La sclérose du politique au Maroc et de ses institutions est due à leur fonctionnement en vase clos, sans ancrage dans les exigences incontournables de modernité et de développement. L'espace politique s'auto-génère, sans renouvellement, sans remise en question et sans ouverture sur les nouvelles aspirations sociales. D'autre part, nous assistons à une multiplication d'institutions dépourvues d'innovation et d'efficacité qui, au lieu d'accroître l'adhésion citoyenne, la démobilise. Pourtant, la légitimité de ces institutions n'est acquise que par sa capacité d'ouverture et de proximité avec les citoyens de façon à faire émerger une vision où se distingue un projet de société authentique et mobilisateur. Ce n'est nullement le cas aujourd'hui. La rupture entre les Marocains et le politique est grandissante. D'où sa désaffection et sa discréditation. Cette rupture bloque les synergies sociales en mesure d'apporter la dynamique indispensable à l'avancée du pays. En effet, les élites actuelles sont plus dans une logique de préservation d'acquis que d'accompagnement au changement par l'appui à l'émergence d'une relève légitime. Une génération de politiques en mesure de se mouler dans le peuple et de répondre à ses attentes assurerait, pourtant, la consolidation des institutions et leur crédibilisation. Par ailleurs, l'absence d'alternatives, le dessèchement des institutions et la panne d'idées que nous vivons, actuellement, exposent à l'avènement du populisme et à d'autres expressions démagogiques par leur capacité à tenir et à prôner des discours de «rupture». Fréquemment, dans le statu quo, les choix politiques génèrent des réactions citoyennes qui expriment, inévitablement, colères et frustrations renfermées. La mise en œuvre de la gouvernance démocratique dans ce contexte s'impose ! Elle passe notamment par l'appui à la modernisation dans les secteurs de la justice, afin d'y diminuer les risques de corruption en améliorant la détection et la répression des actes de corruption (effet dissuasif). Il passe également par le renfoncement de la liberté d'expression englobant l'ensemble des moyens de diffusion de l'information, afin qu'ils jouent un rôle déterminent dans la formation de l'opinion publique. Et ce, en plaçant certains débats sur le devant de la scène, tout en les soumettant à une éthique : exactitude de l'information et des sources, respect de la vie privée... De notre époque, ce ne sont plus que les seuls journaux, mais une télévision et une radio libérées qui participent davantage au débat démocratique. Le développement de l'Internet et des outils interactifs renforcent aussi ces débats. D'ailleurs, les nouvelles technologies incitent les organes démocratiques à modifier leur manière de travailler, en rapprochant la classe politique des citoyens. Ces nouveaux médias appuient les vecteurs traditionnels de la démocratie en inventant de nouvelles formes d'information ou d'expression axées sur l'immédiateté et la réactivité. L'émergence d'une société civile plus forte consolide de surcroît cette gouvernance démocratique par l'assurance d'une fonction de défense des intérêts des citoyens, d'appui à l'élaboration de plans dans des domaines décisifs tels que l'éducation, l'emploi ou la santé. Une société civile agit aussi en tant qu'observateur attentif de l'activité gouvernementale, parfois en mal d'inspiration ou en décalage total par rapport aux réalités du terrain. Les marches que connaît notre pays, au delà des actes de violence et de vandalisme irrespectueux unanimement condamnables, sont pénétrées en force par une exigence de modernité, de gouvernance démocratique et de justice sociale... Indubitablement, pour y parvenir il faut de véritables oppositions démocratiques suffisamment enracinées dans notre société. Le manque de perspectives de nos jeunes est une responsabilité que portent ces institutions et ces partis anachroniques et dépassés. Ils ne peuvent faire entretenir, durablement, cette situation à un pays qui a besoin de toutes ses synergies agissantes pour l'édification d'un Etat moderne. Il est inconcevable de continuer à faire de la pratique politique un privilège ou un domaine privé alors qu'il devrait être le lieu de réflexions et de transformation sociale. L'émergence d'une nouvelle élite politique et d'une gouvernance démocratique permettront de revaloriser les espaces de débats et de réflexions, entraînant l'adhésion de forces et de compétences nouvelles pour revivifier la citoyenneté. Les enjeux mondiaux et les défis à relever, exigent de sortir la politique du marasme, de la structurer autour de valeurs nouvelles que sont la genèse de projets, la méritocratie, la gouvernance opérante et transparente, afin de déconstruire cette «coutume» navrante de l'auto-génération politique, de l'inefficacité chronique d'institutions relevant plus de «la cosmétique politique» que de l'efficience et de la responsabilité sociale.