir en avant-première arabe, le nouveau film du talentueux Michel Ocelot, « Kirikou et les hommes et les femmes » (2021). Le cinéaste, a présenté ce nouvel opus, mettant en lumière la curiosité, la générosité et la vivacité jamais démenties du petit Kirikou, héros-enfant africain. C'est un Mohammed Beyoud, en grande forme, directeur artistique du FICAM, et modérateur du débat qui a suivi la projection, en présence de Michel Ocelot, face à un jeune public, redoublant d'acuité et de mordant à propos de ses questions. Ce 12e FICAM a pour l'heure, un goût de rares célébrations auxquelles se sont adonnés hommes et femmes, issus de divers pays, un témoignage d'une richesse culturelle, forte d'une vraie densité humaine.