Les médias africains sont un maillon important dans la lutte contre les changements climatiques. Une grande responsabilité incombe, en effet, aux journalistes en matière d'environnement et de développement durable sur le continent. L'Union de la presse francophone (UPF) a réuni à Benguerir les journalistes africains autour de cette question cruciale. Face aux défis climatiques et de développement durable, les médias sont appelés à jouer un rôle fondamental aussi bien en matière de sensibilisation de la population que de transmission de messages clairs aux décideurs. C'est l'un des sujets discutés de fond en comble par la deuxième édition du symposium de l'Union internationale de la presse francophone qui s'est tenu en partenariat avec l'OCP les 30 et 31 mars à l'Université polytechnique Mohammed VI de Benguerir sur une thématique d'une actualité brûlante : «médias, environnement et développement durable en Afrique». Cet évènement qui se tient dans la foulée de l'organisation de la COP22 a été marqué par la présence de dizaines de journalistes africains intéressés par l'avenir du continent noir, qui est victime des changements climatiques sans en être vraiment responsable. L'Afrique n'émet, en effet, que 4% des gaz à effet de serre, mais elle subit de plein fouet l'impact du dérèglement climatique comme les sécheresses sévères et les inondations. Les enjeux sont de taille. La question de l'environnement qui n'intéressait pas beaucoup les médias il y a quelques années est actuellement au devant de la scène. De plus en plus de médias attachent une importance considérable à l'environnement et au développement durable. La prise de conscience ne cesse de grandir au fil des années. Plusieurs défis sont à relever dont la manière de transmettre une information claire et simplifiée sur les risques climatiques et les bonnes pratiques dans le domaine ayant surtout un effet persuasif. Pour y arriver, il s'avère nécessaire de renforcer la relation entre les médias et les scientifiques, comme le souligne Maria Senoussi, experte, présidente du Conseil scientifique de l'IRD. «Les médias ont l'art de communiquer et de traduire les données scientifiques en un langage accessible. Ils constituent un maillon important de la chaîne en vue de passer des messages aux décideurs et dissiper ainsi les certitudes», précise-t-elle. Cette scientifique met en avant plusieurs problématiques auxquelles il convient de s'atteler en Afrique en matière de développement durable. Il s'agit notamment de la nécessité de maîtriser la croissance démographique qui pèse sur les ressources (besoins en alimentation, en eau, infrastructures). La bonne gouvernance est un élément-clé et déterminant pour l'avenir du continent. Or, jusque-là ce volet est pointé du doigt dans une grande partie des pays africains. Les ressources doivent être protégées et leur gestion optimisée afin de créer de la richesse et s'assurer de l'adoption de la démarche du développement durable qui est on ne peut plus inéluctable. Les décideurs africains sont appelés à mettre l'avenir de leurs pays entre les mains de leurs citoyens et mettre fin au pillage des richesses et des ressources par des investisseurs étrangers. Le développement durable et la sauvegarde des ressources doivent être des conditions sine qua non pour l'entrée des investisseurs étrangers sur le marché africain. L'Afrique a certes besoin de partenariats et de transfert de technologies, mais pas au détriment du développement durable. Selon Maria Senoussi, il faut que l'Etat scelle des accords avec le secteur privé stipulant noir sur blanc le respect de l'environnement. Le chemin est encore très long. Une grande responsabilité incombe aux journalistes même si certains professionnels estiment que les médias n'ont pas pour mission de jouer un rôle de militantisme. Les journalistes ont plutôt pour devoir de transmettre la vérité, d'après plusieurs intervenants, mais toujours est-il que les choix dans le traitement médiatique des différentes questions pourraient avoir un impact important auprès des décideurs et des citoyens. La prise de conscience ayant trait aux enjeux environnementaux et de développement durable au sein de la communauté médiatique en Afrique est en train de s'élargir. L'élan devra se poursuivre pour atteindre les objectifs escomptés. La présidente de l'UPF Maroc, Meriem Oudghiri, est convaincue que le changement climatique va devenir de plus en plus important pour les médias africains qui vont eux-mêmes jouer un rôle crucial dans la riposte mondiale : servir de vigie, sensibiliser, diffuser et donner à l'opinion publique la capacité de faire des choix informés. Ils sont nombreux à souligner que cette question est largement tributaire du degré d'implication des médias ainsi que de la mise en place de programmes de formation au profit des journalistes aux quatre coins du continent. La mobilisation ne devra pas relever du simple effet de mode car les menaces sont réelles. Plusieurs volets sont à prendre en considération dans les traitements médiatiques, à commencer par la question de la transparence. Les médias appellent aussi à la mise en place de législations efficaces permettant l'accès à l'information. Jusque-là, la rétention de l'information constitue un frein de taille pour les journalistes dans le traitement des questions environnementales surtout lorsqu'il s'agit de dossiers épineux. Par ailleurs, la maîtrise des réseaux sociaux pour communiquer autour du développement durable et des défis climatiques est indispensable pour les médias en vue de diffuser des informations crédibles ayant un impact concret sur toutes les cibles.