Il n'est pas fortuit que le conseil du gouvernement mette sur la table d'études aujourd'hui deux projets de lois, qui semblent constituer le noyau dur du plan Maroc vert. Le premier est relatif à l'agrégation agricole. Le second, aux organisations interprofessionnelles concernant les filières de production agricole et halieutique. L'accélération, bien que tardive, de l'adoption de ces deux projets de lois, censés structurer et mettre de l'ordre dans un secteur clé dominé essentiellement par les petits agriculteurs, est très attendue et sera d'un grand apport. Le fait que leur étude coïncide avec le vote, très probablement positif, aujourd'hui, au Parlement européen, de l'accord agricole liant le Maroc à l'UE, est un signal fort avisant que ce dossier est acquis d'avance, quoique le terrain soit parsemé d'embûches. Après les paroles, le passage à l'acte Ahmed Ouyach, président de la Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural (COMADER), explique que transposer sur le terrain la formule de l'agrégation n'est pas une mince affaire. Par définition, comme le stipule l'esprit du texte juridique, l'agrégation consiste en un regroupement de bon nombre d'agriculteurs ou éleveurs (agrégés) au tour d'un agrégateur dans le but d'améliorer les étapes de production, de valorisation et de commercialisation des produits agricoles. Le but in fine est de résoudre la problématique du foncier (prédominance des micro-propriétés) et partant, de revoir à la hausse le niveau de la productivité en ligne avec les exigences du marché européen. « La plupart des producteurs marocains sont de petits fermiers (70 % des exploitations ont moins de 5 hectares, dont la moitié ne dépasse guère les 3 hectares et les exploitations de plus de 50 hectares ne représentant que 1 % de la surface agricole) », notent les autorités françaises dans leur lettre de position sur le projet de résolution de José Bové, assurant que l'accord bénéficiera aux petits producteurs marocains. Financement et encadrement Ouayach défend avec insistance les coopératives agricoles. À ses yeux, l'agrégation agricole, telle qu'elle a été appliquée jusqu'alors, a montré ses limites. Deux problèmes majeurs surgissent à ce titre, à savoir le financement et l'encadrement. « Ce dernier constitue même une des défaillances à mettre sur le passif du Plan Maroc Vert ». Le second problème est l'agrégateur lui-même. Ouayach n'a pu s'empêcher de confier ses craintes : « Il faut fermement veiller à ce que l'agrégateur ne se transforme en prédateur ». le président de la COMDER conçoit donc que les coopératives restent par excellence le schéma le plus solide et le plus pérenne. Il fait référence à notre premier partenaire (UE), où cette formule est la plus en vogue, puisque l'ensemble des matières de base (lait, sucre, céréales, huiles) sont produites par les coopératives qui drainent des chiffres d'affaires impressionnants. Mieux encore, ces dernières ont commencé à toucher à d'autres secteurs, comme le cosmétique, par exemple. Retard et défaillances Sur le chapitre du projet de loi relatif aux organisations interprofessionnelles, Ouayach explique que nous sommes très en retard par rapport à nos voisins du Nord. C'est aussi une des grandes défaillances du Plan Maroc Vert, pour reprendre les termes d'Ouayach. Car, comme le détaille ce spécialiste, le rôle des associations agricoles est l'encadrement. Faute donc de moyens, financiers comme humains, elles sont réduites à de simples coquilles vides. Pire encore, parmi les centaines d'associations qui existent, seule une poignée est effectivement opérationnelle. Et pour conclure, le professionnel, imbibé fortement par le modèle français, souligne que ce dernier est assis sur deux bases fondamentales que sont la recherche et développement et le tissu associatif. La profession de guide touristique Le conseil du gouvernement procédera également à l'étude du projet de loi 10.09 qui réorganise la profession de guide touristique. Il s'agit en fait de mettre de l'ordre dans un domaine où l'anarchie bat son plein. D'autant plus vrai que ce corps de métier empreinte fortement l'esprit des touristes. Le nouveau texte vise donc à améliorer la qualité des services touristiques et de lever le défi aussi bien de la qualité que du positionnement du Maroc sur la carte touristique mondiale. Ce métier devrait être revaloriser afin de permettre une mise à niveau de la profession. Il vise également à réglementer les conditions d'accès et améliorer la situation des salariés allant jusqu'à prévoir de lourdes sanctions contre les faux guides.