Le concert des « voix de la paix » a enflammé la cité ocre hier soir, pour un spectacle en hommage à la mémoire des victimes de l'attentat du 28 avril. Les dons seront reversés aux victimes françaises et marocaines. Dimanche 22 mai, 16h. Arrivée au circuit automobile d'AL Mazar en compagnie de l'équipe de Safy Boutella : Aude son assistante, Aïcha son manager, Philippe son ingénieur du son. La piste a été transformée pour l'occasion en espace destiné à accueillir une scène de concert. Plus d'une vingtaine de tentes blanches investissent les lieux, sans trancher avec la couleur dominante des personnes chargées de l'organisation de ce concert événement, arborant toutes un t-shirt blanc, sur lequel on peut lire « I love Marrakech ». Moins d'un mois après le terrible attentat qui a frappé la cité ocre et secoué le plus grand nombre par son onde de choc, les Marocains ont réagi au moyen de l'art et de l'union. De nombreux artistes ont répondu favorablement à l'appel de ce concert qu'ils offrent gratuitement. « C'est un nouveau défi, mais aussi notre façon de répondre à la violence », souligne une source proche de l'organisation. C'est un spectacle de plus de cinq heures qui devraient se tenir dans moins de quatre, à coups de onze artistes internationaux. Nombre de spectateurs attendus ? « 25 000 personnes », déclare la même source. Nous nous rendons ensuite dans la loge de Boutella, située a plusieurs mètres de la scène en passant devant celle de Fnaier, Idir, Quincy Jones, Mori Kanté, Hindi Zahra et Sapho. Fidèle à sa parole, rendez-vous avait été fixé en début d'après-midi avec le compositeur algérien, qui vous accueille la guitare en bandoulière et le sourire en bannière. Les festivals sont également des moments de rencontres et certains artistes détonnent parfois avec leur histoire, leur générosité, leur art. C'est le cas de Boutella qui vous invite à la répétition de son concert. Alors qu'il attend dans sa loge son passage pour les balances, il sort un harmonica de son sac et commence à jouer, des notes de blues. On se croirait aux «States» en présence d'un bluesman, le temps d'une respiration dans l'agitation ambiante de Mawazine. L'artiste ne dit rien de sa fatigue. C'est un membre de son équipe qui le confie, «il a fait plusieurs enregistrements très tard pour Medi 1 TV». Nessma TV entre pour une interview. Quelques minutes plus tard, Omar Sayed et Rachid Batma arrivent. L'histoire de Nass El Ghiwane et Safy Boutella reprend. Leurs franches accolades et la complicité qui se dégagent de leurs retrouvailles dit l'évidence : ils forment une famille. Boutella, tel un enfant, offre un cadeau à Batma : un casque musical. Les artistes répètent au loin à tour de rôle, l'air diffus des différents instruments parvient par intermittence. Nass El Ghiwane et Boutella quittent la loge pour rejoindre la scène. Ils vont faire l'ouverture du concert dans moins d'une heure. Plus d'une trentaine de personnes sont sur scène, on ne distingue plus les artistes au milieu des membres de l'organisation. Les huit cordes de la création de Nass El Ghiwane par Boutella débutent. Suit la basse. Un régisseur demande «Toutes les voix !» Batma et Sayed sont au micro, Boutella, au clavier. Puis le rideau de fer s'abaisse pour se lever dix minutes plus tard. Deux écrans sont placés de chaque côté de la scène. Les Marrakchis, nombreux, sont déjà là, signe de vitalité et de soutien à ce projet. Le rideau de fer se lève, Ali Baddou présente les contours de cette soirée, « exceptionnelle, car placée sous le signe de la paix pour le Maroc, pour dire qu'on a tous quelque chose de la Place Jemaâ El Fna dans nos cœurs ». Puis, les prières notes d'« Allah Ya Moulena », s'élèvent de la scène, suscitant l'engouement et la réactivité du public, qui tout au long de la soirée chantera les titres de Nass El Ghiwane, Sapho, Idir, Hindi Zahra et Mori Kante. Marrakech a prouvé qu'elle a célébré la vie, l'art, la culture, la mixité, derniers bastions contre la violence….