Féministe, femmes de lettres et briseuse de tabous aux premières heures, Régine Deforges signe «Le Paris de mes amours-Abécédaire sentimental». Elle y invite à redécouvrir les venelles et les artistes de son Paris. Régine Deforges signe un nouvel opus «Le Paris de mes amours-Abécédaire sentimental» (Plon). Régine Deforges, son premier roman, «Le con d'Irène» soumis à la censure et publié ensuite sous «Irène», sa saga érotico-romanesque, sa maison d'édition intitulée l'Or du temps. Libraire dans une première vie et première éditrice française alors que ses concitoyennes ne pouvaient ouvrir un compte bancaire sans l'accord de leur mari, l'écrivain apparue sur la scène littéraire de la France des années 60, traîne un parfum sulfureux dès son entrée en écriture, déjà entrée en religion avec un enseignement acquis auprès des religieuses, comme nombre de jeunes filles vertueuses et obéissantes de son temps. Briseuse de tabous, privée de ses droits civiques suite à la parution du «Con d'Irène» en 1968, dont les exemplaires sont saisis par la police moins de 48 heures après leur publication, l'auteur qui se dit à cette époque «naïve», accepte d'attribuer un autre nom à son roman, «Irène». L'imposture ne s'arrête pas là, puisque l'œuvre est également attribuée à Louis Aragon, homme fou des femmes et d'Elsa. Alors accusée d'obscénité, Régine Deforges s'en étonne encore aujourd'hui, confiant «je publie des livres qui donnent envie aux gens de faire l'amour». Ce qui la heurte dans sa chaire à cette époque, c' est la guerre du Vietnam, et surtout les images de cette guerre. Le choc des corps de nourrissons, et de ses «frères humains», dirait François Villon. Mis en vente sur les étals des libraires dès le 20 octobre, «Le Paris de mes amours-Abécédaire sentimental» effeuillera les contours des quartiers parisiens, des détours aux ambiances diffuses de poésie, d'histoire, de lieux emblématiques, refuges d'artistes, d'exilés afin de nous montrer qu'il y a peut-être un «après» à Saint-Germain-des-Prés. Et de la splendeur, des quais de la Seine aux recoins les plus glauques. « Il ne faudrait pas croire, nous dit-elle, que Paris se laisse approcher facilement. Pour l'apprivoiser, il faut du temps, de la patience et de l'amour et accepter que la ville ne se montre pas sous son meilleur jour». Paris, ville amoureuse est aussi sa ville d'amitiés. Des noms rencontrés à ceux rêvés : Aragon, Simenon, Villon, Balzac, Restif de la Bretonne… Qui mieux que Régine Deforges pouvait écrire l'amour, son amour pour Paris? Celle que l'on lisait encore ado sous le manteau, découvrant le trouble de Léa, transie d'amour pour François, a sans nul doute participé à mettre des mots sur l'éveil à la sensualité et à la sexualité de bien des lecteurs à travers les lignes de «La bicyclette bleue»(1981), «101 avenue Henri Martin» (1983)ou encore «Le diable en rit encore»(1985). S'il est vrai aussi, qu'à l'époque la mini-jupe a déjà fait tourner les têtes avec 200 000 pièces vendues en 1966 et qu'il faudra encore attendre la décennie 2000, pour provoquer des carambolages à la vue des panneaux publicitaires de la célèbre marque de lingerie Aubade, exposant les courbes féminines débordantes d'harmonie de son mannequin vedette ; Régine Deforges fait alors figure de révolutionnaire de la plume et des sens dans la France des années 60. Ses héroïnes sont des frondeuses, des résistantes aux prises avec la guerre, qui se sacrifient quand d'autres femmes sont accusées de collaboration horizontale avec l'occupant nazi. Le pouvoir de ses choix romanesques et de sa plume embarque même à l'aube du Moyen-Age, où elle exhume les reines et leurs amours. Cette femme qui disait simplement dans son art le désir et la sexualité de la femme, a ouvert la voie à Virginie Despentes, Madonna, Ramize Erer. On retient de sa sulfureuse œuvre «Contes pervers» (1980) recueil qui fait la part belle à la perversité. «Pour l'amour de Marie Salat» (1987), célèbre l'amour saphique à travers une correspondance authentique tenue entre 1903 et 1904, sur laquelle l'auteure est tombée par hasard dans une brocante. «O m'a dit» (1995) est un livre d'entretien avec Pauline Réage, l'auteure d'«Histoire d'O». Suivent «Les cent plus beaux cris de femmes» (1980), «Troubles de femmes» (1984), «Entres femmes» (1999). Toujours au plus fort de 2007, lorsque la chanteuse Alexandra Roos, extatique à souhait, interprète sur la scène La Boule Noire à Paris, le titre «Prends-moi», l'œuvre de Régines Deforges est sans nul doute passer par là. Il y a aussi des relents de raï, de tradition érotique arabe se jouant depuis 13 siècles. Une relève assurée par des audacieuses comme Nedjma, Joumana Haddad, déjà devancées par leurs aînées : Alia Mamdouh et Hanan el-Cheikh. Enfin, amis lecteurs, rendez-vous avec le Paris de Deforges. Je m'arrête ici avant de poursuivre si littérature et liberté m'étais contées. Aucun article en relation !