Le jury du prix Samir Kassir s'est réuni, samedi à Beyrouth, pour désigner les deux lauréats du prix pour la liberté de la presse dans le monde arabe. 160 candidats du monde arabe ont soumis des articles emblématiques de leur engagement au quotidien pour la liberté de la presse au Moyen-Orient et au Maghreb, sous l'égide de la commission européenne et de la fondation Samir Kassir, dirigée par sa veuve Gisèle Khoury. D'Egypte, de Palestine, de Jordanie, du Liban, de la Syrie mais aussi du Maghreb et d'ailleurs, les journalistes ont témoigné de l'intensité de l'actualité qui secoue notre région depuis plus d'une année avec ce qui fait la différence entre un papier au kilomètre et un article d'information : la foi dans la capacité et la nécessité d'informer librement, justement et honnêtement. Les deux lauréats, Suleiman al-Khalidi, de Jordanie, dans la catégorie «article d'opinion» et Pakinam Amer, journaliste égyptienne bien connue sur Twitter, dans la catégorie «enquête-reportage» ont retenu l'attention du jury bien que les articles sélectionnés en finale étaient tous d'un excellent niveau, tant au niveau de l'opportunité du sujet que de la construction de l'exposé. Suleiman al-Khalidi, journaliste pour le compte de Reuters, raconte son enlèvement par les forces syriennes, avec pudeur et force en s'effaçant derrière les enjeux. La conclusion de son article récapitule avec vigueur le sentiment laissé par les soulèvements, tous les soulèvements, qui ont secoué la région. « je suis hanté par le coût humain des révolutions dans le monde arabe pour ces peuples qui revendiquent des libertés que d'autres, ailleurs dans le monde, prennent pour acquises.» Pakinam Amer, journaliste égyptienne engagée, a, elle, relaté la disparition d'un collègue et du manque de soutien et de compassion que cet enlèvement a suscité, y compris dans sa propre rédaction. Véritable réquisitoire contre le système Moubarak, qui, ironie du sort, était jugé ce même jour, cette enquête est un hommage au courage des milliers de journalistes anonymes mus par le devoir d'informer sans que leurs efforts soient toujours perçus comme il se doit. La cérémonie, sobre et intense, présidée par l'ambassadeure de l'Union européenne au Liban, Angelina Eichhorst, a été l'occasion de rappeler le lourd tribut payé par la profession chaque jour, prix associé à la quête de la liberté par tous les ressortissants de la région, au-delà des clivages idéologiques ou confessionnels.Par son engagement financier, logistique et son accompagnement, l'Union européenne met l'accent sur la nécessité pour l'ensemble des pays du sud de la Méditerranée de mettre la liberté de la presse au rang de leurs priorités dans les discussions avec l'Europe. En attendant que cela devienne un préalable non négociable, saluons le succès de cette septième édition. * Tweet * * *