C'est une véritable alerte que vient d'envoyer Standard & Poor's au gouvernement. En confirmant, le 11 octobre courant, la notation souveraine du pays à BBB-, dans la catégorie «Investment grade», l'agence de notation américaine a, certes, reconnu la solidité des fondamentaux économiques du pays, mais a dans le même temps prévenu sur les risques qui planent sur le Maroc. La notation sur les perspectives du pays a, ainsi, été revue à la baisse, passant de stable à négative. Selon S&P, il s'agit là d'une conséquence directe du creusement des déficits budgétaires et courants qui ont atteint des niveaux alarmants. Pire encore, l'agence de notation prévient que, si rien n'est fait pour réduire ces déficits, la note du Maroc pourrait être revue à la baisse, puisqu'en même temps, planent sur le pays une amplification des tensions sociales qui risquent d'impacter la stabilité politique. Selon les analystes de S&P, la notation souveraine du pays est soutenue par son approche de la gestion macro-économique, qui a toujours mis l'accent sur la stabilité. «Cela a contribué à atteindre une forte croissance économique comparé aux autres pays voisins, à maintenir l'inflation à des niveaux bas, relativement faibles, à avoir un effet de levier externe ainsi qu'un endettement externe et une dette publique modérés». Cette performance reste, cependant, contrariée par la faible prospérité du pays, la persistance des tensions sociales depuis le printemps arabe, même si la situation est moins inquiétante que dans les autres pays de la région et surtout la détérioration du déficit public. Ce dernier est, en effet, passé à 4% depuis 2011 et, selon les estimations de S&P, la situation pourrait empirer cette année en raison d'une probable réduction des dépenses. Réformes cohérentes «Le gouvernement a commencé à réduire les subventions aux carburants à la mi-2012, mais il faudra prendre d'autres mesures pour rétablir la stabilité financière traditionnelle du Maroc», estime l'agence de notation qui s'inquiète, par la même occasion, de l'absence de visibilité sur le calendrier des réformes. «Nous notons également qu'à ce jour, aucun calendrier précis pour les réformes n'a été aménagé», constate l'agence. Or dans le même temps, la conjoncture est loin d'être favorable pour le pays. En plus de la baisse des IDE, des transferts des MRE et de l'activité touristique en raison de la crise mondiale, les risques d'une flambée du cours du pétrole et des produits alimentaires ne sont pas à écarter. S'appuyant sur les intentions du gouvernement de réduire les subventions, notamment à travers la réforme de la Caisse de compensation, S&P, s'inquiète des conséquences d'une telle mesure qui «sera politiquement controversée et pourrait miner la cohésion sociale». Dans l'ensemble, les perspectives s'annoncent, donc, peu reluisantes pour l'économie nationale et l'agence, souligne «qu'un rééquilibrage économique à moyen terme sera difficile et peut conduire à réduire la croissance du PIB, ce qui pourrait accroître les risques sur la stabilité politique et sociale du pays». Toutefois, S&P reconnaît que, les autorités marocaines ayant pu réagir rapidement aux défis du «Printemps arabe», le gouvernement actuel dispose de la légitimité nécessaire pour «engager des réformes cohérentes», seule alternative à une véritable sortie de crise. «Les notes du pays pourraient se stabiliser au niveau actuel si le gouvernement met en œuvre des réformes qui visent à réduire durablement les déficits, tout en s'attelant à la préservation de la paix sociale et la stabilité politique» conseille S&P. Le gouvernement est, en tout cas, prévenu car au moment où le gouvernement se prépare à sortir sur le marché international, ce warning, contrairement à l'optimisme du FMI, constitue une mauvaise nouvelle pour le Maroc et Benkirane doit plus que jamais engager les réformes nécessaires pour rassurer les partenaires et contenir la situation économique.