La crise économique n'a pas empêché 2010 d'être une année positive pour le marché de l'emploi au Maroc. Des professionnels pensent que l'année 2011 marquera la reprise et sera encore plus mouvementée. Il semble que la crise économique de 2010 n'a pas impacté le marché de l'emploi au Maroc. Les observateurs qui pensaient que l'année allait être difficile pour le marché du recrutement se retrouvent aujourd'hui avec des chiffres qui montrent une tendance plutôt positive. Sur son rapport sur la politique monétaire pour l'année 2010, Bank Al-Maghrib fait état d'une baisse du taux de chômage, aussi bien en milieux urbain que rural, par rapport à l'année précédente. Selon ce rapport, «les postes d'emplois rémunérés créés ont atteint 183.000 au troisième trimestre 2010 contre une perte nette de 90.000 postes d'emploi non rémunérés, ce qui s'est traduit par une création nette de 93.000 postes d'emploi, dont 36.000 en milieu urbain et 57.000 en milieu rural». Par secteur, les créations d'emplois ont concerné essentiellement le secteur des services avec 73.000 nouveaux emplois (+1,9%), secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) avec 52.000 emplois, (+5,4%), et le secteur primaire avec 40.000 emplois (+1%). Ce qu'en disent les recruteurs D'un autre côté, le secteur industriel a accusé une perte nette de 70.000 postes d'emplois, principalement en milieu rural. L'enquête de conjoncture menée par BAM a révélé que les chefs d'entreprises s'attendent à une progression de l'effectif global employé dans le secteur industriel dans toutes ses branches. Une exception est toutefois attendue dans les industries chimiques et para-chimiques où la tendance sera stabilisée. En contrepartie de la préservation des emplois, les salaires ont connu une baisse réelle notamment dans le secteur privé depuis le deuxième trimestre de l'année en cours. L'indice des salaires moyens trimestriels dans le secteur privé, calculé par le HCP sur la base des données de la CNSS, a enregistré, durant le deuxième trimestre 2010, une hausse de 1,2% par rapport au trimestre précédent. Cependant, il demeure en baisse de 6,6% en glissement annuel. En termes réels, cet indice a régressé de 7,6% par rapport à la même période de l'année précédente. Pour les professionnels du recrutement, 2010 aura été une année comme les autres. Pourtant on reconnaît difficilement qu'il y a une baisse de la demande. Les sites de recrutement en ligne ont globalement accusé un léger recul quant au nombre de CV déposés sur leurs plateformes. Du 1er janvier au 29 décembre 2010, quelque 44.000 candidats ont décidé de faire appel aux services du site de recrutement en ligne Rekrute, contre 52.600 une année auparavant. Ce qui représente une baisse de 16,35% de candidats. Autre exemple, «en 2009, 48.000 candidats ont déposé leurs CV sur notre site, soit 4.000 de plus qu'en 2010», nous affirme la direction de communication du portail emploi AmalJOB.com. en d'autres termes, la baisse du nombre de candidats ayant fait appel au recruteur est de 8,33%. Alors que Rekrute annonce une période moyenne pouvant atteindre les 6 mois avant que le candidat ne soit placé, AmalJob affiche 4 à 6 semaines au maximum. Tout dépend bien évidemment du profil et du poste recherchés. En 2010, plus de 4.800 chercheurs d'emploi ont trouvé un employeur à travers ce site, soit un taux de placement de l'ordre de 10,9%. Il est évident que Casablanca reste incontournable en termes d'opportunités d'emploi, tous secteurs confondus. A ses côtés, Rabat, Tanger, Marrakech et même Agadir ont réussi à s'imposer comme destinations pour se construire une carrière. Cependant, «des villes qui étaient, il y a encore quelques années blacklistées, voient aujourd'hui déferler les cadres. Il suffit de regarder Khouribga, Youssoufia, Safi, El Jadida et Ben Guerir», fait remarquer Hicham Lakhmiri, directeur général du portail AmalJob. 3 questions à Hicham Lakhmiri, directeur général du portail emploi AmalJOB.com « En 2011, le gel des recrutements levé, les bons profils auront l'embarras du choix » Quelle lecture faites-vous du marché de l'emploi en 2010 ? Les chiffres prévoyaient en 2010 une annus horribilis qui n'a pas eu lieu. Le premier semestre a été assez morose, mais la seconde partie de l'année s'est révélée meilleure. Les facteurs d'attractivité de l'économie marocaine restent réels et les entreprises, qui ont commencé à anticiper une reprise dès la rentrée 2010, ont eu la volonté d'investir à nouveau dans les ressources humaines. Les indicateurs ne sont donc jamais véritablement passés au rouge pour le marché de l'emploi-cadre marocain : les entreprises se basent sur du moyen, voire long termes. Crise ou pas, quand un bon profil se présente, tout le monde se l'arrache. Quels sont les secteurs d'activité qui ont le plus recruté cette année ? Les secteurs de l'offshoring, du BTP, du tourisme, du textile-habillement, de la santé, de l'enseignement ou encore de l'agroalimentaire sont très porteurs en matière d'emploi. Ils ont la faveur de grands projets, actuellement en chantier : programme Emergence, Plan Azur, Plan Maroc Vert, programme d'habitat urbain, etc. Les directeurs de projets infrastructures, les ingénieurs en génie civil, industriels, agronomes ou encore les directeurs d'hôtels avec une expérience à l'international sont des profils actuellement très convoités. Pour les fonctions supports, considérées comme des centres de coûts comme le marketing ou la communication, la situation ne s'est pas améliorée entre 2009 et 2010. Les profils informatiques et commerciaux, eux, ne connaissent toujours pas la crise : les techniciens et ingénieurs qualifiés restent très recherchés et les commerciaux expérimentés sont éminemment recherchés : crise ou pas crise, les entreprises ont toujours besoin de générer un maximum de business. Comment se comportera, selon vous, le marché de l'emploi en 2011 ? Une fois le gel des recrutements levé et la reprise économique amorcée, les entreprises seront amenées à repenser leur positionnement afin d'être en mesure de fidéliser les talents, tentés par le changement mais qui avaient reporté leur départ à la faveur de la crise, par frilosité et peur du chômage. Car le turn-over coûte cher. Les entreprises devront aussi anticiper leurs besoins en recrutement pour accompagner la relance, et attirer des collaborateurs expérimentés ou à hautes compétences, opérationnels et performants sans perte de temps. Pour cela, les recruteurs devront proposer de la qualité au travail, car une entreprise compétitive, fidélisante et attractive pour les candidats est avant tout une structure avec une forte culture d'entreprise, à laquelle les collaborateurs ont un fort sentiment d'appartenance. Les bons profils auront donc l'embarras du choix.