L'Organisation mondiale de la santé a déclenché mercredi son plus haut degré d'alerte au niveau international face à la résurgence des cas de variole simienne (mpox) en Afrique. «Aujourd'hui, le comité d'urgence s'est réuni et m'a fait savoir qu'à son avis, la situation constitue une urgence de santé publique de portée internationale. J'ai accepté cet avis», a déclaré le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors d'une conférence de presse ce mercredi. L'OMS avait pris la même décision en juillet 2022, lorsqu'une épidémie de variole simienne (mpox) s'était étendue à travers le monde, avant de la lever en mai 2023. Les 15 membres du comité d'urgence «ont tous» estimé que les critères étaient réunis pour déclarer une urgence de santé publique internationale face à la hausse des cas en Afrique, a affirmé le président de ce groupe ad hoc d'experts, le professeur Dimie Ogoina. «De nombreux membres du comité d'urgence sont d'avis que ce qui se passe en Afrique est en fait le sommet de l'iceberg, que le défi est plus grand et qu'en raison des faiblesses du système de santé, nous n'avons pas une vue d'ensemble du fardeau que représente le mpox», a-t-il dit, appelant à renforcer la surveillance et soulignant le manque de vaccins. La riposte mondiale en préparation L'agence de santé de l'Union africaine avait déjà déclaré l'urgence de santé publique, son plus haut niveau d'alerte, face à l'épidémie croissante de mpox sur le continent, lançant un «appel clair à l'action» pour enrayer sa propagation. Un total de 38.465 cas de cette maladie, anciennement connue sous le nom de variole du singe ont été recensés dans 16 pays africains depuis janvier 2022, pour 1.456 décès, avec notamment une augmentation de 160% des cas en 2024 comparé à l'année précédente, selon des données publiées la semaine dernière par l'agence de santé Africa CDC. «L'OMS s'engage, dans les jours et les semaines à venir, à coordonner la riposte mondiale, en collaborant étroitement avec chacun des pays touchés et en tirant parti de sa présence sur le terrain, afin de prévenir la transmission, de traiter les personnes infectées et de sauver des vies», a affirmé le patron de l'OMS aux journalistes. À l'ouverture de la réunion du comité, il avait souligné la complexité de la situation avec «plusieurs épidémies» différentes dans plusieurs pays, «avec différents modes de transmission et différents niveaux de risque». «Au cours du mois dernier, environ 90 cas de clade (groupe, NDLR) 1b ont été signalés dans quatre pays voisins de la RDC qui n'avaient jamais signalé de mpox auparavant: Burundi, Kenya, Rwanda et Ouganda», a rappelé Tedros Ghebreyesus devant le comité d'urgence. Décréter l'alerte maximale au niveau mondial «peut permettre à l'OMS d'accéder à des fonds pour les interventions d'urgence. Pour le reste, les mêmes priorités demeurent : investir dans la capacité de diagnostic, la réponse de santé publique, l'aide au traitement et la vaccination. Cela ne sera pas facile», selon Marion Koopmans, professeur à l'université néerlandaise Erasmus de Rotterdam. «La Fédération internationale de l'industrie pharmaceutique (Ifpma) est profondément préoccupée par le nombre croissant de cas de mpox dans la région africaine», a réagi son directeur général, David Reddy. 140 morts en 2022 Le mpox est une maladie virale qui se propage de l'animal à l'homme mais qui se transmet aussi par contact physique étroit avec une personne infectée par le virus. En 2022, l'épidémie mondiale, portée par le clade 2, s'était propagée dans une centaine de pays où la maladie n'était pas endémique, touchant surtout des hommes homosexuels et bisexuels. L'épidémie avait fait quelque 140 morts sur environ 90.000 cas. L'épidémie actuelle, partie de la République démocratique du Congo (RDC) et pour l'heure circonscrite en Afrique, a ses spécificités, en premier lieu un virus plus contagieux et dangereux. Elle est provoquée par le clade 1 et par une variante encore plus dangereuse, le clade 1b. Son taux de mortalité est estimé à 3,6%. Le clade 1b fait apparaître des éruptions cutanées sur tout le corps, quand les précédentes souches étaient caractérisées par des éruptions et des lésions localisées, sur la bouche, le visage ou les parties génitales. Selon le professeur Ogoina, la plupart des décès en RDC sont des enfants. «Nous observons également une tendance à la transmission hétérosexuelle du mpox», a-t-il dit. Le mpox a été découvert pour la première fois chez des humains en 1970 dans l'actuelle RDC (ex-Zaïre), avec la diffusion du clade 1, principalement limitée depuis à des pays de l'ouest et du centre de l'Afrique, les malades étant généralement contaminés par des animaux infectés. Sami Nemli avec Agence / Les Inspirations ECO