Ils sont un peu plus de 3 millions et constituent 10% de la population marocaine. Selon les chiffres du Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM), ils accaparent 58% du nombre total des non-résidents à investir dans la Bourse de Casablanca. Ils, ce sont les Marocains du monde, communément appelés MDM pour faire court. Ces chiffres démontrent clairement la place importante de cette frange de la population marocaine dans l'économie nationale. Ramenés à l'entrepreneuriat -en l'occurrence, la PME- ces MDM constituent un fort potentiel d'investissement. C'est ce qui a justement été au centre des débats à l'occasion de la sixième Journée nationale de l'entreprise, organisée en fin de semaine dernière par le Centre des jeunes dirigeants (CJD). En effet, les MRE ne sont vus, en général, qu'à travers l'étiquette de générateur de fonds, en soutien à leurs familles restées au pays. En 2007, ces transferts ont en effet frôlé les 60 milliards de dirhams, là où ils n'étaient encore que de 20 milliards en 1998. Des chiffres qui ont suivi une évolution à deux chiffres durant la dernière décennie. Le défi est désormais de les aider à dépasser ce stade, et d'en faire de réels investisseurs et créateurs d'emplois, à travers un retour physique -ou virtuel- sur le sol natal. Cette tendance commence certes à se généraliser chez cette partie de la population, elle demeure encore à optimiser. «Le taux de retour ne dépasse pas encore 5%. Nous nous devons d'examiner tous les aspects qui pourraient encourager à développer ce chiffre», explique Driss Belkhayat, président du Centre des jeunes dirigeants. Pour arriver à ce résultat, il faudrait que l'environnement local des affaires s'y prête. Obstacles et inadaptations Une étude réalisée et présentée récemment par le ministère chargé des MRE fait un diagnostic de la situation au Maroc. Il y apparaît en effet divers obstacles freinant les ambitions d'affaires des MRE en général. Il s'agit notamment de l'inadaptation de l'environnement bancaire, du défaut d'orientation et d'accompagnement pour le MDM. «Sur la base de ces observations, le gouvernement marocain a mis en place plusieurs mesures, misant surtout sur des programmes comme le Fonds MDM Invest», explique Hicham Zanati Serghini, secrétaire général de la Caisse centrale de gestion (CCG). Ce fonds constitue plus précisément un soutien de financement conjoint -Etat et banques- destiné aux projets de création ou d'extension d'entreprises au Maroc conduits directement par les MRE. Le schéma de financement prévoit en effet une subvention de l'Etat (non remboursable) à hauteur de 10% sur l'investissement global nécessaire à la mise en œuvre du projet. La banque assure, de son côté, un crédit ne dépassant pas le seuil maximum de 65%. Seuls les 25% restants de l'investissement proviennent du MRE porteur du projet. Au total, MDM Invest n'est qu'un outil de séduction développé par les autorités locales en direction des MRE. Ce qui est louable, sur le plan purement business. Cependant, ce qu'il ne faut surtout pas négliger, ce sont les aspects sociaux relatifs à ce retour, importants à prendre en compte pour s'assurer d'une présence à long terme de ces Marocains... pas comme les autres finalement. Ils ont dit «Ces MDM ont, en effet, beaucoup à apporter à nos stratégies nationales comme le Plan Emergence, et à travers des secteurs de pointe au Maroc tels que l'offshoring ou l'automobile. Et pour favoriser ce retour, qu'il soit virtuel ou physique, le gouvernement déploie beaucoup d'efforts en termes de facilités et d'amélioration du cadre des affaires. Au niveau de l'ANPME, par exemple, il suffit qu'un MRE crée une entreprise de droit marocain pour pouvoir bénéficier de nos programmes, au même titre que les nationaux». Latifa Echihabi, Directrice de l'Agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (ANPME). «En plus du «MDM Invest», les MRE bénéficient aussi d'autres dispositifs de la CCG à travers les garanties que nous accordons pour les crédits bancaires. Nous leur offrons donc une panoplie de formules de garanties, que ce soit pour la création ou le développement d'une entreprise, le rassemblement de fonds de restructuration, ou encore pour la mise en œuvre de projets innovants. Nous avons donc toute une panoplie de formules adaptées qui peuvent être exprimées par une entreprise, dans tous les stades de la vie». Hicham Zanat Serghinii , Secrétaire Général de la Caisse centrale de garantie (CCG). «Cette journée, consacrée à la réflexion de l'apport des MDM à la compétitivité de la PME marocaine, nous a permis d'examiner plusieurs aspects importants. Il s'agit par exemple de la dimension sociale, importante pour l'épanouissement du MRE qui choisit de retourner pour investir chez lui. Ce thème a été choisi sur la base du constat que de plus en plus de nos compatriotes résidant à l'étranger sont intéressés par le retour. Ce retour doit être productif et constructif pour le Maroc». Driss Belhkayat, Président du Centre des jeunes dirigeants (CJD) MDM : Vecteurs de transfert de compétences Au-delà de la création d'entreprise, l'autre apport non moins important du MDM est son impact sur la compétitivité de la PME marocaine à travers le transfert de technologies et de compétences. Cela, d'autant plus que la plupart de ces Marocains résidant dans des pays avancés, où ils ont bénéficié de formations ou de spécialités professionnelles qui n'existent pas encore au Maroc. Ainsi, tout en restant citoyen de son pays d'accueil, le MRE peut contribuer à développer ce transfert de savoir-faire pour combler ainsi certains vides en compétences. Par extension, il pourrait aussi favoriser la création de nouveaux créneaux d'activités génératrices d'emplois et de revenus. Les domaines comme les TIC et technologies de pointe sont encore en début d'effervescence au Maroc. Le MDM est donc le parfait acteur à même de jouer le rôle de booster dans ces secteurs.