Il n'est nullement pertinent d'enfermer le débat autour de la culture dans l'unique cadre relatif à l'événementialité culturelle festive. Il est par contre utile de relativiser les positions des uns et des autres. L'événementialité culturelle au Maroc, qui fut marquée de par le passé comme au présent par la tenue de divers festivals culturels et artistiques, ne cesse de susciter des débats et polémiques concernant l'impact de ce genre de manifestations sur l'état de la culture et des arts marocains et l'intérêt qu'elles représentent en matière d'animation culturelle au bénéfice de tous. Ainsi, on a vu profiler au fil des années des positions qui, loin de faire l'unanimité, finissent quelques fois par s'opposer les unes aux autres sans toutefois aboutir à établir un dialogue serein permettant d'appréhender les mesures susceptibles de promouvoir l'action culturelle et d'investir la culture au profit du développement humain global. Notons dans un premier temps que le contexte actuel qui se distingue par un riche débat social sans précédant et par une mobilisation de l'ensemble des composantes de la société dans le cadre de la consultation en cours se rapportant à la réforme constitutionnelle, tout en représentant un signe plus que positif, impose une reconsidération de la question culturelle et une nouvelle approche quant au rôle de la culture dans l'accélération des processus du changement sociétal auquel aspire l'ensemble des marocaines et des marocains. Certes, l'évocation de l'impact de la culture sur l'évolution des sociétés ne date pas d'aujourd'hui, au point qu'au-delà de la littérature dense qui a été consacrée à cette question même les plus dogmatiques des économistes ont fini par admettre ce que l'éminent économiste marocain que fut feu Aziz Bilal, considérait comme étant les facteurs non économiques du développement. Pourtant ce consensus enregistré en terme d'idées n'a pas provoqué une action conséquente permettant d'agir culturellement afin de faire aboutir les grands chantiers de réforme et susciter une mobilisation sociale, faute de laquelle l'esprit même de la réforme n'aura aucune chance de s'enraciner et de s'épanouir. Libre aux personnes de diverger sur telle ou telle conception de telle ou telle valeur, mais cette diversité en n' étant pas régie par des accords de base ne peut que déboucher sur la tyrannie sous prétexte de vouloir sauvegarder la liberté. L'histoire du Maroc proche et lointaine représente à cet effet une belle leçon qu'il faudra aujourd'hui méditer afin d'éviter les égarements et les erreurs du passé. En somme nul ne peut contester le fait historiquement vérifiable qui nous renseigne avec éloquence sur la corrélation entre le rayonnement de l'entité marocaine et l'épanouissement des arts et de la culture, autant qu'il illustre les périodes de déclin social caractérisées par l'essoufflement de l'esprit et le recul du savoir. Ainsi, le tournant historique dans lequel le Maroc s'engage avec détermination et enthousiasme, impose une réelle mutation culturelle ne se limitant pas seulement à mettre le savoir et la culture à la portée des larges couches de la population mais œuvrant aussi à opérer une réelle évolution des mentalités et des attitudes de l'ensemble du corps social. L'aspiration à l'établissement du vivre en commun au sein d'une société juste et harmonieuse nécessite de la sorte une réelle refondation des systèmes de valeurs devant être communément admises et librement partagées. En effet, c'est à la lumière d'une appréhension pareille qu'il faudra s'interroger sur les outils les plus adaptés et sur les moyens les plus efficaces susceptibles d'amorcer le renouveau culturel, de concrétiser la réforme éducative et de faire parvenir le développement social. L'approche d'une interrogation pareille devant rompre avec des conceptions dépassées, est appelée à inscrire dans la durée l'action culturelle et la vocation pédagogique du savoir au sein même de l'action sociale. De la sorte, quelque soit le domaine de cette action sociale les valeurs devant représenter le fondement sur lequel s'érige l'agir des individus aussi bien que celui des collectivités, représentent à cet égard un socle essentiellement culturel qui incarne le lien même du tissu social. Ainsi, libre aux personnes de diverger sur telle ou telle conception de telle ou telle valeur, mais cette diversité en n'étant pas régie par des accords de base ne peut que déboucher sur la tyrannie sous prétexte de vouloir sauvegarder la liberté. En somme, comme il n'est nullement pertinent d'enfermer le débat autour de la culture dans l'unique cadre relatif à l'événementialité culturelle festive, il est par contre utile de relativiser les positions des uns et des autres. Autant les festivals culturels et artistiques représentent certes des lueurs de joie et expriment l'amour de la vie, ils ne peuvent, quant à eux seuls, suppléer à l'action culturelle d'envergure qui s'inscrit dans la durée et correspond aux besoins de tous. D'autre part la grande réussite enregistrée par des manifestations dédiées aux différentes expressions artistiques comme le cinéma, le théâtre et le chant, témoigne de l'extrême importance que revêt la mise en place d'une stratégie globale d'animation culturelle et artistique. Une telle stratégie devrait permettre une redéfinition permanente des concepts et des modalités de mise en œuvre de l'action culturelle festive, afin qu'elle s'inscrive dans la logique de couronnement d'une programmation culturelle annuelle au lieu de se limiter, comme c'est souvent le cas, à des rencontres annuelles pilotées par les mêmes initiateurs qui quelques fois finissent par confondre action publique et intérêt personnel. Ainsi, comme il serait souhaitable de penser collectivement à améliorer ce genre de prestations, il serait plus que bénéfique au lieu d'éteindre ces étincelles de les parsemer comme de belles étoiles qui illuminent l'esprit et permettent de raffiner le goût.