Exposée ce week-end à la Biennale de Marrakech, la série « Made in Mode grossesse » de Fatima Mazmouz flirte entre humour et interrogations. Zoom sur une démarche hors du commun. D écomplexée, ainsi pourrait-on qualifier Fatima Mazmouz. La jeune femme aime rire aux éclats, parler, voyager et danser le charqi… à neuf mois de grossesse ! « Oh là là, faut pas le secouer comme ça, ce petit ! », s'est effrayé un technicien lors de l'installation de sa vidéo, présentée cette année dans le cadre de l'exposition « Made in Mode grossesse » au Printemps photographiques de Nîmes (France) puis à la Biennale de Marrakech. L'anecdote, Fatima s'en amuse beaucoup. C'est que l'artiste sait exposer son ventre comme personne n'oserait le faire. Précisément. Telle est l'intention de cette série, extraite du projet au long cours « Histoire de la femme enceinte » : « Mes séries photos naissent à chaque étape de ma vie, selon des problématiques différentes, quelles soient identitaires, politiques ou sociales. Ma première grossesse m'a inspiré une première série de photos, « Portraits d'une femme enceinte », présentée cette année à la galerie 127 ainsi qu'à Paris à l'Institut culturel de l'islam. Ce sont des portraits d'une femme recroquevillée sur elle-même. Le traitement y est très pudique, il est l'expression du malaise que toute femme peut ressentir au moment d'une première grossesse. On doit faire le deuil de ce qu'on était avant sur le plan physique et psychologique. J'ai ensuite voulu aller plus loin en traitant la question du ventre, ce que j'ai fait lors de ma seconde grossesse ». écomplexée, ainsi pourrait-on qualifier Fatima Mazmouz. La jeune femme aime rire aux éclats, parler, voyager et danser le charqi… à neuf mois de grossesse ! « Oh là là, faut pas le secouer comme ça, ce petit ! », s'est effrayé un technicien lors de l'installation de sa vidéo, présentée cette année dans le cadre de l'exposition « Made in Mode grossesse » au Printemps photographiques de Nîmes (France) puis à la Biennale de Marrakech. L'anecdote, Fatima s'en amuse beaucoup. C'est que l'artiste sait exposer son ventre comme personne n'oserait le faire. Précisément. Telle est l'intention de cette série, extraite du projet au long cours « Histoire de la femme enceinte » : « Mes séries photos naissent à chaque étape de ma vie, selon des problématiques différentes, quelles soient identitaires, politiques ou sociales. Ma première grossesse m'a inspiré une première série de photos, « Portraits d'une femme enceinte », présentée cette année à la galerie 127 ainsi qu'à Paris à l'Institut culturel de l'islam. Ce sont des portraits d'une femme recroquevillée sur elle-même. Le traitement y est très pudique, il est l'expression du malaise que toute femme peut ressentir au moment d'une première grossesse. On doit faire le deuil de ce qu'on était avant sur le plan physique et psychologique. J'ai ensuite voulu aller plus loin en traitant la question du ventre, ce que j'ai fait lors de ma seconde grossesse ». Originale, Fatima ? Cela ne fait aucun doute. Femme enceinte, fragile, enfant. Femme-femelle enfin : dès 2007, elle se lance dans une série d'autoportraits de femme prise au piège des stéréotypes de la procréation. Pas facile de revendiquer sa féminité quand le monde ne voit plus en vous que la mère génitrice, un corps transformé que la pudeur invite à cacher. Sous les voiles des tenues marocaines, la silhouette de Fatima se dessine, avant de laisser jaillir un ventre couleur or : « Physiquement, on n'est plus soi-même. C'est difficile de gérer ce nouveau corps qui s'impose à vous avec tout ce qu'il entraîne comme transformations au quotidien. Il y a ce centre qui est là et qui est votre nouveau cerveau. C'est la dictature du ventre ! ». Inspirée de la tradition philosophique de Clément Rosset –le « réel idiotie »-, l'artiste allie fiction et réalité à travers la substitution de « codes » culturels souvent inscrits dans une dimension fantasmagorique. Ainsi offre-t-elle des images aux couleurs chatoyantes, expression d'un réel truffé de clichés que seuls l'exacerbation et l'humour décalé peuvent démanteler. Transgression du code vestimentaire, détournement des stéréotypes qui brident la féminité, ces images, quoique centrées sur la civilisation marocaine, n'en demeurent pas moins universelles. Auparavant, Fatima s'est mise en scène en sous-vêtements occidentaux, en Blanche-Neige ou en Catch Woman. Histoire de rappeler que sous le costume, vit la femme. Que derrière ce ventre, résiste une âme. L'artiste est représentée par la galerie 127 à Marrakech et sera prochainement exposée à la galerie FJ à Casablanca. Elle a exposé à Rome, Madrid, Amsterdam, Anvers, Paris et au Caire, en participant à de grandes manifestation culturelles comme les 6e rencontres africaines de la photographie de Bamako ou le Festival international de la photographie à Arles.