Mohamed El Guerrouj : DG de l'Agence pour le développement agricole (ADA) En l'espace de deux ans, le chiffre d'affaires à l'export des produits du terroir est passé de près de 10 millions de DH à 320 millions. Une progression significative portée notamment par 200 coopératives qui bénéficient de l'appui du Plan Maroc Vert. Selon Mohammed El Guerrouj, DG de l'Agence de développement agricole, ces performances sont appelées à s'améliorer en raison du plan d'actions mis en place pour promouvoir l'économie solidaire. Les Inspirations ECO : Comment se déroule la participation marocaine à l'édition 2016 du SIAP ? Mohammed El Guerrouj : C'est notre quatrième participation au Salon international de l'agriculture de Paris. C'est à la fois un rendez-vous et une occasion pour développer la commercialisation de nos produits du terroir. Comme vous le savez, ce salon enregistre en une semaine plus de 700.000 visiteurs dont 40 % d'opérateurs d'économiques en quête de bons produits. Et aujourd'hui, le Maroc a vraiment de bons produits ? Bien sûr. Le Maroc a des produits de qualité et notre présence au salon a pour but de confirmer la compétitivité de notre offre. Afin que le public apprécie la qualité culinaire des produits marocains, des cooking shows sont organisés tout au long de la journée avec des dégustations. L'autre objectif, et qui est très important, c'est la ressource humaine. Nous allons en effet permettre à nos petits agriculteurs d'accéder à un marché international, de vendre et de défendre la qualité de leurs produits directement. Et nous, nous sommes là pour les aider à pérenniser leur engagement dans ce marché international. 30 exposants dont 22 sont là pour la première fois sont aujourd'hui à Paris. Comment sont-ils arrivés là ? C'est l'aboutissement d'un long processus. Il y a une feuille de route dans le cadre du Plan Maroc Vert pour améliorer la commercialisation des produits ainsi qu'un ratissage et l'accompagnement des coopératives. Il y a une trentaine d'exposants mais ils représentent 25 Groupements d'intérêt économique (GIE). Est-ce les trois dernières participations au salon ont été fructueuses pour les exposants ? Tout à fait. Nous avons fait une évaluation et nous pouvons affirmer avec fierté que 80 % des coopératives ayant participé au salon ont aujourd'hui des contrats d'exportation permanents dans différents pays européens (France, Italie, Espagne etc...). Certaines ont même conclu des contrats avec des opérateurs en Inde. C'est l'avantage d'être présents dans ces foires internationales, on a l'occasion de rencontrer pratiquement le monde entier. Depuis 2012, l'accent est mis sur la filière des produits du terroir. Quelle est la croissance de cette filière au niveau local et à l'export ? Nous avons fait un travail de fond sur le terrain car il n'y a pas que le volet commercialisation. Nous avons commencé par le chantier de la valorisation en équipant plus de 400 unités agricoles. Un grand effort a été mis sur le marketing et le packaging. Pour cela, nous avons commencé par le marché national pour bien sécuriser le produit du terroir en créant une masse critique. En effet, l'amont ne pas produire si la demande n'est pas permanente et sécurisée. Nous avons organisé les petits agriculteurs en coopératives puis en GIE et nous leur avons donné une visibilité. Aussi, nous avons attaqué le marché international. Comment cela ? En 2012, nous avons pris un échantillon de 200 coopératives qui représentent l'ensemble des régions du royaume. En deux ans et demi, elles ont multiplié 32 fois leur chiffre à l'export, passant de 10 millions de DH à 320 millions. Ces performances vont encore s'améliorer grâce aux programmes de soutien et de valorisation des projets d'économie solidaire. Des projets qui vont aussi contribuer à améliorer les revenus des agriculteurs. Le SIAP, cette année, a pour thème l'alimentation citoyenne. Comment concilier le défi de la production propre et la sécurité alimentaire ? Développer et nourrir le Maroc –et la planète- tout en préservant l'environnement. C'est un triple défi que le Maroc auquel s'est attelé avec la mise en place du PMV, dans le pilier II qui consacre l'économie solidaire. Seules les cultures et les techniques qui respectent l'environnement sont prises en compte. A l'ADA, nous avons une direction de l'ingénierie qui assiste l'ensemble des directions régionales dans la conception de leurs projets. Aucun projet n'est soumis au financement si la composante environnement n'est pas respectée. Quant à la nourriture de la planète, à l'échelle mondiale tout le monde est d'accord, notamment FAO et la Banque mondiale, sur le gap dans la sécurité alimentaire existe parmi les petits agriculteurs car ils n'arrivent pas à extérioriser leur potentiel. Donc, lorsqu'on s'oriente vers ces petits agriculteurs et qu'on les forme et qu'on les regroupe au sein des GIE, ils valorisent leur potentiel. Comme vous le savez, au Maroc, nous avons une loi sur l'agrégation qui permet d'avoir cet interface entre le petit fellah et les agrégateurs. En favorisant l'accès au progrès technique, ces petits producteurs de l'économie solidaire pourront participer pleinement à assurer l'alimentation des Marocains dans un cadre citoyen. L'agriculture solidaire emploie aujourd'hui plus de 850.000 personnes, hommes et femmes. Ce qui représente un énorme potentiel. Cultures résistantes Pour lutter contre le déficit hydrique, le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime a mis en place un programme de remplacement des cultures voraces en eau par des cultures adaptées aux zones aux conditions climatiques difficiles, comme la figue de Barbarie. «Il s'agit d'adapter les cultures à ces contraintes. Dans le cas du cactus, nous avons réalisé la plantation de 40.000 hectares. La production atteint de bons niveaux aujourd'hui et nous avons des exportations permanentes vers de nombreux pays, notamment les Emirats arabes unis et l'Allemagne. C'est la même chose pour l'amandier qui remplace les céréales dans les zones pauvres en eau», indique Mohamed El Guerrouj, DG de l'ADA. Rappelons que l'agence participe à la mobilisation du foncier et au développement de cultures plus résistantes aux conditions climatiques des zones montagneuses et oasiennes.