Prix, rendement, qualité, coût des intrants ou... catastrophes naturelles, autant d'éléments sur lesquels l'agriculteur est exposé à un risque. Risque sur le prix, quand le cours de la denrée cultivée se déprécie. Risque de rendement, quand des variables externes font baisser la quantité produite à l'hectare. Risque sur la qualité de la récolte, dont la dégradation impacte directement sa valeur. Risque sur les coûts de production, quand la volatilité des prix des intrants menace la marge de l'exploitant. Tous ces risques sont liés de près ou de loin aux aléas climatiques, par définition, non maitrisables et rarement prévisibles. Pourtant, le fermier comme tout autre chef d'entreprise, a besoin de visibilité sur le long terme en raison de la volatilité des indicateurs qui constituent une menace majeure pour la stabilité des revenus et la pérennité de l'activité. Seulement, à la différence des autres entreprises, les exploitations agricoles sont exposées à un niveau élevé d'incertitudes, les rendant inintéressantes à couvrir pour les compagnies d'assurance, vu les bénéfices attendus. Ce qui constitue une entrave importante pour le développement du secteur et pour l'attrait du métier. La fuite en avant des assureurs envers le secteur Au Maroc, la MAMDA-MCMA est la seule compagnie à couvrir quelques risques agricoles, en l'occurrence, le risque sécheresse et, plus récemment, le risque grêle. «Des couvertures qui relèvent plus de la mission de service publique assurée pour le compte de l'Etat», explique-t-on auprès de la mutuelle d'assurance. Le risque sécheresse est couvert par les fonds publics. Celui contre la grêle est le mieux maitrisable, vu qu'il ne concerne qu'un couloir circonscrit dans l'espace. En quelque sorte, la compagnie se charge de la gestion des produits pour le compte de l'Etat qui supporte effectivement le risque financier. Dans un contexte marqué par les grandes ambitions du Plan Maroc Vert, ces offres de sécurisation agricole (actuellement disponibles) sont nettement insuffisantes. Toutefois, les acteurs majeurs du financement agricole comptent bien accélérer la cadence, à travers la multiplication de ce type de produits à moyen terme. «Une offre plus complète devrait voir le jour dans les deux années qui viennent», estime Tarik Sijilmassi (président du Crédit Agricole du Maroc), lors du congrès international sur le financement agricole et rural qui a été clôturé vendredi dernier à Marrakech. Sauf qu'à l'état actuel des choses, les prérequis sont loin d'être réunis pour le développement d'une telle gamme de services. «Aucune compagnie d'assurance ne peut proposer, à elle seule, des couvertures contre les risques climatiques et les catastrophes naturelles», explique un expert en actuariat. «Il est nécessaire de constituer des pools, à l'échelle régionale ou continentale, pour partager et mutualiser le niveau élevé de l'exposition», poursuit-il. En effet, les coûts engendrés par l'avènement d'une catastrophe climatique, causant des sinistres à grande échelle, pourrait mettre à mal les plus solides compagnies. Constituer des pools En clair, les assureurs doivent eux-mêmes être couverts par des fonds supranationaux de garantie ou de réassurance, pour être en mesure de sécuriser les exploitants agricoles. C'est également le cas pour le secteur de l'aviation, qui dispose pour sa part d'un pool africain de réassurance pour mutualiser les risques aériens. Une autre possibilité existe, mais est peu réalisable sur le plan économique : celle pour les compagnies nationales de se réassurer au niveau international. Les primes à verser reviendraient bien trop chères pour justifier les retombées attendues. Sur un autre plan, l'atomisation des exploitations qui marque l'agriculture marocaine ne permet pas de réaliser des montages d'assurance viables et avantageux. L'agrégation des terres et le regroupement des exploitants dans le cadre de relations contractuelles est donc un facteur déterminant pour l'accélération du processus de sécurisation des récoltes.