C'est le premier Moharram de l'an 1434 de l'Hégire. Une date qui passe presque inaperçue chez les Marocains. Les rares fidèles à cette fête religieuse préparent un couscous à la viande séchée ou encore une Rfissa au poulet beldi. Les soirées de Madih et Samaâ demeurent élitistes. Le 1er Moharram est écarté au profit d'autres fêtes religieuses. C'est le 1er Moharram de l'an 1434 l'hégire. Une date importante pour le monde musulman, puisqu'elle annonce une nouvelle année du calendrier hégirien et commémore un événement historique à savoir l'émigration du prophète Mohammed de la Mecque vers Médine, où il s'est installé avec ses compagnons pour propager l'Islam. Après 13 années de prédication à la Mecque, le prophète reçoit ce jour-là l'ordre divin de quitter sa terre natale et d'émigrer à Médine, marquant ainsi le début de l'année de l'Hégire. Date qui a ouvert une nouvelle page glorieuse pour la destinée de l'Islam. C'est la naissance de la Oumma. Le mois de Moharram est également l'un des quatre mois sacrés du calendrier musulman avec Rajab, Dou Al Qieda et Dou Al hijja. Son nom dérive du mot arabe « Haram », qui signifie « Interdit ». « Durant ce mois, toute hostilité est interdite. Il est prohibé de mener la guerre entre les tribus. », indique Said Bennis, professeur des sciences sociales à la faculté des lettres et sciences humains de l'université Mohammed V de Rabat. En effet, les tribus observaient une trêve. Et de poursuivre : «Le mois de Moharram marque le début de l'année lunaire, qui est composé de 354 jours, soit une différence de 11 jours par rapport au calendrier grégorien ». Calme plat Une date aussi importante passe toutefois presque inaperçue chez les Marocains. Rares sont ceux qui la fêtent en bonne et due forme. On ne se bouscule pas dans les pâtisseries pour acheter le gâteau du nouvel an, ni dans les magasins pour offrir des cadeaux. C'est le calme. Certaines personnes ne s'aperçoivent même pas de l'arrivée du nouvel an hégirien. D'autres, sans lui accorder d'importance, crient « Bienvenu au jour férié ». «Côté traditions, le 1er Moharram est écarté au profit d'autres occasions religieuses comme l'Achoura, Aïd Lkbir et Aïd Al Maoulid. Ces célébrationes sont rigoureusement fêtées par les Marocains qui maintiennent la tradition. Elles sont marquées par des visites familiales et la préparation de plats culinaires spéciaux. Le nouvel an Hégirien, pour sa part, n'est pas fêté comme il se doit, à l'exception de certaines familles qui tiennent encore à perpétuer la tradition de leurs aïeux. Certes, la célébration de zemzem a été interdite dans certaines villes à cause de quelques incidents qui se sont produits» note Said Bennis. Selon cet enseignant universitaire et chercheur en sociologie, les habitants des zones rurales maintiennent encore un rituel culinaire pour l'occasion. Un couscous à la viande séchée ou Guedid est préparé. Dans d'autres régions, on confectionne « une rfissa au poulet beldi» autour de laquelle se réunissent tous les membres de la famille. Quid du volet spirituel ? En dehors de cette cuisine spécifique à l'événement, rien ne se passe. Excepté les soirées de samaâ et Madih, organisées par les zaouias. «Seuls des groupements humains comme les Zaouias célèbrent chaque année le 1er Moharram en bonne et due forme. C'est sacré. Certaines villes comme Salé et Bejaâd maintiennent cette tradition depuis des années. Mais, c'est très élitiste » renchérit Said Bennis, soulignant au passage l'existence d'un mélange dans les zones urbaines. « Certaines familles tiennent à fêter ce jour pour transmettre cette tradition à leurs enfants, d'autres non » ajoute-t-il. « On constate l'émergence d'une certaine prise de conscience de la nouvelle génération qui veut ressusciter la tradition à travers les réseaux sociaux et les envois de SMS. Mais c'est une conscience virtuelle, à travers laquelle on tente de retrouver l'identité musulmane. Les jeunes essaient de revisiter leur Histoire musulmane. Des messages de bonne année sont envoyés » poursuit-il. Un geste symbolique pour marquer l'événement. Sondage du Soir échos Vive la fête ! Célébrez-vous le nouvel an de l'Hégire ? La question a été posée aux lecteurs du Soir échos dans le cadre d'un sondage réalisé par le journal sur son site Internet. Les résultats sont pour le moins surprenant : 66% disent fêter le 1er Moharram contre 34% affirmant le contraire. Des résultats qui contredisent les déclarations de Said Bennis, Professeur en sciences sociales à l'Université Mohammed V de Rabat. (voir page 3) * Tweet * *