5:30, Précis et inhumain, le réveil lance sa sonnerie stridente, véritable cri au plus profond de la nuit. L'oeil gauche de Miloudi cherche l'heure sur l'écran, comme pour se dire qu'il doit s'agir d'une erreur. 5:35 affiche l'horloge aux chiffres rouges. Mazette, cinq minutes se seraient donc écoulées en cinq secondes depuis que l'alarme a sonné ! Miloudi saute de son lit et s'achemine vers le réveil, planté au fond du salon, derrière une pile de livres l'obligeant à se contorsionner, dans un stratagème ancien mais efficace visant à l'éloigner durablement de son lit. Une claque machinale pour faire taire la machine infernale et direction la salle de bain, où un autre écran affiche déjà 5:45. Le temps semble s'être affolé, à moins que ce soit notre Miloudi qui ne se déplacerait plus qu'à la vitesse d'une limace se prenant pour un escargot à la recherche d'une carapace. Cuisine. Le doigt appuie machinalement sur l'interrupteur et la main s'allonge vers le réfrigérateur pour sustenter notre homme à quelques instants de sa nouvelle journée. Le geste est arrêté brutalement par les quatre chiffres qui clignotent sur le micro-ondes voisin : 4:27. Miloudi est perdu. En passant d'une pièce à l'autre, il avait l'impression de passer d'un pays à l'autre, d'un fuseau à l'autre ou de changer d'espace-temps. Revenant sur ses pas, il scrute un à un ces écrans qui le narguent et qui affichent chacun son heure de préférence. Arrivé à son lit, l'horloge trouait l'obscurité avec insolence : 5:40. C'en était trop pour l'esprit embrumé de notre Miloudi qui, ne pouvant résister à la force d'attraction de son lit, s'y replongea comme un naufragé qui s'accroche à son épave. Tant pis pour les résolutions de la rentrée, s'entend-il marmonner avant de reprendre le cours de son sommeil.