Le Soir échos vous propose une série d'entretiens avec les représentants diplomatiques d'une sélection de pays. Après le Portugal et la Turquie, nous avons profité de la signature en début de semaine du nouveau Programme indicatif national (PIN) entre Salaheddine Mezouar et Eneko Landaburu, ambassadeur de l'Union européenne, pour demander à son représentant de nous éclairer sur sa fonction et la place du Maroc dans la politique étrangère de l'Union. Eneko Landaburu : L'Union européenne est dotée, grâce à une série de traités internationaux, de pouvoirs qui engagent l'ensemble des 27 Etats membres représentant quelque 500 millions de citoyens. Son ambassadeur représente de façon permanente l'Union européenne en tant que telle vis-à-vis des autorités marocaines. Il assure un rôle de coordination auprès des ambassadeurs des Etats membres pour toutes matières qui relèvent des compétences de l'Union européenne. Son rôle se distingue de celui des ambassadeurs des Etats membres dans la mesure où ses collègues représentent leur pays respectif alors que l'ambassadeur de l'Union européenne sera l'interlocuteur des autorités marocaines pour l'ensemble des questions que couvrent les politiques de l'Union européenne. Comment est nommé l'ambassadeur de l'Union européenne ? A l'instar de ce qui se passe pour les Etats membres dont les ambassadeurs sont nommés par le ministre des Affaires étrangères de leurs pays respectifs, Madame Catherine Ashton, qui est à la tête de la diplomatie européenne, en sa qualité de Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, désigne les ambassadeurs de l'Union européenne. Quelle est la place du Maroc dans la politique étrangère de l'UE ? Le Maroc est un partenaire privilégié de l'Union européenne. Nos relations remontent à 1969, date du premier accord commercial et depuis n'ont cessé de se développer et de se renforcer. A travers le partenariat euro-méditerranéen d'une part, traduit par la mise en œuvre de l'accord d'association, qui a permis l'émergence de nombreux projets à travers l'instrument financier MEDA. Puis la politique européenne de voisinage depuis 2003, nouveau cadre politique et complémentaire du partenariat euro-méditerranéen, qui proposait au Maroc un partenariat sur mesure suivant les souhaits et la volonté des pays intéressés. Par conséquent, notre coopération financière s'est accrue et s'est majoritairement consacrée aux appuis aux réformes mises en place par le royaume. Depuis octobre 2008, nous avons signé le document conjoint sur le statut avancé qui vise des objectifs beaucoup plus ambitieux, notamment avec le renforcement du dialogue politique et la convergence réglementaire des normes et législations marocaines dans certains domaines avec l'acquis communautaire. La place de choix que le Maroc occupe dans la politique extérieure de l'Union européenne s'est aussi manifestée par la tenue du premier Sommet UE/Maroc à Grenada au mois de mars. Quelle est la part de la culture dans la politique de l'UE au Maroc ? Comme vous le savez certains Etats membres possèdent au Maroc un vaste réseau d'instituts culturels très actifs qui participent avec talent à l'animation de la vie culturelle de ce pays. La délégation de l'Union européenne, quant à elle, organise deux évènements annuels phares qui sont le Festival du jazz au Chellah et les Semaines du film européen : à travers ces deux évènements, l'Union européenne montre l'étendue de sa diversité musicale et cinématographique au public marocain, tout en favorisant le dialogue entre les deux parties, puisque le Maroc nous appuie dans la mise sur pied de ces évènements et que les artistes marocains sont directement impliqués dans ce dialogue interculturel. La culture est un maillon essentiel de notre coopération, car elle permet aux uns et aux autres de mieux se comprendre et d'appréhender les différences avec un regard tourné vers la tolérance et le partage. Ce partage et cette mutualisation des compétences s'effectuent également entre pays du Sud de la Méditerranée avec l'UE à travers les programmes régionaux, tels qu'Euromed audiovisuel et Euromed héritage, qui financent plusieurs projets dans leurs domaines et proposent des pistes de réflexion de coopération interinstitutionnelle et d'appui technique aux autorités des pays concernés. Enfin l'Union européenne lance annuellement des appels à projets dans le secteur culturel afin de cofinancer des actions portées par des organisations marocaines non étatiques dont l'objectif est de renforcer le rôle de la culture comme un puissant facteur d'intégration sociale tout en contribuant à la professionnalisation du secteur culturel et artistique au Maroc. Pourriez-vous nous parler des négociations pour le statut avancé ? En fait de négociations, nous nous sommes mis d'accord en octobre 2008 sur un document conjoint qui fixe des objectifs ambitieux et à long terme. Nous attendons maintenant des propositions des autorités marocaines sur les domaines où le Maroc aura choisi de converger avec l'acquis communautaire et l'instrument de coordination qui vont prendre en charge cet exercice de veille et d'application de cette convergence, que l'Union européenne appuiera financièrement à travers un programme dédié. Les négociations en cours sont celles qui concernent l'accord sur les services et le droit d'établissement et sur la réadmission. La finalisation de ces derniers accords est nécessaire avant d'aller plus avant dans l'ambition que le Maroc et l'Union européenne ont ensemble fixée. Quelles sont les perspectives de développement des relations entre le Maroc et l'UE ? Je ne peux qu'être optimiste en pensant à l'avenir. Le Maroc a fait de l'ancrage européen un de ses objectifs de politique extérieure et l'Union européenne a accueilli ce choix avec des engagements humain et financier qui ne se sont pas démentis au cours des années. Nous irons ensemble sur la voie d'une consolidation de nos relations et de notre partenariat dans le cadre du statut avancé. J'ai la conviction que l'Union européenne a besoin d'un Maroc fort, moderne et démocratique.