Le camp d'Alassane Ouattara a appelé ses partisans à manifester jeudi et vendredi. La journée de tous les dangers », c'est ainsi que plusieurs médias titraient jeudi matin, alors que les partisans d'Alassane Ouattara entamaient leur marche sur la radio-télévision d'Etat, la RTI. La manifestation a dégénéré en affrontement sanglant avec les forces du président sortant, Laurent Gbagbo. A la mi-journée, un premier bilan faisait état de cinq morts. Pour le camp Ouattara, cette marche vise à prendre possession d'un pilier du pouvoir, en mettant en place un nouveau directeur général à la tête de la RTI. La RTI est depuis l'éclatement de la crise politique entièrement dévouée au président sortant, et le changement de directeur général pourrait s'avérer une étape décisive pour le gouvernement Ouattara. Mais le bâtiment de la télévision étant gardé par les hommes de Laurent Gbagbo, cette marche mène à une confrontation violente entre les deux camps. Jeudi matin, la tension était perceptible dans les rues d'Abidjan. La plupart des magasins et entreprises étaient fermés et des policiers étaient postés à chaque intersection principale. Dans la journée, des tirs d'armes lourdes ont retenti près du quartier général d'Alassane Ouattara. « Ça tire de partout. On entend l'artillerie. Il y a des explosions. Ça provient de l'hôtel du Golf », a dit un témoin. Un autre témoin, vivant à proximité de l'hôtel, a confirmé les tirs d'armes lourdes. Après la mobilisation du jeudi, Alassane Ouattara a prévu une deuxième marche vendredi pour reprendre certains bâtiments du gouvernement et organiser son conseil des ministres. Pour l'instant, le président Ouattara gouverne depuis un hôtel gardé par ses partisans et les soldats de l'ONU. La deuxième marche se dirigera vers la « Primature », le siège du gouvernement, occupé par le Premier ministre du camp adverse. Dans un message lu mercredi à la télévision, l'armée fidèle à Gbagbo a exhorté les partisans d'Alassane Ouattara à ne pas participer aux marches de jeudi et vendredi. Ces deux marches laissent craindre une explosion de violence. La RTI et le siège du gouvernement étant par nature des lieux stratégiques, les partisans de chaque camp risquent de s'affronter pour leur contrôle. Mercredi, le secrétaire-général des Nations Unies Ban Ki-moon a prévenu qu'un tel environnement de tensions politiques pourrait provoquer une « retour à la guerre civile ». La Côte d'Ivoire est depuis plusieurs semaines dans une impasse. M. Ouattara a été désigné vainqueur de la présidentielle par la commission électorale, mais le Conseil constitutionnel ivoirien, acquis au sortant, a invalidé ces résultats et proclamé la victoire de M. Gbagbo. La victoire d'Alassane Ouattara au second tour de la présidentielle a été en revanche reconnue par la communauté internationale mais Laurent Gbagbo a rejeté les appels des Etats-Unis, de l'UE, de la France, et de l'Union européenne à démissionner. Tous deux ont prêté serment et formé des gouvernements la semaine dernière. Les marches de jeudi et vendredi sont décisives pour le contrôle du pays.