La période estivale touche à son épilogue et pour les tours opérateurs, principalement européens, qui dominent le marché dans la région euro-méditerranéenne, c'est l'heure des comptes. Et comme il fallait s'y attendre, la période a été des plus difficiles pour les pays du Maghreb, principalement pour la Tunisie et l'Egypte et, dans une moindre mesure, pour le Maroc, en raison principalement de l'impact du printemps arabe et de l'attentat du café Argana pour le royaume. Le Maroc s'en tire relativement mieux que ses concurrents directs, selon les chiffres pour le premier semestre du baromètre semestriel de l'Association des tours opérateurs français (CETO), qui représente 80% du marché des voyages à forfait et une partie importante de celui des vols secs avec plus de 80 opérateurs membres. Qu'il s'agisse des voyages avec forfait ou des vols secs, la destination Maroc a pu garder sa place historique de première destination étrangère. La fréquentation a été, du reste, assez mitigée puisque le Maroc a enregistré une baisse de 1% sur les voyages avec forfait et une progression de l'ordre de 8% pour les vols secs. Une situation moins douloureuse pour la Tunisie et l'Egypte, qui accusent une régression de 44% et 39% respectivement, pour les voyages avec forfait et pour les vols secs, soit une hausse de 3% pour la Tunisie alors que l'Egypte sort de la liste des dix premières destinations étrangères, au profit de l'Algérie qui enregistre une augmentation de l'ordre de 34% sur le même segment. En ce qui concerne la réservation pour les prochains mois qui coïncident avec la fin de l'été et le début de l'automne, c'est-à-dire la veille des vacances de fin d'année, les prises de commandes s'annoncent moins consistantes, en comparaison avec la même période de l'année durant l'exercice précédent. Le Maroc enregistre en effet un recul de 38%, toutefois mieux que la Tunisie (-61%) et l'Egypte (-68%). Ces résultats contrastent avec les chiffres officiels dont le niveau, à fin juin 2011, faisait état d'une tendance positive. Les principaux marchés fournisseurs enregistrent tous des indicateurs au vert avec +4% pour la France, +18% pour l'Allemagne, +12% pour le Royaume-Uni, +5% pour l'Italie et +17% pour la Belgique, selon le département et l'observatoire du Tourisme. Nouvelles destinations L'impact des événements qui ont marqué la région sur le premier semestre est donc assez palpable. Les touristes européens semblent changer de destination en attendant une accalmie. Une échéance que les promoteurs prévoient plus brève au Maroc que pour la Tunisie et l'Egypte. Selon le PDG de FRAM, Antoine Cachin, le Maroc, qui a été moins touché que la Tunisie, doit «gentiment redémarrer cet automne et cet hiver». Des prévisions que partage René-Marc Chikli, président du CETO. Dans un entretien accordé au quotidien français Les Echos, le voyagiste français a souligné que «l'attentat sur le café Argana de Marrakech mais aussi la situation géopolitique dans la région sont à l'origine d'une baisse non négligeable de l'arrivée de touristes français au Maroc». Pourtant, les résultats pour les TO français ont été assez reluisants cette année, ce qui confirme la reprise pour le secteur au niveau mondial. L'activité a, par exemple, enregistré une hausse de 7,6% cette année pour le TO français, tirant au passage le chiffre d'affaires du secteur qui a connu une progression de 9,4%. Seule l'Afrique du Nord, naguère destination phare des touristes français et européens, a été fortement impactée par une baisse de fréquentation et de réservations. La Tunisie a ainsi durement été affectée durant la période estivale. Selon le CETO, les touristes français ont délaissé ces destinations traditionnelles en faveur du tourisme local et de certains pays de l'Europe du Sud. L'Espagne, la Grèce ou encore la République dominicaine ont été les pays qui ont le plus bénéficié de cette conjoncture, avec de nouveaux pays comme la Turquie, Maurice ou le Sénégal et les Antilles françaises. De nouvelles destinations concurrentes avec lesquelles le Maroc doit désormais compter en développant de nouvelles niches prometteuses, notamment les voyages organisés. Cela reste également lié à une offre marketing plus agressive de la part des TO nationaux, qui devront réadapter leurs stratégies opérationnelles. Un ticket gagnant, déjà plébiscité par leurs homologues internationaux. Réorganisation stratégique Conséquence immédiate de la conjoncture actuelle, les grands voyagistes internationaux opérant au niveau de la région ajustent leur positionnement et affinent leurs stratégies. Le bout du tunnel ne semble pas pour demain, surtout avec l'impact du ramadan sur la période estivale, qui se fera sentir sur plusieurs années. Le groupe allemand TUI, lourdement pénalisé par la situation en Afrique du Nord, notamment du fait d'une chute des réservations pour la Tunisie et le Maroc, a par exemple annoncé une restructuration de sa filiale française à travers la fusion des marques Nouvelles Frontières et Marmara en une seule entité. Les deux entreprises qui opèrent au Maroc seront ainsi mieux positionnées sur le marché en développant des offres complémentaires. Une manière de s'adapter aux besoins des clients de plus en plus regardants sur l'aspect sécuritaire et très méticuleux sur les questions de stabilité politique et socioéconomique des pays récepteurs. Brader les destinations ne semble donc pas une bonne solution puisque l'impact de cette action reste trop limité dans le temps et en termes de valeur ajoutée. Par contre, les voyages organisés offrent l'avantage d'augmenter l'entrée des devises, même en cas de baisse de fréquentation. Selon le directeur général de Marmara, Florian Vighier, «le panier moyen était meilleur que l'an dernier en Espagne, en Turquie ou en Grèce», ce qui explique le paradoxe d'une hausse de la valeur ajoutée touristique dans le sillage d'une baisse des nuitées.