L'affaire risque de faire tache d'huile dans le dossier des investissements espagnols au Maroc. Un groupe d'entrepreneurs espagnols s'est dit avoir accusé des pertes estimées à 100 millions d'euros, résultat d'extorsions et d'escroquerie dont il s'estime être victime en menant des investissements au Maroc. Sur le banc des accusés, ils pointent du doigt des entrepreneurs nationaux comme des institutions officielles, prétendent-ils. Les hommes d'affaires en question se sont constitués en association, dénommée «Association des affectés par l'extorsion au Maroc». Un mauvais coup de publicité en ces temps où le Maroc déploie tout son génie afin d'attirer le capital espagnol au Maroc. La nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre dans les médias espagnols. D'après des déclarations recueillies par le portail Europa Press, Francisco de Arratia, le président de l'association a souligné que, «le Maroc est devenu une souricière pour les Espagnols qui ont décidé d'y investir. Même si le gouvernement (espagnol, ndlr) les encourage à le faire, une fois sur place, ils sont victimes de l'abandon». Le président de l'association s'est lancé dans une longue diatribe contre le Maroc. Selon cette association, «la grande majorité des entreprises ayant fait des affaires au Maroc ont vécu une mauvaise expérience, face à une minorité qui tire son épingle du jeu», a déclaré le président de l'association. Citant à ce propos des cas déjà révélés au grand jour. Mais d'autres cas font leur apparition. C'est l'affaire de l'entreprise Occibelia, une société spécialisée dans l'immobilier de luxe. Ladite société dit qu'après avoir construit un complexe touristique de haut standing à Tanger, les autorités de la ville ont ordonné la démolition de deux des édifices érigés. En revanche, le président de l'association ne fournit aucun élément sur les motifs de cette démolition. Le cas de l'entreprise Crotalon Construction est aussi cité comme une affaire d'escroquerie. Ladite entreprise avance avoir perdu des garanties présentées pour la réalisation d'un projet la liant avec l'entreprise marocaine Socotraco. En somme, une série d'accusations de malversations, qui fustige, au passage, le manque de transparence des tribunaux du royaume. Selon Arratia, les entrepreneurs regroupés sous la bannière de son association se sont vus obligés de plier bagage et de rentrer à la maison, «escroqués et menacés, dans certains cas, de mort». Contacté par les Echos, le conseiller économique de l'ambassade du Maroc à Madrid, Cherif Cherkaoui, s'est refusé à tout commentaire, précisant que la position de la représentation marocaine est que «ce contentieux est devant les tribunaux et que c'est au pouvoir judiciaire de se prononcer sur ce litige». Cependant, une rude bataille de lobbying est menée par les concernés, sur plusieurs fronts. Dans leurs déclarations à la presse, les entrepreneurs disent avoir contacté le gouvernement et la Maison royale espagnole, mais leurs doléances sont restées lettre morte. Il semble que les autorités espagnoles s'abstiennent d'intervenir dans ce conflit de nature commerciale. D'ailleurs, les plaignants estiment que ni l'ambassade de l'Espagne au royaume ni le gouvernement de leur pays n'ont volé à leur rescousse. Le fait estdémenti en bloc par une source diplomatique ibère contactée par la presse espagnole. Le responsable diplomatique a assuré que le président de l'association AAEM a été reçu par les services diplomatiques à chaque fois qu'il en a manifesté le souhait. Piqués à vif, ces hommes d'affaires estiment avoir épuisé toutes les voies de dialogue, précisant que toutes les tentatives de conciliation amiable restent vaines. D'où cet appel à la mobilisation, lancé par l'association, laquelle cherche à médiatiser davantage l'affaire sous les latitudes ibères. Des sit-in et des manifestations sont prévus les 6 et 25 novembre devant le siège de l'ambassade du Maroc à Madrid et au ministère espagnol des Affaires étrangères. Le choix des dates n'est pas fortuit, puisque la première coïncide avec la célébration de la Marche Verte et celle du 25 novembre tombe le jour des élections législatives. De même, ils planifient des actions de communication tout au long du mois de novembre dans les ports de Tarifa et d'Algésiras, en présence d'hommes politiques. Aussi, ils ont mis au point une page web où ils recensent toutes leurs doléances. Un message incite d'éventuelles victimes à s'unir à l'association pour faire part de leur expérience.