Les Echos quotidien : Microsoft semble aujourd'hui s'être fortement engagée dans différents chantiers publics. Où en est cette collaboration avec l'Etat ? Samir Benmakhlouf : Nous remarquons effectivement que les écoles marocaines s'équipent de plus en plus en matériel informatique. Cependant, cette dynamique ne prend toujours pas en compte le besoin en contenu numérique. Il ne s'agit pas seulement de s'équiper, mais aussi de préparer un contenu d'informations à dispenser aux étudiants qui soit intégralement digital. C'est en évaluant ces besoins que nous avons décidé de mettre à la disposition des écoles près de 1.500 cours de management en relations humaines qui utilisent les technologies informatiques. Nous avons également mis en place des formations commerciales. Tous ces outils restent très sollicités au Maroc au regard de leur rareté sur le marché et leur importance. Qu'apporte justement Microsoft au niveau des différentes formations dispensées ? Les logiciels d'enseignement Microsoft sont en concordance avec les programmes scolaires et universitaires arrêtés par les ministères de tutelle. Le plus que Microsoft apporte réside davantage dans la mise à niveau de la formation avec les besoins réels du marché. Plus concrètement, les étudiants, une fois diplômés, s'intègrent dans le marché du travail avec tous les outils nécessaires pour répondre aux différents besoins des entreprises. Dans ce cadre, Microsoft Maroc forme actuellement 420 formateurs qui viennent de tout le pays à notre charge dans le cadre d'un partenariat public-privé et ce, dans différents domaines. La question qui se pose alors est de savoir comment mesurer le savoir-faire de ces étudiants ? Ceci est réalisable par la délivrance de certifications qui ne remplacent pas le diplôme, mais qui permettent aux entreprises au cours de leurs recrutements de mieux cerner les compétences des candidats. Un accord de partenariat a été signé avec l'OFPPT, grâce auquel l'Office vient de faire l'acquisition de 60.000 certifications. En termes d'infrastructures, Microsoft a également offert à l'Education nationale 7 millions de packs avec des packs Microsoft office, 500.000 à toutes les universités publiques et 500.000 à l'OFPPT. Vous semblez adopter une stratégie de digitalisation des différents secteurs d'activités au Maroc... Tout à fait. C'est à juste titre le défi que je me suis lancé à mon arrivée à Microsoft Maroc et qui est de mettre fin au «tout papier». Le savoir-faire peut entièrement se décliner sous forme numérique pour remplacer la forme papier, tout en préservant les droits des propriétés intellectuelles. Aujourd'hui, l'enfant est apte à assimiler les informations en numérique et il suffit de mettre à niveau l'enseignant, afin qu'il puisse adopter une pédagogie adaptée au numérique. Comment comptez-vous alors mener ce «défi» en tant qu'opérateur ? Il faut commencer par la création d'un contenu numérique. Nous ne pouvons pas remplacer le papier sans mettre en place une alternative. Il va falloir créer une interactivité au moment de faire une recherche, ce qui permettra par exemple d'accéder directement au texte par un simple mot clé. Ce qu'il faut aussi savoir, c'est que ce chantier repose sur une décision politique et son application sur le terrain ne nécessiterait que 3 mois de travail. En se battant contre le papier, ne risquez-vous pas d'avoir beaucoup d'adversaires, notamment dans l'industrie du papier ? Imaginez que demain vous pourrez toucher les 35 millions de Marocains. Le numérique permet un suivi. Logiquement, avant même que les informations ne soient transcrites sur papier, elles l'étaient sur ordinateur. L'objectif est d'utiliser le canal numérique pour délivrer des informations à des enfants plus réceptifs. Cette guerre n'est pas négative. Il y a certainement des intérêts divers, mais aujourd'hui c'est l'intérêt général qui doit primer. Si nous abordons le sujet plus en détail, une industrie du papier emploie à titre d'exemple 5.000 personnes au moment où 8 millions d'étudiants par an payent cher pour avoir du matériel papier, alors qu'il serait plus efficace de recourir au numérique. Que fait concrètement Microsoft pour réussir ce défi ? Microsoft a démarré le travail en accompagnant actuellement plus de 100 écoles privées au Maroc. Ces écoles seront accompagnées en termes de contenus, de formation des formateurs, de certification des individus et ce du primaire au supérieur en passant par le secondaire. Ce seront des écoles sans papier avec uniquement du numérique et une interaction assurée. Ceci permettra de créer une nouvelle génération qui pourra répondre aux besoins du marché international. Pour le secteur privé, nous travaillons sur un nouveau projet relatif à la PME/PMI, dont le Maroc est le premier bénéficiaire. Celui-ci consiste en une plateforme B to B pour encourager les échanges nationaux entre les entreprises. D'autre part, Microsoft a aujourd'hui lancé un nouveau programme pour faciliter le renouvellement des parcs informatiques dans les différents établissements, avec le lancement d'un service de logiciels qui ne sont désormais plus achetés, mais loués. C'est un système de communication qui contient tous les services office, messagerie et ce, moyennant une mensualité par utilisateur oscillant entre 50 et 200 DH par utilisateur. Ce programme nous a permis de signer un partenariat avec Attijariwafa bank pour couvrir le volet paiement par cartes bancaires et par mensualités. Un vide persiste en termes de conservation des droits numériques. N'est-ce pas un frein ? Nous avons un cadre juridique au Maroc. La loi est là et elle est claire. Il s'agit de peines de prison et d'amendes dans les cas moins graves. Maintenant, il faut que chacun protège ses intérêts. Avant même de faire partie du featured agreement avec les Etats-unis, nous avions déjà adapté notre cadre règlementaire. La propriété intellectuelle ne doit tout simplement pas être un tabou et il ne faut pas que l'informel se nourrisse d'arguments irrecevables. Pour ce qui est de Microsoft, nous entendons souvent dire que nos logiciels sont trop chers. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, 95% des logiciels Microsoft dans l'éducation sont offerts. L'enseignement supérieur bénéficie d'une réduction de 75% au même titre que les PME/PMI, qui bénéficient d'une réduction de 60%. Le gouvernement aussi a droit à une réduction de 30 à 40%. Ces différentes cibles sont-elles informées de ces avantages que présente Microsoft Maroc ? N'y a-t-il pas un effort commercial à faire au niveau des revendeurs ? Les professionnels doivent aussi faire l'effort de la recherche. Or, il faut avouer qu'au Maroc nous ne savons pas vendre. Les commerciaux informatiques ne vendent que sur le principe du moins cher. Plus globalement, que représente le Maroc dans la stratégie globale de Microsoft Corp ? J'essaye de tirer un peu chez Microsoft sachant que Microsoft investit dans les formations et plusieurs autres segments à l'international. Cette vue est aussi associée au revenu au Maroc, si ces derniers ne sont pas à la hauteur, Microsoft préfèrera investir là où l'investissement est plus rentable. Il y a donc un travail à faire au Maroc et nous n'avons pas fait une grande avancée. Au Maroc, nous réalisons un dixième de ce que nous faisons en Turquie ou encore le tiers de ce qui se fait au Qatar.