Après une année 2019 euphorique, les exercices 2020 et 2021 s'annoncent prometteurs pour le marché de la dette privée au Maroc, selon les experts de CDG Capital Research. Une appréciation qui tire profit, contrairement à l'ensemble du marché financier, des effets considérables de la crise de la Covid-19 sur l'équilibre des différentes entreprises et l'accentuation prévue du déficit de liquidité du système bancaire. La pandémie de la Covid-19 a fortement impacté le marché financier national, notamment son cadre d'évolution, avec une orientation expansionniste de la politique monétaire tant en termes d'injection de liquidité que de baisses du taux directeur, sans oublier l'affaiblissement des taux de rendement des autres classes d'actifs sous l'effet d'un recul de la demande. Parallèlement à cela, la situation des différents acteurs devrait se détériorer en raison de la conjoncture économique difficile et de leurs engagements financiers à caractère exécutif. Des acteurs qui, habituellement, font appel aux levées de fonds pour combler leurs besoins de financement, dynamisant ainsi davantage le marché de la dette privée. Ainsi, les analystes de CDG Capital Research tablent en 2020 sur des levées de 54 MMDH, en accroissement de 15% contre seulement +7% enregistrés l'année précédente. Une tendance qui couvre une hausse de 18% à 41 MMDH des émissions de titres de créances négociables (TCN) et de 10% à 13 MMDH pour les obligations. Les certificats de dépôt (+10% à 32,8 MMDH) et les bons de société de financement (+64% à 6,4 MMDH) sont les principaux contributeurs à l'augmentation des tombées de TCN. «Concernant les variables explicatives de la dynamique des différents compartiments du marché de la dette privée, l'orientation semble globalement favorable, laissant présager une amélioration des émissions au cours des deux années 2020 et 2021», précisent les analystes de CDG Capital Research. Des estimations qui se sont basées dans un premier temps sur les perspectives de Bank Al-Maghrib, qui prévoient une montée en puissance du déficit de la liquidité bancaire pour atteindre les 154 MMDH en 2020 et 171 MMDH en 2021, contre 108 MMDH en août 2019. Un sérieux creusement qui serait causé par l'effet de l'accentuation de la croissance tendancielle de la circulation fiduciaire en lien avec la crise de la Covid-19, combiné à la régression prévue des réserves de change compte tenu de la baisse drastique attendue des recettes du tourisme et des transferts des MRE. Cela devrait accentuer le recours des banques aux émissions des certificats de dépôt (CD) pour combler leurs besoins de trésorerie et ainsi répondre aux exigences de fonds propres instaurées dans le cadre des réformes de Bâle. Concernant les bons de société de financement (BSF), le rythme de distribution de crédits aux agents non financiers devrait ralentir en 2020 et 2021, pour s'établir respectivement à 1,9% et 2,6% contre 5,5% enregistrés en 2019. La hausse des besoins de financement des entreprises non financières a été portée ces dernières années par l'importance des délais de paiement et la morosité économique, particulièrement dans certains secteurs à l'image de l'immobilier, dont quelques principaux acteurs sont considérés comme des émetteurs classiques sur le marché. Cependant, l'accroissement prévu des créances en souffrances, aussi bien des entreprises que des ménages, devrait accentuer le besoin des entreprises financières. Du côté du ministère des Finances, le rapport concernant les Entreprises et établissements publics (EEP) -publié dans le cadre de l'élaboration de la loi de Finances 2020- soutient que les investissements des EEP devraient s'accroître considérablement, au cours des deux prochaines années, pour s'établir à une moyenne de 100 MMDH contre seulement 70 MMDH enregistrés sur les cinq dernières années. Toutefois, «la conjoncture difficile, particulièrement l'arrêt quasi-total de l'activité au cours du deuxième trimestre de l'année 2020, associée à la situation de surendettement de certaines EEP, devrait rendre la réalisation de ces objectifs difficiles et les besoins de financement beaucoup plus importants», souligne CDG Capital Research.Le scénario de reprise semble également appuyé par les conditions de financement de l'économie nationale qui se sont nettement améliorées, particulièrement en termes de taux de financement, taux ayant atteint des niveaux historiquement bas. En effet, les révisions à la baisse du taux directeur, notamment celles de mars 2020 de 25 points de base (pbs) et de juin de 50 pbs, avec des perspectives de révisions à la baisse supplémentaires au cours des deux années 2020 et 2021, auront un impact amplifié sur les niveaux de taux débiteurs, principalement ceux destinés aux entreprises. À cela s'ajoute la poursuite de la correction baissière des taux BDT, utilisés comme base de calcul pour les émissions de la dette privée, avec un recul quasi-similaire à celui du taux directeur. Une tendance qui s'explique par la forte demande des opérateurs sur les maturités moyenne et longue en vue d'aligner leurs portefeuilles sur une perspective de baisse des taux et d'optimisation de rendement. Par ailleurs, la pénurie des opportunités de placement devrait orienter les investissements vers les produits de taux, particulièrement les BDT et la dette privée, jouissant de la garantie de l'Etat et d'une bonne qualité de signature. Aida Lo